L’entreprise qui veut accélérer son développement va se mettre à l’Open Innovation. Selon la stratégie choisie, il faudra alors mettre en place une plateforme d’innovation : mais laquelle choisir ? Quels sont les apports de chaque type de plateforme ?
Passage en revue des 3 principales familles de plateformes d’Open Innovation :
Le SMI
Le Système de Management des Idées : c’est un système -la plupart du temps une plateforme web en SaaS(1)– permettant de capter et de traiter les idées d’une communauté d’apporteurs d’idées ; cette communauté est généralement constituée des salariés de l’entreprise, mais elle peut être étendue à l’écosystème de l’entreprise (partenaires, fournisseurs) et aux clients finaux (utilisateurs, grand public).
Concrètement, l’utilisation d’un SMI est recommandée lorsque vous mettez en place un processus de management de l’innovation qui s’étend au-delà de votre R&D classique. Attention toutefois à l’importance que vous donnez à la confidentialité des idées car la plupart de ces solutions proposent l’affichage et le partage des idées auprès de tous ceux qui se connectent…
Fonctionnalités
- Dépôt d’idées, en général visibles par toute la communauté.
- Votes, commentaires et enrichissements par la communauté.
- Plateforme publique (réseau social) ou plateforme privée d’entreprise (réseau social d’entreprise).
- Processus de validation pour certaines solutions (processus de Go/NoGo en projets R&D)
- Enrichissement possible des propositions en mode collaboratif et en études (étude de marché, maturité TRL,…).
Avantages & Inconvénients
+ Motivation d’une partie des créatifs : les plus ouverts et les plus confiants.
+ Vitesse : le cycle de maturation est réduit (passage rapide en mode projet R&D, s’intégrant bien avec le processus mis en place).
+ Participe à la Culture d’innovation dans l’entreprise.
– Attention à la confidentialité ! Si les idées ont une certaine valeur pour vous, choisir une plateforme qui les publie à une population -même interne- de plus de 100 collaborateurs, il sera illusoire de vouloir conserver le secret.
– Désintérêt d’une partie des créatifs : ceux qui ont peur d’être jugés, de ne pas avoir de bonnes idées, de vouloir les garder pour eux,… (le total représente environ 50% du volume d’idées).
– Peu de chance de transformation en innovation si l’outil est utilisé seul (pas de créativité experte, ni de travail créatif collectif de haut niveau ou d’accompagnement des apporteurs d’idées).
– Nécessite un budget significatif et permanent d’entretien de la communauté (Community Management, licences) et des ressources dédiées à forte valeur ajoutée pour l’identification, la sélection et la maturation en projets R&D.
Le Crowdsolving
Issue de la famille du Crowdsourcing (également appelée myriadisation des tâches, son équivalent économique est plus connu sous le nom d’Uberisation), cette technique d’Open Innovation consiste à faire appel à une foule d’individus externes pour innover, grâce à l’intermédiation d’une plateforme. Cette famille d’Open Innovation se présente sous la forme d’une plateforme de résolution, basée sur la publication d’un problème auquel une foule de « solutionneurs » tentent chacun d’apporter une réponse.
La plupart du temps, il s’agit de problèmes concrets (dits problèmes fermés), dont la cause est généralement connue, le périmètre très bien identifié, mais pour lesquelles les solutions habituelles -historiques- ne fonctionnent pas ou plus. Concrètement, c’est souvent parce que les compétences en interne ne sont pas suffisamment diversifiées pour permettre d’imaginer des solutions très différentes, disruptives.
Fonctionnalités
- Challenge avec prix forfaitaire.
- Dépôt des propositions visibles ou confidentielles selon la plateforme (en règle générale, les plateformes de design et de marketing affichent les propositions et celles de R&D technique les masquent).
- Importance du temps passé par les contributeurs (cela peut aller jusqu’à plusieurs semaines de travail à temps plein !).
- Communauté importante et diversifiée.
- Plateforme accessible au grand public en général, parfois limitée aux salariés lorsque l’organisation est suffisamment grande.
- Ressources et processus nécessaires en aval (études et validation des propositions).
Avantages & Inconvénients
+ Grande richesse de propositions pour la partie design (logo, charte, univers graphique,…)
+ La communauté qui participe est généralement importante (plusieurs milliers de personnes) et cela amène la diversité recherchées des idées proposées.
+ Production à coût marginal proche de zéro (comptez toutefois un budget de prestation de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de milliers d’euros, sans compter votre équipe projet).
+ Flexibilité de la demande, du champ de compétences et d’intervention, du calendrier,…
+ Confidentialité des idées (pour les plateformes qui le proposent).
– Solutions peu créatives pour les problèmes R&D techniques ou business : il n’y a pas de rebonds au sein de la communauté ni de partage entre experts contributeurs, pas d’outils ou d’accompagnement pour aider les apporteurs à enrichir ou à transformer leurs idées.
– Dangereuse à terme : non seulement cette méthode désengage les collaborateurs qui ne participent pas (tout en leur enlevant une activité au passage), mais elle peut également jouer sur l’image désastreuse que l’exploitation de milliers de personnes pour une seule récompensée -et mal rémunérée soit dit en passant- va avoir sur l’attractivité de l’entreprise auprès de ses clients, surtout si l’entreprise est en B2C(2).
– Cette famille d’Open Innovation demande en outre des ressources conséquentes en aval afin de lire les propositions, de les analyser, les valider, éventuellement les améliorer…
Les connecteurs
Les « Connecteurs » sont des prestataires d’Open Innovation qui proposent des fonctions de recherche et de mise en relation entre un demandeur d’innovation et un répondant qualifié. La solution proposée est généralement basée sur une plateforme web avec des filtres et/ou des algorithmes permettant d’identifier les répondants qualifiés, avant de les contacter pour leur proposer un contrat avec le demandeur.
Le modèle économique de ces plateformes varient entre payer une licence d’utilisation et percevoir un variable sur le contrat conclu entre les parties.
Une méthode très utile pour l’entreprise qui ne veut pas complètement « ouvrir » son processus d’Open Innovation mais à qui il manque tout de même de fortes compétences pour avancer dans sa stratégie.
Fonctionnalités
- Contrôle et rapidité de l’accès à de nouvelles ressources R&D.
- Protection de la Propriété Intellectuelle à venir par contractualisation, avec l’aide du tiers de confiance (la plateforme).
- Champ de recherche étendu pour certains entre brevets et personnes physiques (experts, universitaires, chercheurs, indépendants,…).
- La recherche peut être sous-traitée auprès du prestataire de la plateforme ou être utilisée directement via un moteur de recherche multi-critères.
- Les mises en contact peuvent être manuelles, semi-automatisées ou automatisées.
- Possibilité d’obtenir des propositions comparées (tarifs des experts, réponse à cahier des charges).
- Modalités de contractualisation ouvertes post-contact (sous-traitance, consortium,…).
Avantages & Inconvénients
+ Permet d’obtenir rapidement des sources de solutions potentielles à son problème.
+ Solution très économique ! (pour cette phase du projet tout du moins)
+ Permet d’ouvrir rapidement et efficacement le champ de la recherche et de la créativité à de nombreux experts potentiels, là où l’entreprise s’adresse habituellement aux seuls prestataires de son territoire ou de ses fournisseurs historiques.
+ En règle générale, il y a une grande flexibilité du lien contractuel qui sera mis en place avec le répondant qualifié.
+ Confidentialité des idées.
– Recherche de brevets : c’est une solution finalement assez peu créative ! Les brevets proposés peuvent ne pas répondre convenablement au problème, à l’industrialisation, à ses moyens de commercialisation et globalement à la stratégie de l’entreprise.
– Recherche d’experts : aucune garantie n’est fournie quant à la pertinence de la solution qu’il proposera à posteriori.
– Pas d’implication ni d’engagement des collaborateurs et des clients : l’écosystème de l’entreprise est négligé.
– Risque sur la Propriété Intellectuelle : à partir d’une « connexion » entre une entreprise et un porteur de brevet ou un chercheur/expert, toutes les négociations restent à faire en ce qui concerne l’analyse de l’état de l’art, la maturité de la solution, sa valorisation, son mode de commercialisation ou d’industrialisation, et en conséquence le modèle de revenus. Si c’est un point positif pour donner de la flexibilité, cela peut également déboucher sur de longues tractations pour se terminer par un échec, et le temps perdu associé.
– Hétérogénéité dans l’efficacité de ces solutions : certains annoncent des algorithmes big data, d’autres des partenariats avec des bases de données,… La « technologie » mise en avant par le prestataire doit faire l’objet d’une vérification préalable.
(1) Software as a Service ou Logiciel qui rend un service depuis des serveurs externalisés et distants.
(2) Business to Consumer : c’est la relation commerciale d’une entreprise qui vend ses produits à des personnes physiques.
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