Dans nos sociétés caractérisées par une compétition toujours plus exacerbée, l’adversité a trop souvent tendance à s’imposer comme le mode par défaut de nos relations avec les autres.
Nous n’en sortons pas indemnes, car l’idée que nous nous faisons de notre valeur et la confiance en nos capacités s’en trouvent souvent altérées.
C’est, par exemple, le cas dans le cadre d’une recherche d’emploi, où un candidat se trouve évalué et comparé… pour être le plus souvent « remercié » au terme du processus. Dans le temps, de tels évènements modifient la perception que l’on a de soi et peuvent inhiber parfois fortement face aux situations professionnelles ou personnelles rencontrées. Comment retrouver alors la force d’oser ?
Le premier secret du succès
« Le secret de l’action… c’est de s’y mettre », écrivait le philosophe Alain.
Derrière cette boutade pointe une question centrale : qu’est-ce qui va déclencher l’action ? Cette étincelle, c’est la confiance en soi, « le premier secret du succès » pour le philosophe américain Ralph Waldo Emerson qui a d’ailleurs consacré un essai à cette notion. Mais cette confiance en soi n’est pas la simple affirmation de soi, ce que Freud nommait le « narcissisme primaire », à savoir cette tendance chez l’enfant à se concevoir comme le centre du monde et qu’on retrouve parfois encore à l’état presque intact chez certains dirigeants…
Elle n’est pas non plus l’estime de soi, qui repose sur le sentiment de sa propre valeur et s’enracine dans un ensemble d’expériences : l’évaluation permanente de notre influence et désirabilité sociale, de nos actions, de nos succès et de nos échecs. La confiance en soi repose quant à elle sur la perception de ses propres capacités. Chez un sujet, le manque de confiance en soi naît de l’écart de perception entre ses propres capacités, jugées insuffisantes, et celles, souvent surévaluées d’ailleurs, que nécessitent les situations rencontrées. C’est ce décalage, doublement fantasmé, qui nous fait dire parfois que nous ne sommes pas « à la hauteur » des évènements. Mais la lecture d’Epictète nous apprend que tout est ici question de perception. « Ce ne sont pas les choses elles-mêmes qui nous troublent, mais l’opinion que nous nous en faisons ».
Cercle vicieux
Comment alors se rassurer et être en mesure d’affronter les situations que la vie pose devant nous ?
La pensée positive, qui consiste à s’auto-persuader qu’« on peut réussir quoi qu’il arrive » ou qu’« on va y arriver », n’a que peu d’effet. Pour Joanne Wood, professeure de psychologie à l’Université de Waterloo dans l’Ontario, se répéter de tels messages aurait même un effet contre-productif, accentuant encore le manque de confiance que nous mettons en nous. Le sujet doit en effet être convaincu par ces messages s’il veut espérer un quelconque changement dans le bon sens. Or il est difficile d’adhérer à des messages aussi radicalement en contradiction avec son expérience intime, son vécu émotionnel. L’autosuggestion semble ne fonctionner que pour les convaincus.
Alors, plutôt que d’oser le plongeon dans le grand bain à grand renfort de méthode Coué, c’est la stratégie des petits pas qu’il faut adopter pour rompre le cercle vicieux du manque de confiance en soi. Cercle vicieux, car nous sommes bien ici en présence d’une boucle interactionnelle, où la cause agit sur l’effet qui rétroagit sur la cause. Plus je doute de mes capacités et moins j’ose ; moins j’ose et plus je doute de mes capacités… Celui qui doute de ses capacités a en effet naturellement tendance à éviter les situations qui font problème ; il vit alors un soulagement momentané, mais aussi un échec personnel.
Cet échec ne peut que dégrader encore davantage la confiance du sujet en ses propres capacités.
Courage d’exister
La stratégie des petits pas nous invite prudemment à nous confronter à l’obstacle, sans nous laisser obséder et tétaniser par lui, car « la trop grande contemplation des obstacles engendre la faiblesse » (Emerson).
Ne pas contempler de loin et se laisser impressionner, mais se rapprocher et affronter. C’est ici que prend sens cette célèbre citation de Sénèque, reprise dans nombre de séminaires en développement personnel et de livres de management : « ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles ». Il faut poser une action, même modeste, dans le sens de l’objectif que je veux atteindre. Un pas après l’autre. Comme ces petites rivières qui forment les grands fleuves, c’est par la multiplication de ces « micro-actions » que lentement peut s’affirmer la confiance en soi. C’est le franchissement de l’obstacle qui nous permet de nous délivrer de nos peurs et de nos illusions, de dépasser nos limites pour accéder enfin au « courage d’exister ».
Courage qui n’est rien d’autre en définitive que l’indépendance d’esprit, lucide et assumée.
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits