La mode vit un moment de transition. L’avenir peut être très différent du passé ou alors tout changera pour que rien ne change. Tout peut arriver ! Souvenez-vous : la mode en quarantaine consistait à porter des vêtements décontractés pour se sentir à l’aise à la maison, mais toujours prêts pour un appel en visio… La top model Coco Rocha, photographiée pour l’occasion par la légende Ellen von Unwerth, nous livre sa vision.
Ces longs mois de confinement, se résumaient finalement à tout acheter en ligne en laissant de côté la créativité car nous étions privés de la possibilité d’essayer nos looks. Forcément, notre panier se remplissait plus vite ! Cela semble être une réaction « normale » au cygne noir qui n’a pas prévu l’imprévisible. Cependant, même avant le Covid, n’y avait-il pas déjà de cigogne blanche qui nous apportait une vision idéaliste de la vie derrière nos écrans ? Avec Internet, il n’y a pas besoin de spectacles, de magazines et de garde-robes fantasmées pour déclencher l’achat. La mode ainsi conçue serait parfaitement durable sur le papier, mais pendant le confinement, nous avons manqué d’air et d’interaction avec les autres, la séduction est passée au second plan, et, encore moins glamour, beaucoup ont perdu leur emploi.
Ce n’est pas un hasard si le luxe, secteur qui, paradoxalement, accorde plus d’attention aux phénomènes culturels et sociaux, s’est tourné vers l’extérieur – en illustration de cette tendance, la collaboration entre Gucci et The North Face qui a mis en avant le temps passé avec ses proches, ou encore l’esprit de la vidéo d’Emilio Pucci pour la collection capsule Tomo Koizumi. SI bien que ce n’est même pas une coïncidence si Bottega Veneta a quitté les médias sociaux, car la mode sur écran plat est une opportunité mais aussi une limite. Nous utilisons des outils hautement technologiques qui nous encouragent à exprimer nos préférences de manière primitive, en une fraction de seconde, entre un tap et un swipe, avec beaucoup de controverses et peu d’informations. Notre capacité de recherche diminue parce que les algorithmes ont tendance à faire des propositions basées sur ce que nous avons déjà cherché auparavant, donc nous finissons par regarder sans vraiment voir, mais sans aucun doute – comme Apple l’a récemment souligné – en étant observés de près.
La mode n’est pas linéaire mais tridimensionnelle car, en fin de compte, elle doit être portée. La technologie n’est pas l’avenir mais le passé, car la génération Z est native du numérique et aspire à quelque chose de réel. La mode n’est pas une question de vêtements, sa fonction est d’exprimer notre identité, d’entrer en relation avec les autres et de montrer le genre de monde que nous voulons. Sur cette base, l’agence spécialisée Fashion Politique a réalisé deux couvertures pour L’Officiel. La première avec Winnie Harlow pour affirmer la liberté de chacun d’être exactement comme il est. La seconde, ici, avec Coco Rocha, photographiée par Ellen von Unwerth, dans l’iconique Thompson Hotel de New York, où le souci du détail a laissé place aux relations humaines et aux expériences sensorielles, comme seule la mode pointue peut le faire.
Alors, est-ce là le futur que nous essayons d’entrevoir ? La « vraie mode » est-elle de retour ? Il est toujours intéressant et éclairant d’avoir l’avis d’un top model sur le sujet.
Danilo Venturi : Coco, que sera la mode post-pandémie ?
Coco Rocha : Les gens disent que la Covid a inauguré une nouvelle ère de travail à domicile et consacré le jogging ! Personnellement, je vois la mode plutôt comme un pendule qui va devoir revenir en arrière. Car s’il y a bien une chose qui nous a tous manqués dans la Fashionsphère, c’est l’accès à la créativité d’une bonne équipe. Alors oui, c’était sympa de faire des shootings à la maison, seule, mais il y a clairement quelque chose de magique à réunir un groupe de personnes créatives et à esquisser de nouveaux projets à partir d’idées. La mode en tant qu’art nous a également manqué. Les pantalons de survêtement et les t-shirts peuvent faire l’affaire, comme un bol de céréales peut satisfaire une petite faim ! La mode est bien plus qu’un besoin basic, nous avons besoin d’être inspirés par elle.
Votre séance photo glamour donne-t-elle un aperçu de ce que sera la mode ?
C.R : J’espère que oui, j’ai retrouvé tout ce qui m’a manqué et aimé dans la mode : de superbes vêtements, un photographe avec une vision forte, une bonne histoire à incarner lors de mes poses, et une chance de vraiment performer avec une équipe d’experts pour me soutenir.
Pensez-vous que la mode a quelque chose à voir avec la politique ?
C.R : La mode ne se crée pas dans le vide. Elle est mue par l’Histoire, la politique et la culture. Et à leur tour, l’Histoire, la politique et la culture sont parfois influencées par la mode. Nous sommes tous le produit de l’époque dans laquelle nous vivons, et la mode n’est pas différente.
Enfin, quel est le prochain slogan de la mode ou, du moins, son mot clé ?
C.R : Peut-être « honnêteté ». Je me demande comment nous pouvons ramener l’honnêteté et la vérité dans l’imaginaire et la publicité ? Comment pouvons-nous être pertinents et honnêtes dans notre façon de produire et de consommer ? La plupart des gens sont conscients qu’on leur vend souvent des mensonges, dans les médias sociaux et ailleurs. Le public a soif de vérité.
Par Danilo Venturi, Directeur artistique de Fashion Politique
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