C’est le nouvel homme fort du club Les Girondins de Bordeaux. L’entrepreneur Joe DaGrosa a été propulsé sous les feux de la rampe, fin 2018, suite au rachat de l’écurie bordelaise à son propriétaire historique, le groupe M6. A la tête de plusieurs fonds d’investissements outre-Atlantique, l’Américain nourrit de nombreuses ambitions pour le club. Objectif : renouer avec le Top 5 de la Ligue 1 et construire la marque « Les Girondins de Bordeaux » à l’international. Le businessman se fixe cinq à dix ans pour relever le pari. Interview.
Qui êtes-vous Joe DaGrosa ?
Joe DaGrosa : Je prends mes racines d’un père italien et d’une mère libanaise, et j’ai grandi non loin du Bronx à New York. Je suis un pur produit de « l’american dream » en ayant gravi les échelons de la réussite sociale à force de travail et de volonté. Je suis à la tête, ou co-dirige, plusieurs fonds d’investissements parmi lesquels : MapleWood Partners, 1848 Capital Partners, General American Capital Partners. Je suis également administrateur au sein de la compagnie aérienne Eastern Air Lines. Aujourd’hui, je suis ravi de pouvoir travailler au côté de mes fils.
Quel a été votre moteur pour investir dans le club des Girondins de Bordeaux ?
JdG : Aujourd’hui, le football est le sport au plus fort potentiel de développement. Sa popularité – déjà considérable – commence à toucher des nations qui n’avaient pas forcément de culture footballistique forte, à l’image des Etats-Unis et de la Chine. Aussi, lorsque mon compatriote Frank McCourt a fait l’acquisition de l’Olympique de Marseille en 2016, c’est toute la Ligue 1 qui a bénéficié d’une exposition médiatique aux Etats-Unis. De fait, nous avons étudié ce que nous pouvions faire en championnat européen prenant en considération la Liga, la Premier League et la Ligue 1. Assez rapidement, le club les Girondins de Bordeaux s’est imposé comme le meilleur choix : le club est ancré dans une ville historique mondialement connue, les supporters bordelais ont une relation passionnelle avec les Girondins et, surtout, M6 cherchait à tourner la page.
Sous l’ère M6, Bordeaux a perdu environ 10 millions d’euros chaque année. Comment se porte la trésorerie du club à l’orée de cette deuxième saison de gouvernance.
JdG : Nous avions conscience que nous continuerions à perdre de l’argent dès notre première année d’exercice et même au-delà. C’est un travail de longue haleine que d’assainir les finances d’un club de football. L’augmentation des droits TV et le développement de nos revenus à l’international sont les deux composantes de ce chantier, l’objectif étant de devenir moins dépendants de la vente des joueurs. Nous avons pris l’engagement vis-à-vis de la ville et des fans, de laisser le club en meilleure santé financière que celle trouvée en arrivant. Mais pas seulement, puisque nous remettrons Bordeaux sur la voie du succès sportif comme lors de ses années les plus fastes. L’an II ne fait que commencer et nous sentons une dynamique réelle à tous les étages.
Quelle configuration du vestiaire bordelais pour cet an II ?
JdG : Avant tout, il faut garder en tête que nous sommes dans un processus de reconstruction du collectif bordelais. Avant d’envisager la venue d’une star internationale de football, l’urgence réside dans la consolidation des positions. Durant le mercato estival, nous avons recruté six joueurs dont cinq défenseurs (Mexer, Koscielny, Benito, Bellanova et Kwateng) et un attaquant (Hwang). Dans le même temps, 17 joueurs ont quitté la club sous forme de transfert, de prêt, ou à échéance de leur contrat. Je vais m’attarder sur notre nouvelle recrue : l’arrivée de l’attaquant sud-coréen, Hwang Ui-jo, acte d’une nouvelle ère pour les Girondins qui vont à présent toucher l’Asie et susciter plus d’appétence là-bas.
La construction internationale de la marque « Les Girondins de Bordeaux » représente donc l’un des pivots de votre stratégie…
JdG : Complètement. Nos tournées estivales aux États-Unis ou en Asie participent à cette campagne de médiatisation du club. Là-bas, tout le monde connaît Bordeaux ! La richesse de son patrimoine, ses vignobles, son art de vivre, confèrent à la ville une aura internationale. Dans ce mix, les Girondins de Bordeaux ont une carte à jouer. Ainsi, nous comptons ouvrir des académies « Les Girondins de Bordeaux » en Chine avec la finalité de former des étoiles montantes du ballon rond pour les faire évoluer chez nous un jour. Toutefois, nous sommes réalistes : ce projet prendra du temps.
Que manque-t-il, selon vous, au football français pour devenir l’égal des clubs espagnols ou anglais en compétition de la Ligue des Champions ? Le PSG dispose des fonds et de joueurs parmi les plus talentueux et pourtant… le succès n’est pas au rendez-vous.
JdG : Le football est un sport collectif et aucun joueur – aussi surdoué soit-il – ne pourra porter sur ses seules épaules la réussite de son club. Certes, le PSG dispose de deux prodiges : Neymar et Mbappé, mais il faut a minima trois à quatre joueurs très talentueux à des postes clefs pour exceller. De plus, en France, les clubs sont souvent contraints de céder leurs pièces maîtresses pour combler leur déficit. Et où se retrouvent ces virtuoses ? En Angleterre, en Espagne ou en Allemagne… A mon sens, la Fédération Française de Football doit s’attaquer à ce réel problème. Il y a un équilibre à trouver.
Vous verra-t-on investir dans d’autres secteurs en France ?
JdG : Je me suis pris de passion pour les Girondins et pour la ville de Bordeaux, si bien que je leur consacre beaucoup plus de temps qu’à mes autres activités outre-Atlantique ! A présent, je commence à envisager l’opportunité d’investir dans l’immobilier bordelais, au même titre qu’il me paraît pertinent de renforcer mes investissements dans l’Hexagone. Le président Emmanuel Macron a installé un climat très positif ne pouvant que susciter l’intérêt de l’entrepreneur que je suis. Avec son plan « Choose France », j’ai envie d’aller plus loin dans l’exploration de votre magnifique pays.
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