On connait bien la citation d’Einstein « Si j’avais une heure pour résoudre un problème dont ma vie dépend, je passerai 55 minutes à reformuler le problème et seulement 5 minutes à chercher des solutions. »
Oui, mais qui parmi nous a véritablement appris à reformuler une problématique de manière efficace et pertinente pour en faciliter la résolution ?
Voici trois pistes très concrètes…
#1 : Intéressons-nous aux besoins et non pas aux causes !
Généralement, dans les démarches classiques de résolution de problèmes, on met l’accent sur la recherche des causes… En effet, Descartes, via notre éducation, nous a appris qu’un problème avait une ou plusieurs causes et qu’en agissant sur les causes, on réglait a priori le problème…
Si l’on met l’accent sur les causes, on risque ici de reconstruire un pont à l’identique. Si l’on met l’accent sur les besoins des parties-prenantes concernées, on va se poser la question de l’intérêt du pont.
De manière assez intuitive, lorsque la problématique n’est pas très complexe, on se pose la question de l’utilité pour les parties prenantes. Par contre, lorsque la problématique est beaucoup plus complexe, et que le nombre de parties prenantes devient très important, on recherche généralement les causes.
Il est beaucoup plus efficace d’identifier et d’analyser les besoins de l’ensemble des parties prenantes, en s’efforçant d’être véritablement empathique (et non pas dans le jugement ou dans la projection de ses propres besoins) et de chercher à y répondre. Les causes seront prises en comptes mais abordées sous un autre angle. Les riverains ont besoin que le pont soit solide et sécurisé, donc la question de sa structure et de sa longévité sera forcement intégrée.
#2 : Abusons de la visualisation ! Elle nous aidera à lutter contre nos biais cognitifs lors de la reformulation
Concrètement, comment faire pour analyser une quantité importante d’information recueillie, de surcroît qualitative et non pas quantitative?
Le risque est de faire malencontreusement appel à nos biais cognitifs qui nous feront inévitablement faire des erreurs d’analyse. En effet, et bien malgré nous, nous accordons toujours beaucoup plus d’importance à ce qui nous apparaît important… C’est ce qu’on appelle le biais de confirmation.
Il est alors très pertinent de s’appuyer sur la visualisation. On écrit tout sur des supports communs que l’on affiche sur les murs : post-its, verbatim, photos, schémas, etc. On s’efforce de mettre la forme au service du fond pour y voir plus clair, pour voir apparaître de manière visuelle et donc beaucoup plus évidente les dominateurs communs, les tensions, les enjeux, les besoins contradictoires à concilier. L’analyse devient visible et la reformulation apparaît peu à peu de manière quasiment « magique ».
La problématique à résoudre prend alors la forme de « Comment faire pour concilier A, B, C…? » ou « Comment faire A en tenant compte de B et C…? » A, B et C étant par nature en tensions (sinon, il n’y aurait pas de problématique…).
Prise de conscience #3 : Luttons contre les compromis, remplaçons-les par l’exigence !
Lorsque nous sommes face à des tensions qui nous paraissent inconciliables, nous avons tendance à accepter des compromis qui sont, pas nature, insatisfaisants.
Peut-être parce que nous avons grandi dans un monde dans lequel nous avons appris qu’être adulte, c’était être réaliste, et qu’être réaliste, c’était accepter le fait que nous ne pouvions pas tout avoir… C’est parfois vrai et parfois ça ne l’est pas… Ce n’est pas si simple que ça. Nous avons appris, de manière assez binaire, la compromission, voire la résignation plutôt que l’exigence et la créativité.
Rappelons-vous cette citation de Mark Twain : « Il ne savait pas que c’était impossible alors ils l’ont fait. »
Philippe Croizon qui a traversé, sans bras ni jambe la manche à la nage en est un bel exemple. Sa problématique était « Comment faire pour traverser la manche à la nage lorsqu’on est handicapé ? »
Tout comme Hellen Keller devenue aveugle et muette à un an et demi et qui, grâce à sa professeure Anne Sullivan, qui ne s’est jamais résignée, est devenue la première personne handicapée à avoir obtenu un diplôme universitaire. Elle a écrit de nombreux livres, a fait campagne pour le droit des femmes, les droits relatifs au travail, le socialisme, l’antimilitarisme et d’autres causes similaires.
Pour Anne Sullivan, la problématique était « Comment faire pour amener cette enfant « sauvage », avec laquelle il était alors impossible de communiquer, à développer ses capacités cognitives ? ». Le livre Alabama, ainsi que le film qui en a été tiré, sont passionnants et montrent comment Anne Sullivan a su, avec détermination, exigence, créativité et apprentissage de ses expérimentations, communiquer avec Hellen et l’éduquer alors que tout son entourage pensait que c’était vain.
Donc osons formuler des problématiques sous la forme de tensions à priori inconciliables! C’est leur donner toute leur chance d’être résolues!
Pour résumer, le cheminement à adopter pour reformuler de manière efficace et pertinente la problématique est donc :
- Dans un premier temps, identifier sans jugement et sans projection, mais avec une extrême empathie, les besoins des différentes parties-prenantes concernées par la problématique
- Dans un second temps, s’aider de la visualisation pour identifier les véritables enjeux sous-jacents et en faciliter l’analyse
- Dans un troisième temps, reformuler la problématique avec exigence, sans jamais se soucier de la faisabilité de la question formulée
Ensuite, il sera possible d’imaginer des solutions innovantes puis de les développer avec humilité, détermination et exigence, en procédant par tests pour en tirer des enseignements constructifs.
C’est la manière dont les designers travaillent… C’est une illustration de ce qu’on appelle « l’esprit design » ou le « design thinking ».
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