Fleuron | Le formidable roman du maître cirier Trudon

Trudon appartient à ces marques pluri centenaires associées à l’Histoire de France. Aujourd’hui labellisée entreprise du patrimoine vivant, le maître cirier depuis 1643 a placé sur un piédestal les bougies et parfums d’intérieurs qu’il sublime tels des écrins. La maison s’exporte avec brio à l’international et multiplie les collaborations couture avec les designers incontournables (Balmain, Giambattista Valli…). Forbes s’est entretenu avec le directeur de la création, Julien Pruvost.

Comment résumer quatre siècles d’Histoire ?

Julien Pruvost : La maison Trudon a traversé les siècles et parmi les plus importants de l’Histoire de France. Dans le sillage de l’essor des grandes maisons de l’artisanat français, telle Saint-Gobain, la maison Trudon, anciennement manufacture royale de cire, grandit tout au long des XVIIème, XVIIIème et XIXème siècles. Elle fut fournisseur du pouvoir régalien et de l’Église, représentative d’un savoir-faire essentiel poussé à son paroxysme. La maison Trudon a su résister aux changements politiques, aux guerres, mais aussi aux différentes révolutions technologiques qui auraient pu maintes fois la faire disparaître. Elle doit son maintien à l’innovation et au développement constant de produits d’excellence en tous points de vue. Aujourd’hui entreprise du patrimoine vivant, la maison Trudon fait perdurer son savoir-faire en matière de cire, s’investit dans le monde des parfums corporels et accélère son engagement en matière de durabilité, tant au niveau créatif, qu’au niveau industriel et de son sourcing.

Comme beaucoup de fleurons, Trudon a eu sa période de « belle endormie ». De quelle manière avez-vous rallumé l’étincelle ?

L’histoire de la maison ne ressemble pas à celle d’une maison de bagagerie ou de mode, dont la production se serait interrompue. L’entreprise s’est toujours adaptée à son temps, plus ou moins rapidement, et n’a eu de cesse de produire ses propres produits. L’époque est aujourd’hui, en partie, fascinée par les maisons historiques à condition qu’elles aient su mettre en valeur leur patrimoine à travers des produits utiles et beaux, et surtout avec authenticité. Le nom Trudon résonne aujourd’hui avec l’Histoire, un savoir-faire d’excellence et une vision de la parfumerie. Ces éléments combinés lui donnent sa force.

Julien Pruvost, Directeur de la création chez Trudon et Carrière Frères © Trudon

Vous avez attendu 2017 pour vous étendre au parfum. Comment faites-vous vivre votre héritage dans cet univers ?

L’utilisation d’huiles essentielles remonte au XVIIIème siècle lorsque la maison Trudon en incorporait dans certaines de ses bougies. Plus récemment, et forts de l’expérience de Trudon au contact des maisons de parfums depuis sa renaissance, telle que nous la connaissons aujourd’hui, il est apparu naturel de vouloir s’exprimer sur un support permettant une autre forme de créativité et pour un nouvel usage, beaucoup plus personnel. La ligne de parfums Trudon est à la fois proche et très différenciée de la ligne des parfums d’intérieur.

Certains codes restent communs, comme l’utilisation systématique du verre que l’on retrouve aussi dans l’élaboration du capot du flacon, ou encore le choix des noms : concis et en lien avec l’Histoire. Les parfums sont uniques à leur ligne, mais résonnent avec ceux des bougies. Ils portent en eux toute la sophistication de Trudon et de fortes originalités, marque de fabrique de la maison.

Quant à la bougie, elle se pare d’une robe couture aujourd’hui. Les plus grands designers livrent chaque année une nouvelle interprétation de cet accessoire devenu objet du désir. Qu’est-ce qui a boosté le marché de la bougie et des parfums d’intérieur selon vous ?

Sans doute de nombreux paramètres, facteurs et évènements tels que la bougie comme objet de décoration, l’envie de certains publics de parfaire leur intérieur ou simplement de l’habiller efficacement, les réseaux sociaux montrant des intérieurs parés de bougies, certaines entreprises dans le luxe cherchant à se diversifier et à créer des produits plus accessibles, la bougie comme status symbol… Le fait que nous ayons été récemment forcés de rester à l’intérieur, ce qui a détourné certaines habitudes de consommation vers la parfumerie d’intérieur, ou encore parce que la bougie est un cadeau presque parfait.

Quels sont vos best sellers et marchés clefs ?

La bougie Classique (270g) et les parfums Ernesto (clin d’œil au Che Guevara), Cyrnos (référence à la villa que fit construire l’impératrice Eugénie sur la Côte d’Azur au Cap Martin), Abd el Kader (en hommage à l’illustre chef militaire algérien), Joséphine (révérence à l’icône Joséphine Baker), Reggio (en référence au mandarinier d’Indochine introduit en 1828 sur les Côtes occidentales de Méditerranée).

Quant à nos marchés clefs, ce sont l’Europe, les États-Unis, la Chine, l’Australie et la Corée.

Vos projets à moyen terme ?

Développer notre gamme de parfums corporels toujours en collaboration avec des parfumeurs de talent tels qu’Antoine Lie ou Yann Vasnier. Nous souhaitons également poursuivre nos efforts en recherche et développement pour limiter l’impact environnemental de nos produits, ouvrir de nouveaux points de vente en propre, et investir dans notre outil de production.