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Giambattista Valli, le plus français des couturiers italiens

© Getty Images

Indiscutablement, Giambattista Valli a gagné sa place dans la fashion sphère en une décennie. Le Romain a conquis Paris, gage d’une internationalisation réussie. Collection après collection, le designer éblouit les podiums – puis les tapis rouges – de ses créations empreintes d’onirisme et de sensualité. La Muse Valli ne cache pas sa personnalité derrière les tendances, elle s’affirme avec classe et certitude. Forbes a échangé avec ce génie de la haute couture qui a accepté de revenir sur les plus beaux chapitres de sa vie.

 

Quel est votre premier souvenir lié à la mode ? 

Giambattista Valli : A l’âge de sept ans, mes parents m’ont emmené voir le Guépard de Luchino Visconti. Je me souviens plus particulièrement de cette scène de fiançailles où Claudia Cardinale éclate de rire. Elle est tellement libre, spontanée et lumineuse. J’ai été fasciné par ce moment d’équilibre extraordinaire. Au-delà de la mode, j’ai surtout décidé que je voulais rendre les femmes belles ou les aider à trouver leur beauté. Quand je ne dessinais pas les « soubrettes » de la télévision en cherchant à deviner la couleur de leurs vêtements sur l’écran en noir et blanc, je harcelais la couturière de ma grand-mère pour qu’elle confectionne les pièces de ma première mannequin : une Barbie. 

Pourquoi avoir décidé d’écrire votre histoire à Paris plutôt qu’en Italie ? 

Je suis né à Rome mais Paris est ma ville d’adoption. Mes origines romaines sont toujours subtilement présentes dans mes créations, Rome c’est la ville de l’excentricité, de la fantaisie et de l’illusion. Paris est, quant à elle, synonyme d’excellence et de savoir-faire. Pour les Maisons de haute couture, « l’excellence » ne se traduit pas seulement dans les créations mais aussi dans la culture, les rituels et les gestes. J’ai eu le privilège de les apprendre avec monsieur Emanuel Ungaro, qui lui ont été transmis par Cristóbal Balenciaga lui-même.

Être Romain à Paris m’apporte une certaine dualité, une capacité à associer la qualité du travail industriel italien dans le prêt à porter et les techniques plus sophistiquées de la haute couture française. Paris m’a donné l’opportunité d’explorer les recoins cachés de ma personnalité et de ma créativité, tout autant que cette attitude française, très débridée et décomplexée sans jamais être superficielle.  

Giambattista Valli

 

Que vouliez-vous apporter à la mode ?  

Une valeur plus que précieuse dans une industrie saturée : l’identité. Le plus important, selon moi, est d’être connu pour une silhouette et non pour un logo. C’est comme être un architecte, si l’espace est bien agencé, découpé et décoré, ça fonctionnera toujours. 

Il y a dix ans quand la haute couture était menacée, vous n’avez pas hésité à vous ouvrir à cet univers. Était-ce par goût du challenge ou est-ce que vous marchez par instinct ? 

J’ai lancé ma première collection de Haute Couture en 2011. Tout le monde me prenait pour un fou : il y avait la crise, les Maisons fermaient. C’est justement ces périodes qui sont propices au développement de la créativité, les semaines de la Haute Couture à Paris sont maintenant des rendez-vous incontournables. J’espère montrer à la prochaine génération qu’avec une idée précise, une obsession, un message à partager à travers du travail, de l’implication, des connaissances, de la ténacité et un soupçon d’insouciance tout est possible. Que l’on peut être l’acteur de son propre film plutôt que la doublure dans celui d’un autre. 

Giambattista Valli : « Le plus important, selon moi, est d’être connu pour une silhouette et non pour un logo.« 

 

Collection après collection, vous avez su conforter votre statut de designer qui compte. Comment entretenez-vous l’inspiration ? 

Je me vois comme un écrivain, chaque collection étant le chapitre d’un livre. Je me sers de mes idées et de ma fantaisie pour raconter une histoire avec mes créations. Le style « Valli » est nomade, c’est un mélange de cultures et d’iconographies. Les femmes qui portent mes vêtements le sont tout autant et sont aussi une grande source d’inspiration pour moi.   

Féminité, sensualité, dentelle, mousseline de soie, robes bijoux… Cette signature stylistique vous caractérise. Il y a beaucoup de poésie et de romantisme dans votre univers… Quelle muse voyez-vous derrière ?

Ma plus grande muse est la curiosité. Mon désir est d’habiller et d’accompagner les femmes du monde entier dans leur vie, dans leur quotidien et dans leurs moments forts. La femme « Valli » est à l’aise avec sa féminité et ne cache pas sa personnalité derrière des tendances. Elle est libre, non restreinte par les conventions tout en étant intemporelle. Cette femme et ses gestes sont une obsession dans mon travail. 

Pour la saison SS23 (Printemps-Eté), vous avez mêlé des inspirations orientalistes aux codes esthétiques de la marque. Quelle histoire souhaitez-vous raconter ? 

J’ai toujours voulu créer de l’harmonie entre les opposés. Cette saison cela s’exprime à travers l’équilibre entre les matières, les imprimés, les nuances, la délicatesse des tissus qui suscite une certaine synesthésie. La collection traduit l’émotion d’un geste, d’un moment, d’une silhouette, d’une gamme de teintes, d’une odeur. Ces sphères sensorielles se fondent les unes aux autres et permettent à notre esprit de s’évader dans un « jardin imaginaire » oriental, baigné dans les imprimés floraux, les couleurs chaudes, la légèreté des textures et la richesse des broderies. 

© Getty Images

 

La mode est un métier qui peut abîmer, comment vous préservez-vous ? 

Je me ressource à Rome, où je prends du temps pour recharger ma créativité, pour être aux côtés de mes proches. Je considère ma vie privée comme un luxe, c’est ce qui me protège. J’aime aussi me retrouver seul avec une feuille blanche et un crayon. C’est un moment propice à l’introspection, dessiner est ma méditation. 

 

Pour aller plus loin :  

Maison Giambattista Valli

 

 

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