La promesse du réseau social professionnel Facebook Workplace est d’améliorer la productivité en fluidifiant la communication. Comment ? Retours d’expérience de ceux qui l’ont adopté.
Si nous n’utilisons quasiment plus l’email pour communiquer avec nos amis dans notre vie personnelle, pourquoi cela devrait-il être différent dans notre vie professionnelle ? C’est l’idée de Facebook Workplace, le Facebook version pro, lancé le 10 octobre. Une plateforme collaborative destinée à connecter tous les employés et les aider à mieux communiquer. Ses trois grandes forces : un design pensé pour le mobile, un service tout-en-un, et la reprise de tous les codes du réseau social numéro un dans le monde.
Parmi les 1000 premières entreprises à l’avoir adopté, plusieurs grands noms français : Renault Retail Group, Danone, la direction relations abonnés d’Iliad-Free (5.000 comptes créés, 77% des collaborateurs), Century 21, SNCF Gare & Connexions (60% des agents ont créé un compte), ou encore Club Med (13.000 comptes).
A mort l’email
Selon une étude réalisée pour Facebook auprès de 200 entreprises, seuls 15% des dirigeants sont satisfaits de la façon dont leurs équipes collaborent. En ligne de mire notamment, l’email, accusé de tous les maux. Chronophage, générateur de stress, inefficient… D’où le succès de messageries comme Slack.
La start-up Teads, qui a déployé Workplace auprès de ses 500 salariés dans 21 pays, n’utilise ainsi presque plus le mail. « Workplace est devenu notre principal outil de communication interne. Le ton est beaucoup plus sympathique. Nous utilisons aussi beaucoup moins le téléphone », explique à Forbes Laurent Binard, cofondateur et DRH de la société.
« Le mail est ringardisé, considère Angélique Gérard, directrice des relations abonnés d’Iliad-Free. Workplace n’est pas seulement un réseau social d’entreprise, c’est l’outil unifié parfait pour le remplacer. Avant je recevais 1200 mails par jour. Grâce à la messagerie instantanée, j’ai réduit ce nombre de moitié. Nous communiquons aussi beaucoup par GIF : un bouchon de champagne qui saute pour féliciter un salarié, cela crée de l’émotion en plus d’être plus rapide. »
Rapprocher les collaborateurs
L’idée du réseau social d’entreprise, c’est de fluidifier la communication, pour augmenter la productivité. C’est aussi un moyen de connecter des salariés qui ne se seraient jamais parlé autrement. Par exemple, « un stagiaire et le directeur général ». « C’est une voix pour chacun dans l’entreprise », explique à Fortune Nicola Mendelsohn, vice-président de Facebook Europe. Un peu comme s’il n’y avait plus qu’une seule machine à café où tout le monde pourrait prendre part aux conversations.
« Tout le monde utilise Workplace, à tous les niveaux, y compris le comité exécutif », se félicite Francisco Camacho, Directeur Général Eaux chez Danone et membre du comité exécutif.
Idem chez Iliad-Free, ce qui permet « d’avoir des remontées d’informations beaucoup plus rapides pour nos activités de support » et, plus inattendu, de détecter des talents. « Au centre de contacts, nous avons des gens surqualifiés. Nous en avons identifiés certains qui se sont distingués sur le réseau social. Nous allons également créer un prix spécial du meilleur contributeur sur Workplace. » L’outil a par ailleurs énormément servi à développer la cohésion. Des groupes s’étant créés par centres d’intérêts, Workplace a permis de faire émerger des initiatives, comme une sortie running un jour par semaine, et l’exposition dans les locaux d’œuvres artistiques réalisées par des collaborateurs.
Le « one stop shop » du réseau social d’entreprise
Avec Workplace, Facebook a réussi à fournir un seul outil pour le tchat, le partage de documents, les vidéos, les lives, les photos, la messagerie instantanée, les groupes (publics ou privés), et les appels voix. L’équivalent, chez Microsoft, ce serait One Drive + Sharepoint (créer un site d’équipe) + Yammer (réseau social privé) + Outlook + Skype + le futur service Microsoft Teams (un concurrent de Slack). On pourrait même rajouter LinkedIn. Ne manque à Facebook que la suite bureautique.
Teads, qui utilisait Yammer avant Workplace, a vu la différence. « 94% de nos salariés se connectent tous les jours », affirme Laurent Binard. Un pourcentage bien plus élevé qu’avec Yammer.
Un accès partout, tout le temps, pour tous
Ce que Microsoft n’a pas non plus, c’est l’aspect « mobile first« . Workplace, comme Facebook, se décline en application mobile. Chez Danone, à terme les 100.000 salariés seront connectés, dont la moitié en mobilité. A la direction des relations abonnés d’Iliad, Workplace connecte 850 techniciens itinérants.
Chez Teads, ce sont les commerciaux, souvent en clientèle, qui utilisent le plus le réseau social. « Ils prennent un selfie chez le client, ils partagent leurs bonnes pratiques… », précise Laurent Binard.
« Les générations Y et Z ne fonctionnent qu’avec les tablettes et les smartphones. Cela permet de les capter et de les fidéliser », ajoute Angélique Gérard. « Pour nous c’est moderne, mais pour les jeunes c’est juste normal. »
Pas besoin de former les utilisateurs
Les utilisateurs étant tous familiers de l’ergonomie de Facebook — 31 millions d’utilisateurs actifs par mois en France –, tout le monde se met à Workplace facilement et sans formation. On retrouve le flux d’actualités, les groupes, la messagerie instantanée, le moteur de recherche, les événements, etc.
« Nous l’avons lancé un vendredi, se souvient Angélique Gérard. A la fin du week-end, 3000 comptes étaient activés », soit près de la moitié des collaborateurs.
Economie de temps et d’argent, donc, mais aussi moteur d’évolution des pratiques. En effet, si Facebook a profondément changé la façon de communiquer des internautes, pourquoi ne pourrait-il pas le faire aussi dans l’entreprise ?
Comment mesurer l’augmentation de la productivité ?
Workplace coûte entre 1 dollar par mois et par utilisateur pour plus de 10 000 utilisateurs actifs, et trois dollars par mois jusqu’à 1000 utilisateurs. Mais le retour sur investissement est difficilement quantifiable, nous expliquent les entreprises que nous avons interrogées.
D’autant qu’une partie du retour sur investissement est indirect. Il s’agit notamment de chouchouter les « millenials« , et d’améliorer l’engagement des salariés. « Il faut que nous nous adaptions aux usages des nouvelles générations. L’enthousiasme avec lequel nos salariés utilisent ce nouvel outil est le meilleur indicateur », estime Francisco Camacho chez Danone. Teads évoque aussi « le sentiment d’appartenance » que le réseau développe, « même dans les petits bureaux en phase d’ouverture » là où la société s’implante.
A réserver à certaines cultures d’entreprise
L’outil, s’il suscite beaucoup d’enthousiasme, n’est sans doute pas adapté, cependant, à toutes les entreprises. Ce n’est pas tant la taille qui compte, que la culture d’entreprise.
Il faut que la direction générale soit consciente que c’est un outil qu’il faut « faire vivre » et dans lequel « il faut qu’elle s’implique, si on veut que ça marche », insiste Angélique Gérard. La dirigeante, qui confie y consacrer une heure par jour, poste par exemple tous les dimanches soir « une citation qui va accompagner la semaine », commentée et discutée. Et en 2017, elle compte mettre en place une session d’une heure de questions-réponses avec les salariés, tous les vendredis mais cette fois en live, permettant de regrouper des collaborateurs de différentes entités.
Pour Francisco Camacho, Workplace convient à « toutes les entreprises pour lesquelles l’ouverture est importante, et qui veulent que l’information circule vite et bien. » Même conseil de la part de Teads : cela s’adresse à « des entreprises qui ont une culture ouverte. Il faut aussi apprécier de s’affranchir des niveaux hiérarchiques ».
Peut-être que ce qui manque à Workplace, finalement, c’est justement une intégration avec le mail. Au lieu de vouloir le tuer, ce qui pour l’instant n’est pas envisageable dans la mesure où c’est le principal outil pour communiquer avec l’extérieur, la prochaine étape pourrait être de l’améliorer et de permettre aux utilisateurs de pouvoir vraiment rester dans une seule interface, tout le temps.
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