La théorie du premier suiveur est très bien illustrée à travers une célèbre vidéo de Derek Sivers. Des personnes sont assises dans un parc quand soudain, un homme seul se lève pour danser au milieu de la foule. Une première personne le rejoint et transforme ce danseur atypique et étrange en un précurseur de mouvement. Ce n’est pas celui qui danse en premier qui lance un mouvement… c’est celui qui ose le suivre.
Avec la contribution de Solène Julier, Laura Vittiglio et Oumaima El Mansouri d’Eurogroup Consulting
Entrez dans la danse
Le premier suiveur marque alors un tournant dans la dynamique de la scène. Les personnes assises se lèvent toutes progressivement pour aller rejoindre le groupe qui danse. Elles ne risquent plus de se faire remarquer et d’être ridicules aux yeux des autres : elles font partie de la foule contrairement à ceux qui restent assis et se font remarquer par leur passivité. Ceux qui ne rejoignent pas le groupe sont désormais ceux qui sont marginalisés. Le premier suiveur, par sa conviction, son envie et sa capacité d’influence devient le premier allié de l’instigateur (de l’innovateur). La proposition devient une réalité et la dynamique est lancée. Cette étape de lancement est primordiale dans toutes les actions collectives.
Favoriser l’émergence des premiers suiveurs en entreprise
L’émergence de suiveurs s’appuie sur trois composantes clés : des caractéristiques intrinsèques à l’instigateur d’un changement, des caractéristiques intrinsèques au suiveur et un contexte d’entreprise favorable. L’instigateur ne choisit pas son premier suiveur mais doit savoir l’attirer à lui. C’est parce que le premier suiveur perçoit le bénéfice de ce que porte l’instigateur qu’il est encouragé à suivre et diffuser autour de lui son avis positif. L’instigateur d’un changement doit en témoigner des bénéfices, être convaincant et motivant, tout en inspirant la confiance. Mais il doit avant tout apprendre à reconnaitre son premier suiveur.
On pourrait ainsi dire que ce premier suiveur appartient à la catégorie des Early Adopters, c’est-à-dire ceux qui choisissent d’adopter une nouvelle technologie, un produit, ou une idée dès son introduction sur le marché, bien avant que la majorité ne l’ait fait. D’après la théorie de l’adoption de l’innovation de Rogers, les Early Adopters représentent 13 à 14% des membres de la société et sont un levier clé dans l’adoption de l’innovation dans la mesure où ils permettent de faire passer un produit d’un marché de niche à un marché de masse.
Détecter les premiers suiveurs
Le premier suiveur est engagé. Il choisit de s’impliquer consciemment dans la dynamique proposée par l’instigateur. Il manifeste du courage, celui de passer à l’action alors que personne ne le fait. Dans la même idée c’est une personne d’action et qui s’essaye en se confrontant à la réalité. Il fait preuve d’agentivité. Cela signifie qu’il a une capacité à influencer le cours de l’action pour lui et les autres dans un système qui propose l’action. Il joue un rôle d’agent actif qui répond aux sollicitations du collectif tout en incarnant la dynamique de ce même collectif. Pour cela il a une capacité d’entrainement de par sa légitimité technique, institutionnelle et/ou relationnelle.
Valoriser les premiers suiveurs
L’instigateur doit adopter une posture subtile vis-à-vis du premier suiveur : l’embarquer dans le mouvement sans qu’il prenne le lead et l’inclure en tant que co-acteur, sans rapport de hiérarchie, afin de former un binôme. Ce positionnement sans hiérarchie permet d’encourager les autres membres à rejoindre le mouvement dans une dynamique collective et émergente. En mettant en avant le rôle de « co-acteur » avec le premier suiveur, l’instigateur facilite un climat de soutien et de participation volontaire. Cependant, une fois le collectif embarqué, le rôle de leader de l’instigateur devient à nouveau nécessaire pour structurer et orienter le mouvement. Pour valoriser le premier suiveur, l’instigateur traite donc le premier suiveur comme un co-acteur, lui apporte de la reconnaissance et l’encourage dans son rôle.
Viraliser le changement avec les premiers suiveurs
En acceptant la vision de l’instigateur, le premier suiveur lui apporte de la légitimité et de la crédibilité. Il transforme l’initiateur en leader, dans la mesure où sans followers, il n’y a pas de leadership. Ce premier soutien permet d’attirer les autres suiveurs, créant un effet domino. Les deux personnes ont donc une relation interdépendante : chacun renforce la position de l’autre. Le binôme cristallise un possible du changement avec deux images complémentaires. L’instigateur propose une cible et le premier suiveur un chemin, une manière de rentrer dans la dynamique collective. L’effet domino attendu permet d’embarquer une majorité de personnes dans les projets de changement et ainsi construire une vision. Un séminaire très connu en leadership s’intitule « leadership/followship » afin de sensibiliser les personnes en responsabilité qu’elles peuvent (et doivent) être, en fonction des situations en mode leader ou follower. Il n’y pas d’un côté des investigateurs et de l’autre des suiveurs mais des situations avec des dynamiques au cours desquelles les participants prennent un rôle actif en fonction de leur aspiration et capacité du moment. Le leadership serait alors un mode d’action collectif et non plus seulement individuel. Moins de super héros et plus de duos ou petits groupes d’action.
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