Il était une fois la maison Christofle, fleuron des arts de la table

Fournisseur officiel de l’Etat français depuis le roi Louis-Philippe (1773-1850), la maison Christofle a traversé les vicissitudes de l’histoire avec art. Bientôt bicentenaire, l’enseigne continue de représenter le chic à la française sur tous les continents.

Véritable success story à la française, l’enseigne a prospéré à la faveur de l’esprit visionnaire de son fondateur Charles Christofle (1805-1863), bijoutier de formation. Très porté sur l’innovation, l’artisan-entrepreneur a changé le destin de l’entreprise en achetant en 1842 les brevets d’argentures et de dorures par électrolyse au Français Henri de Ruolz, pressentant que cet investissement vaudrait bientôt son pesant d’or. Désireux de fabriquer des pièces en métal argenté à l’échelle industrielle et de s’inviter dans les plus beaux intérieurs, le trentenaire a des rêves de grandeur.

Ce pragmatique comprend qu’il y a un marché dans les services de table, notamment dans les couverts de métal qui s’oxydaient et devenaient dangereux. La création de son orfèvrerie répondait donc à une ambition, mais aussi à un besoin. Au pays de Vatel et des agapes royales où manger est religion, Charles Christofle invite à table candélabres, carafes, saucières, porte-serviettes, bougeoirs… qu’il confectionne comme des écrins, mariant ainsi ses deux passions : la joaillerie et l’argenterie. Son coup d’éclat sera certainement ses réalisations à l’exposition universelle de Londres (1862). Ses collections sont qualifiées de « chefs-d’œuvre » par la presse internationale de l’époque. 

Auréolé de plusieurs médailles et trophées, l’enfant prodige devient la fierté d’une nation. L’Empereur Napoléon III élève alors Charles Christofle au grade d’officier de la Légion d’honneur. Une double reconnaissance qui lui vaut passeport en vue de collaborations exceptionnelles à la mesure de son talent. Parmi ses ouvrages, la commande de l’Opéra Garnier (1866) dont l’atelier Christofle réalise les statues ‘Les allégories de la Poésie et de l’Harmonie’, dessinées par Gumery, ou encore la statue Sainte Vierge de Notre-Dame de la Garde qui surplombe la ville de Marseille.

Durant ces travaux hors normes, la maison invente la galvanoplastie monumentale, une technique qui permet de dorer ou argenter un objet métallique par l’action d’un courant électrique. Ce procédé peut également être utilisé pour reproduire un objet par moulage. D’un siècle à l’autre, l’orfèvrerie Christofle continuera à prendre pertinemment le train de la modernité en équipant les plus prestigieux moyens de transport de l’Orient Express à la Transatlantique Cunard Queen Mary, en passant par le Concorde.

Avant-gardiste, l’enseigne n’hésite pas à jeter des passerelles vers des icônes à l’image de Jean Cocteau, Karl Lagerfeld ou Pharell Williams, au gré de partenariats bien inspirés. A l’heure de l’Expo Universelle de Dubaï, la griffe brille de mille feux dans le pavillon français pas peu fier d’afficher « ses joyaux de la couronne ».  

Pour aller plus loin : 

les 10 commandements d’une table Christofle : 

1/ Un dressage à la française

2/ Une mise en place pour les droitiers

3/ Un assortiment de 3 couverts maximum (vs 6 à 8 pour l’école britannique)

4/ Un usage de l’extérieur vers l’intérieur

5/ Un placement des couverts pointes vers le bas, dos bombé en haut (poinçons à l’intérieur pour marquer le goût du luxe discret vs pointes vers le haut pour les Britanniques)

6/ Une porcelaine dont la taille doit être adaptée à la taille des couverts

7/ Une décoration étudiée pour créer une atmosphère autour des sens : fleurs, candélabres, linge de table en harmonie

8/ Une table habillée d’assiettes de présentation afin de ne jamais laisser une place vide entre deux plats

9/ Un décorum ponctué de ronds de serviette, de porte couteaux …

10/ Un agencement des verres de cristal en partant de la gauche, du plus grand au plus petit (pour ne pas gêner les droitiers dans les mouvements)

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