Une des 39 Ferrari 250 GTO construites entre 1962 et 1964, celle qui a été victorieuse au Tour de France Automobile en 1964, s’est vendue au début du mois à un collectionneur américain de New York pour la somme de 60 millions d’Euros (£ 52 millions, ou $ 70 millions, d’après la presse anglaise), un record absolu et fracassant.
Il s’agit de la voiture de collection, de toutes les marques, de tous les temps, avant-guerre, après-guerre, de course ou de luxe, la plus coté au monde : le Saint Graal de l’Automobile.
Le marché des autos de collections a globalement connu une forte hausse entre 2009 et fin 2015, du début et à la fin à peu près du ‘Quantitative Easing’. Malgré un marché depuis fin 2015 qui se tasse et se consolide sur d’autres marques comme Mercedes et Porsche, on a assisté à l’accélération de la domination de la marque Ferrari comme coqueluche des collectionneurs. Il y a 5 ans encore, parmi les 100 prix de vente les plus élevés jamais obtenus en vente publique, 40 étaient des Ferrari ; aujourd’hui Ferrari ne représente pas moins de 65 des 100 enchères les plus élevées jamais enregistrées.
La prédilection pour les Ferrari dont le nom rime avec compétition et surtout victoire
Peut-être que la raison pour cette prédilection réside dans l’histoire de la carrière du personnage Enzo Ferrari. Ferrari a commencé comme pilote de course au début des années 20. On le retrouvait principalement au volant des premières Alfa Romeo de course. Alfa Romeo a fait sa réputation dans les courses avec les premières victoires de la marque dès 1921. Ferrari, qui ne courait pas mal, avait aussi un certain goût pour l’organisation des équipes et la préparation des autos. Petit à petit, il s’est retrouvé à convaincre ses riches amis, amateurs des courses automobiles de l’époque, de contribuer au financement d’une écurie.
Des 1929 Ferrari a abandonné le volant pour se concentrer sur la création d’une équipe qui gagnerait. C’est à cette époque que la Scuderia Ferrari, écurie de course pour Alfa Romeo, a adopté comme sigle le petit cheval noir cabré. Fort d’une victoire particulièrement résonnante, la légende prétend que la mère de l’aviateur Francesco Baracca, grand héros et as des as italien de la première guerre, a demandé à Ferrari d’apposer cet emblème sur ses bolides de course pour leur porter chance vers la victoire. Il a monté ce petit cheval sur fond jaune, couleur de sa ville natale de Modène.
Ferrari avait le flair pour gagner mais aussi pour financer cette entreprise. Toujours à la recherche de la victoire pour la marque Alfa Romeo, Ferrari a convaincu la firme de Milan de lui confier complètement la gestion des efforts de la maison en course. En créant son écurie de course, la Scuderia Ferrari, il a négocié et obtenu l’exclusivité de la formation de la marque en course de type formule 1 et de sport. La Scuderia Ferrari était composée d’ingénieurs et de mécaniciens capables d’améliorer sensiblement la puissance et la performance des autos que l’usine d’Alfa leur livrait. Cette capacité d’élaborer, de finir et de mettre au point ses autos a valu à Ferrari toute sa réputation qui perdure aujourd’hui. Sa préférence pour la formule 1 prenait déjà forme à cette époque.
Il faut dire qu’Alfa Romeo a connu son âge d’or en course à cette époque du début des année 30. Les Alfa remportaient les courses les plus importantes : vainqueurs aux 24 Heures du Mans en 1931, 1932, 1933 et 1934 ; victorieuses aux Mille Miglia 10 fois entre 1928 et 1939 ; champion de l’équivalent de la formule 1 des monoplaces de l’époque en 1932, 1933 et 1934. Les Alfa, et surtout celles de la Scuderia Ferrari, étaient les autos à battre.
Dès 1938, on a commencé à trouver « de l’eau dans le gaz ». Alfa a relevé que les avantages financiers des résultats en course retombaient un peu trop du côté de la Scuderia Ferrari et pas assez du côté d’Alfa Romeo. Alfa a donc mis en place en parallèle « Alfa Corse » qui s’est aligné fin 1937 en compétition directe sur les lignes de départ avec les Alfa Romeo de la Scuderia Ferrari. Cet arrangement s’est soldé par une séparation définitive fin 1938 avec Alfa Romeo qui a racheté la Scuderia Ferrari. Ferrari est parti créer une nouvelle affaire la “Auto avio constructione” avec l’interdiction d’utiliser son propre nom pendant 4 ans. Avec la seconde guerre qui commençait, Ferrari fabriquait principalement des pièces pour l’aviation italienne.
Après la guerre, en 1947, Ferrari s’est remise au développement des autos avec l’envie de vendre les voitures de luxe à ses riches amis clients afin de financer la construction de ses automobiles de courses. Au fur et à mesure que les courses reprenaient, les Ferrari étaient présentes. Sa première grande victoire est celle des 24 Heures du Mans de 1949, la première de ses neuf victoires sur le circuit de la Sarthe. Depuis les Mille Miglia, de 1947, année de la reprise des courses, jusqu’à 1957, la dernière année où la course se disputait au scratch, les Ferrari ont gagné 8 années sur 11.
Avec les années 50 est née chez tous les constructeurs automobiles la nécessité de traduire les victoires en ventes de voitures au public, autant pour les modèles de luxe que les autos dites populaires. Pour Ferrari, il n’y avait pas d’exception. La marque s’est appuyée quand même sur ses victoires en courses et notamment au Tour de France Automobile ou « Tour Auto ». Peut-être que justement la réussite la plus importante dans l’histoire de la marque de Ferrari, ce sont ses 9 victoires au Tour Auto entre 1956 et 1964. Les Ferrari ont tellement dominé au Tour Auto à cette époque que le modèle 250 GT qui l’a remporté les 5 premières années de suite de 1956 à 1960, a été surnommé la ‘Tour de France’.
Ce qui nous ramène à notre 250 GTO de 1964 valant € 60 million, car elle est le dernier de ces modèles « 250 », la dernière évolution de cette automobile de la marque, la quintessence de Ferrari qui a marqué son époque, qui a créé le mythe, et qui fait rêver tous les collectionneurs du monde. Ce modèle de course et de route est l’épitomé de la voiture de sport, la culmination chez Ferrari après tant d’années de développement et tant de victoires.
Une récompense pour les passionnés de Ferrari
Ferrari occupe la première marche de toutes les marques automobiles de collection. Aucune autre ne peut rivaliser avec la performance spectaculaire des valeurs de ces autos. Ces 40 dernières années ont vu les prix monter de 100 fois la mise pour quelques-unes de ces Ferrari de course « d’occasion ». Mais dans un monde ou les Rembrandt, Picasso et autre Basquiat par exemple peuvent valoir des centaines de millions, peut-être qu’il est temps que les voitures les plus convoitées rejoignent le pinacle des prix que les collectionneurs sont prêts à mettre.
Même en comparant les prix de vente des Ferrari de course de la période des hausses de prix spéculatives de la fin des années 80, il y a des modèles dont les prix ont progressé de plus de 30 fois en 30 ans. Un million de dollar en juillet 1987 pour faire entrer dans sa collection une Ferrari P3/4, voiture prototype mythique des courses d’endurance des années 1966-1967, vaut aujourd’hui $ 30 million à $ 40 million, voire $ 50 millions. Pour celui qui a cédé à sa passion cette année-là (s’il l’a toujours !), il peut se réjouir d’avoir fait un joli coup. Pour le New-Yorkais qui vient de s’offrir la Ferrari 250 GTO de ses rêves pour € 60 million, peut-on imaginer ce que cela pourrait valoir dans 30 ans ?
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