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Ghislain Alexander, un «Tsar» à Paris

Raspoutine

Au 58 rue de Bassano, dans le 8e arrondissement de Paris, trône un club emblématique. Son ambiance feutrée, sa musique deep house et sa clientèle select font du Raspoutine l’un des lieux incontournables de la fête à Paris. Ce petit bout de Russie, fondé en 1965 par Hélène Martini, a conservé son aura d’antan, même après son acquisition en 2010 par Laurent de Gourcuff. Depuis 2014, l’entrepreneur Ghislain Alexander est l’un des trois associés du club. Portrait. 

 

Ghislain Alexander s’est retrouvé il y a vingt-quatre ans dans le monde de la nuit par pur hasard. C’est à Boulogne-Billancourt que tout commence en 1979, à la clinique du Belvédère où il est né. Le jeune Ghislain suit sa scolarité au lycée Lankanal de Sceaux avant d’en sortir bachelier. Tout juste inscrit en droit à l’université Jean Monnet de Sceaux, il veut pouvoir entrer en boîte comme ses amis. Et c’est grâce à l’une des serveuses du club qu’il devient un habitué. Au fur et à mesure, il y fait entrer ses amis et les amis de ses amis. La machine est alors lancée : il devient une véritable locomotive d’entrée en boîte.

En raison du nombre de personnes qu’il amène à ce club, le directeur artistique lui propose de devenir public relation de l’Aquarium, dans le 15e arrondissement, en parallèle de ses études.

« On avait imprimé des flyers avec mes initiales que je distribuais. Pour chaque flyer qui revenait, je touchais 10 francs, et comme j’avais plein de copains en école de commerce et dans d’autres facs, j’ai inondé les bureaux d’étudiants de toutes les universités que je connaissais et je reversais 5 francs à ceux qui s’occupaient des BDE !»

 

Ghislain Alexander

 

Titulaire d’une maîtrise de droit des affaires et d’un master en marketing de l’ISC, une école de commerce réputée, Ghislain entame une double vie professionnelle. Il devient directeur marketing chez ETC Pollak la semaine, et directeur d’un club, dont il change le nom en Madam, le week-end. Deux ans plus tard, la société financière pour laquelle il travaille est rachetée par un groupe anglais. Il quitte donc le monde du jour et se consacre exclusivement à celui de la nuit. S’ensuivent alors de nombreuses expériences professionnelles au sein d’établissements parisiens renommés comme le Fouquets ou l’Arc. Mais c’est en 2014 que Ghislain Alexander se lance dans le repreneuriat et s’associe à Laurent de Gourcuff pour redonner un nouveau souffle au Raspoutine. « Il était en perte de vitesse, il fallait redonner un coup de collier en gardant les codes. J’avais la volonté de développer cette marque qui est très forte. »

C’est au cœur du triangle d’or, dans l’atmosphère imaginée par l’artiste Erté, que le Tout-Paris se donne rendez-vous pour y faire la fête. Le club est l’un des rares de la capitale à réunir des clients de tous âges. Si le profil type reste tout de même le cadre ou chef d’entreprise de 45 ans de l’Ouest parisien, le Raspoutine attire aussi des clients plutôt aisés de 20 à 65 ans. « On a un microcosme de clients de l’Ouest parisien, plus âgé que dans les clubs que je connais, plus mature, avec le pouvoir d’achat qui va avec. Nous n’avons pas besoin de pousser les clients à la consommation, il y a une sélection naturelle à l’entrée. »

 

Développement international

Depuis quelques années, le Raspoutine s’exporte ! En 2016, le cabaret russe ouvre ses portes à l’hôtel Palazzo Dama de Rome et, plus récemment, à Los Angeles. La réussite internationale du Raspoutine tient à trois aspects fondamentaux. Le premier est évidemment la décoration qui est son empreinte. C’est Hélène Martini, la fondatrice du Raspoutine, qui avait demandé à l’artiste Erté, l’un de ses plus chers amis, d’en dessiner les décors en s’inspirant de ses fantasmes débordants et de ses origines russes. « La décoration est très poussée dans cet endroit, c’est très riche en fournitures, en dorures et en boiseries, donc pour répliquer un Raspoutine, il faut du talent. »

Le deuxième aspect est l’ADN musical du club. Il faut s’attacher aux codes du Raspoutine, très deep house. Il s’agit donc de trouver les bons DJ. Le dernier pilier et non des moindres, c’est l’aspect social du club. Dans chaque ville, Ghislain doit relever le défi de trouver les bonnes personnes et les bons réseaux. C’est primordial pour garder l’image de marque de l’établissement. Et même quand il ne connaît pas la ville, celui qu’on surnomme « le tsar » peut compter sur les clients internationaux qui fréquentent le club pendant les événements mondains pour recruter les bons profils. « C’est un petit monde qu’on retrouve lors des fashion weeks. Nous avons la chance d’avoir plein de gens de New York, de Londres, de Miami qui viennent au club pendant les événements mondains, donc au fur et à mesure, nous avons créé un réseaux qui nous sert quand on s’installe à l’étranger. »

 

Des investissements qui se diversifient

Pour Ghislain comme pour des milliers de restaurateurs et de gérants de club, la pandémie a été lourde de conséquences. Mais pour l’entrepreneur de 42 ans, l’État a su jouer son rôle providentiel. « Tout était à l’arrêt. J’en ai profité comme plein de gens pour faire autre chose, mais ça a été long et difficile moralement. On a dû mettre des projets en suspens, il y avait un grand point d’interrogation sur plein de choses, mais heureusement, l’État a fait son “job” et nous a permis de patienter. »

En plus de développer le Raspoutine à l’international, Ghislain a investi dans le monde du divertissement. Depuis 2015, celui qui a choisi d’intervertir l’ordre de ses nom et prénom pour devenir Alexander Ghislain, est à la tête de Ginger, un restaurant asiatique qui propose des plats thaï dans un cadre contemporain chic au cœur de Paris. Il s’est également associé à une famille de vignerons pour créer une vodka à base de raisin de champagne. Et depuis quelques années, il permet à la jeunesse parisienne de faire la fête au Boum Boum, une boîte de nuit parisienne qui lui appartient.

L’avenir du Raspoutine ? Ghislain Alexander l’imagine grandiose ! En 2022, le club classé Monument historique ouvrira des succursales à trois nouvelles adresses, à Miami, Dubaï et Saint- Tropez, qui s’ajouteront à celles de Paris, Rome et Los Angeles. Il s’est fixé l’objectif d’atteindre 15 établissements dans les grandes villes du monde. Il veut ouvrir deux Raspoutine par an, peu importe que ce soit sous forme de clubs, de restaurants ou même d’hôtels. L’entrepreneur de la nuit ne se ferme aucune porte.

 

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