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Lâchez prise !

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Une contribution de Louis Chiquet 

 

Face aux problèmes pour se faire comprendre ou simplement convaincre ses équipes, beaucoup de dirigeants et de managers semblent démunis. Une forme d’impuissance les saisit et les conduit soit au conflit, soit à une forme de résignation qui frustre et enferme et éloigne inexorablement d’une création de valeurs pourtant nécessaire et d’une organisation où chacun trouve sa place et apporte sa pierre à l’édifice.

Dans ce contexte, être capable de prendre du recul et savoir lâcher prise est un atout essentiel pour tout patron ou manager qui souhaite avancer et faire évoluer positivement son organisation.

 

Dépasser la frustration et l’impasse

Ils sont nombreux ces patrons qui comme Anthony sont frustrés par une relation conflictuelle avec des équipes commerciales. Dans son cas, les résultats de ses commerciaux ne sont clairement pas à la hauteur des objectifs fixés. Pour autant, il ne parvient pas à les challenger, craignant de s’enfermer dans une situation conflictuelle. Dans ces conditions, difficile pour lui de savoir quoi faire et comment réagir. D’autant que, malgré son statut de dirigeant, il a bien conscience de ne pas avoir d’emprise ou de pouvoir contraindre ses collaborateurs.

Idem pour Sylvie, elle aussi dirigeante qui est dans l’impasse avec son commercial et associé, et ses équipes marketing. Elle est celle qui a créé l’entreprise mais son associé est, en théorie, chargé de ces sujets. Or, il ne les porte pas, laissant les choses vivre par elles-mêmes. Immanquablement, le business en pâtit. Et, malgré ses tentatives pour accompagner son associé, pour l’aider à cheminer dans la bonne direction, rien ne semble pouvoir le faire changer ; du moins sans prendre le risque de dégrader une relation déjà fragile. 

Autre exemple, celui d’Alexandra, manageuse « plus royaliste que le roi », qui souhaite le meilleur pour son entreprise, s’impliquant sur tous les sujets. Elle se mêle de tout, y compris de sujets qui n’ont rien à voir avec ses autorités ou expertises. Incapable de tout gérer, de mesurer un impact positif de cet engagement excessif, elle souffre de la pression qu’elle s’est elle-même mise et doit faire avec une sensation d’impasse voire d’échec. D’autant qu’avec l’arrivée d’une nouvelle CEO qui impose une nouvelle vision, elle se sent désormais dépossédée, mise de côté. La situation s’aggrave alors même qu’elle devrait comprendre que ce n’est pas « son » entreprise, qu’il s’agit d’une organisation qui est à la fois bien plus qu’elle-même et qui, de manière ultime, n’est pas sa responsabilité.

On le voit, les exemples de blocages et de situations frustrantes de l’organisation sont légion pour les dirigeants et managers. Et, si savoir lâcher prise était une partie de la solution ? Soit, en cas de blocage, beaucoup d’entre nous avons le réflexe de faire appel à la technique « de la carotte et du bâton ». Sanctionner, inciter – par des primes par exemple – peut s’avérer un temps efficace. Mais, bientôt, il faudra trouver autre chose. Apprendre à lâcher prise, accepter ce qui est… C’est en somme mettre en pratique les célèbres paroles de Marc Aurèle : « Donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de changer celles que je peux changer, et la sagesse de distinguer les premières des secondes. »

 

Se concentrer sur le positif

Dirigeant ou manager, ma priorité doit être de me concentrer sur ce qui va me permettre d’avancer et d’aider à la création de valeur pour l’organisation. Si le questionnement ou le problème concerne le périmètre sur lequel j’ai autorité, libre à moi de faire les choix et de trancher. S’il est hors de celui-ci, je me contente de respecter les règles même si tout me fait penser qu’on devrait faire autrement, le fameux «c’est c*n, mais c’est comme ça ! ». En bref, je centre mon énergie et ma bande passante sur les sujets qui sont de mon ressort, pour lesquels j’ai autorité. Ce qui est logique, et pourtant… Car, prendre le risque de mettre mon énergie ailleurs, c’est se concentrer sur le négatif, se trouver dans une situation contre-productive qui se détériore plus que si je ne faisais rien. 

Procéder ainsi, c’est changer fondamentalement de posture. C’est passer d’une posture de victime à celle de créateur ; du triangle de Karpman au triangle créateur de valeurs. Je me centre sur ce que je peux changer, quitte à ce que je construise quelque chose d’entièrement nouveau en parallèle, qui remplacera à un moment ce qui existe, tel ce dirigeant frustré par l’environnement de son équipe de développeurs qui s’est enveloppée d’un manteau, agissants comme de simples exécutants avec un manque de professionnalisme. Après avoir pendant 1 an essayé de les changer, mis du temps et de l’argent, il a contourné l’obstacle, accepté cette réalité, et a décidé de développer en parallèle, une deuxième équipe « from scratch », avec un recrutement plus serré, et un cadre de travail optimal dès le départ.

Par ce changement de posture vis à vis de toute situation, je suis en mesure de me libérer de l’énergie, ne pas me résigner, mettre en place des mécanismes, des nudges ; me permettant l’émergence d’un nouvel environnement dans mon périmètre, d’un nouveau cadre qui va impacter nécessairement et indirectement les comportements. Je viens changer la donne et met l’organisation en mouvement dans la direction souhaitée, à travers mon périmètre. Par ce nouveau cadre, je m’offre l’opportunité de saisir où se trouve ma véritable création de valeur pour l’organisation, avec mes autorités. Serait-ce idéalement la meilleure façon de faire avancer l’organisation sur le sujet concerné ? Non, de toute évidence. Cependant, c’est la plus pragmatique et efficace, avec les moyens du bord.

Ce changement de perspective radical, difficile à appliquer, va permettre de faire baisser la frustration et de débloquer favorablement la situation, en sortant d’une posture, même si peut-être juste moralement, où il est facile de blâmer autrui. Un contexte et un cadre que le déploiement d’un management constitutionnel favorise au travers des rôles confiés à chacun avec des autorités et règles claires. Dès lors que j’occupe un rôle, je reçois des droits et devoirs explicites. J’ai désormais une autorité, dans laquelle je suis libre et peux avancer, tout en acceptant d’être suiveur sur les autres sujets. Sachant que tout cela est évolutif, pour être en mesure de suivre le changement, en adaptant, notamment, les autorités des rôles, clé de voûte de la création de valeur et d’une mise en mouvement pour tous.

 

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