La saison 2 de la série Bref, sortie en 2025, met en scène un antihéros souffrant de troubles dépressifs. Elle souligne la complexité des relations interpersonnelles et invite notamment à se questionner sur son rapport au travail.
Une contribution de Ludivine Adla, maître de conférences HDR à l’Université Grenoble Alpes, enseignante à Grenoble IAE-INP et chercheur au laboratoire CERAG, et Virginie Roquelaure, professeur à l’Université Jean Moulin Lyon 3, enseignante à l’iaelyon school of management et chercheur au laboratoire Magellan
La nouvelle saison de Bref, créée par Kyan Khojandi, met en lumière la prise de conscience progressive du mal-être professionnel du personnage principal, qui s’auto-sabote en permanence.
« J’avais une réunion. Enfin, j’aurais dû y aller. Mais j’ai oublié. Enfin, j’ai fait semblant d’oublier. Bref, j’ai tout foiré. »
L’auto-sabotage est un moyen inconscient de confirmer ses croyances négatives sur soi-même, renforçant ainsi un cercle vicieux d’échec et de culpabilité (Ferrari, 2010). Il se manifeste, en autres, par de la procrastination permanente, du perfectionnisme excessif, ou encore de la dévalorisation constante. Il ne constitue pas un problème de motivation en soi, mais correspond en réalité à un mécanisme psychologique de protection.
Dans la série Bref, le personnage principal doit faire face à un travail qui lui procure de l’angoisse et l’ennuie profondément. Il adopte alors une stratégie paradoxale en sapant ses propres efforts, sans même se laisser une chance de réussir. En agissant ainsi, il a le sentiment de garder le contrôle sur la situation en évitant à tout prix d’échouer. Ce mécanisme de défense lui permet de ne pas affronter ses véritables angoisses. Son auto-sabotage devient alors une question de survie psychologique.
L’un des exemples les plus flagrants est lorsque cet antihéros obtient une promotion. Après des mois d’errance professionnelle, cette opportunité semble être enfin une perspective d’évolution prometteuse. Il aurait dû se réjouir à l’annonce de cette bonne nouvelle. Contre toute attente, il présente sa démission presque immédiatement.
La saison 2 montre que le personnage principal devient donc son propre ennemi en s’auto-sabotant en permanence. La série Bref révèle, à juste titre, que l’auto-sabotage est avant tout une tentative désespérée de préserver son équilibre mental.
Loin de s’apparenter à une névrose individuelle, l’auto-sabotage constitue un signal d’alarme sur la santé mentale des travailleurs. Il traduit un malaise plus large autour de la question de la peur de l’échec, de la difficulté à trouver du sens et surtout de l’incapacité à exprimer son mal-être pour en sortir.
L’auto-sabotage n’étant pas une fatalité, trois pistes de réflexion peuvent permettre de désamorcer ce mécanisme destructeur.
Prendre conscience des croyances limitantes
Il convient d’identifier les pensées négatives ou irrationnelles provoquant une sorte de paralysie. Elles sont susceptibles de prendre plusieurs formes : « je ne suis pas assez compétent » ou « je vais échouer systématiquement ». Ces croyances nourrissent la procrastination, le manque de confiance et l’inaction. À la place, il est nécessaire de transformer systématiquement ces pensées en affirmations positives pour limiter les comportements autodestructeurs.
Gérer l’échec de manière constructive
Si l’échec est généralement perçu de façon négative dans le monde du travail, il peut en réalité être une source d’apprentissage et de progrès. Certaines entreprises valorisent d’ailleurs les échecs en créant des événements à l’image de « la fête à la défaite » afin d’inciter les salariés à se faire confiance et à prendre des initiatives. L’objectif est ainsi de renforcer la résilience pour éviter de se laisser abattre par le moindre obstacle.
Savoir poser ses limites
L’absence de limites peut entraîner un épuisement progressif, conduisant à une démotivation générale ou à un sentiment de ne jamais être à la hauteur. Plutôt que de s’auto-saboter pour prévenir ce genre de situations, il importe de savoir poser ses limites avec assertivité. En d’autres termes, les salariés doivent apprendre à dire « non » de façon appropriée lorsque c’est nécessaire afin de protéger leur santé mentale.
Si la série Bref a autant marqué les esprits, c’est parce qu’elle a su lever le voile sur un phénomène de société : un mal-être profond s’étendant jusqu’au travail.
Le personnage principal ne cherche pas uniquement à fuir ses responsabilités professionnelles, il tente maladroitement de reprendre le contrôle de sa vie. Une démarche qui résonne aujourd’hui plus que jamais, pour tous ceux qui sont en quête de sens.
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