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Qui sont ces nouveaux nomades du luxe ?

Un article issu du numéro 29 – hiver 2024, de Forbes France

Les « affluent new nomads », ces voyageurs fortunés qui oscillent entre travail et loisirs, redéfinissent le luxe. Entre quête d’expériences uniques, confort rassurant et conscience éthique naissante, ils imposent aux marques de se réinventer pour répondre à leurs besoins exigeants.

Sur les plages de Pampelonne, le beach club Jacquemus se distingue par ses teintes jaune citron et son logo reconnaissable entre mille.

Ici, certains de ces touristes aisés qui y trouvent refuge, entre luxe et légèreté estivale, font partie de la famille des affluent new nomads. Mais qui sont vraiment ces voyageurs fortunés, qui redéfinissent les attentes du secteur du luxe ? Issus des 5 % les plus riches de la planète, gagnant au minimum 150 000 € par an, ils se distinguent par un mode de vie nomade, oscillant entre travail et loisirs. Selon une étude de Kantar Insights*, ces citoyens du monde passent en moyenne plus de trois mois par an en déplacement. Pour beaucoup, la frontière entre travail et loisirs est floue : « Ces personnes voyagent davantage pour affaires et pour les loisirs, et ce besoin d’évasion s’accompagne d’un désir de confort extrême, même dans des lieux insolites », explique Françoise Hernaez, directrice Conseil Luxe chez Kantar Insights. Les chiffres parlent d’eux- mêmes : 87 % d’entre eux consomment des produits de luxe pendant leurs voyages, recherchant des marques emblématiques et des créations locales.

Pour comprendre cette nouvelle tendance, il faut plonger dans la philosophie de vie qui anime ces nomades modernes. Les affluent new nomads partagent une vision commune, celle de vivre intensément et de profiter de chaque instant. La plupart d’entre eux se considèrent comme ayant « réussi par eux-mêmes » et estiment que la vie est trop courte pour ne pas jouir de tout ce qu’elle a à offrir. Ce- pendant, ce luxe s’exprime de manière nuancée : s’ils plébiscitent les grandes marques prestigieuses comme Louis Vuitton, Hermès ou Chanel, 30 % préfèrent un luxe discret, sans logos tapageurs, une tendance particulièrement marquée chez les Français (44 %) et les Américains (37 %). « Ils recherchent une intensité de vie et veulent profiter pleinement de chaque moment, mais sans pour autant afficher leur statut de façon ostentatoire. »

Des expériences plutôt que des objets

Au-delà des biens matériels, ces consommateurs valorisent les expériences et la personnalisation. En 2024, 37 % d’entre eux prévoient d’augmenter leurs dépenses dans le luxe, surtout dans les domaines de la beauté (spas et instituts), de la gastronomie, des hôtels, des croisières, ainsi que dans les vêtements et accessoires durables, loin des produits « kleenex » de la consommation rapide. « Globalement, les expériences dominent dans les intentions d’achat par rapport aux biens matériels », souligne-t-elle.

Dans cette quête de fluidité et de confort, des entreprises comme Toshi se sont également imposées. Primée par LVMH, la start-up répond aux besoins de mobilité de ces clients exigeants en proposant un service de magasinage à domicile.

« Toshi est ce qu’on appelle un facilitateur, il rend l’expérience plus fluide et personnalisée », ajoute Françoise Hernaez. Pour répondre aux attentes spé- cifiques des affluent new nomads, l’exemple le plus marquant reste les agences de voyage par projet, avec des acteurs comme Black Tomato ou Fluenz, qui proposent des expériences façonnées autour de projets individuels : qu’il s’agisse d’apprendre une langue, de vivre des expériences musicales uniques, de « resserrer les liens familiaux » ou encore de s’immerger dans une culture locale. « Black Tomato est leader dans ce domaine. » D’autres marques, axées sur le sportswear luxe comme Moncler, symbolisent cette évolution vers un luxe fonctionnel, compatible avec la vie nomade et l’exigence de confort en toutes circonstances : « Les sneakers sont devenues un investissement important, au même titre que les sacs de luxe. » Sans oublier les pop-up stores de grandes marques dans des lieux inattendus (par exemple, des installations éphémères de Dior en Malaisie ou des boutiques de plage signées des créateurs de mode) qui renforcent cette tendance, en amenant le luxe dans des lieux de voyage tout en conservant l’exclusivité et le raffinement recherchés par ces consommateurs.

Aspirations contradictoires

Cette élite est scrutée de près par le marché du luxe, et l’Inde, avec une population de nouveaux nomades indiens fortunés voyageant beaucoup pour affaires et loisirs, est devenue clé. « Nous travaillons beaucoup sur ce pays depuis cet été. C’est une population fascinante qui intéresse fortement les marques de luxe et sur laquelle nous sommes de plus en plus interrogés. »

Bien que 41 % des affluent new nomads se considèrent comme des « consommateurs engagés », leur conscience écologique n’a pas encore totalement bouleversé leur mode de vie. Le voyage reste une priorité, mais une attention croissante est portée à l’éthique et à la durabilité. « Ils sont à l’écoute des marques qui s’engagent et choisissent de les privilégier. » Cela se traduit par un choix de transports plus responsables, avec une préférence pour le train par rapport à l’avion pour les distances moyennes. Certains évitent également les destinations peu respectueuses des droits humains, témoignant d’une sensibilité accrue aux enjeux sociaux et éthiques.

Face à ces attentes en constante évolution, les marques de luxe sont poussées à innover, à concevoir de nouvelles expériences flexibles et authentiques pour répondre aux aspirations de ces affluent new nomads. Les envies de ces voyageurs s’élèvent bien au-delà des simples possessions matérielles : ils oscillent entre des aspirations apparemment contradictoires, entre exotisme et sécurité, intensité et calme, revisitant sans cesse les codes du luxe.


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