Provocateur, le photographe Tyler Shields, qui n’a pas peur de tailler dans le vif, a un parcours hors du commun. Il débute en tant que skater pro et se dirige vers la production de musique à 20 ans. Puis, sa carrière de photographe débute par hasard, lorsqu’il prend en photo le placard vide de son ex-petite amie. En postant la photo sur son compte MySpace, il ne se doutait pas le moins du monde que l’image aurait autant de succès. Ce fut un point déterminant pour Tyler Shields, qui s’est soudain découvert une passion pour la photographie.
Il laisse au spectateur le soin de se faire sa propre idée sur son style. Cependant, il est indéniablement graphique, au beau milieu de la romance, et de l’anticipation de ses œuvres charnelles. Il ajoute à cela un mélange d’éléments de culture et de société de consommation et transforme chaque pièce en véritable œuvre contemporaine. Son compte MySpace est bien loin maintenant, avec son compte Instagram qui compte plus de 500 000 abonnés fidèles. Voici l’interview de l’artiste, par Felicity Carter.
Felicity Carter : Quel est votre premier souvenir artistique ?
C’est une histoire très étrange, j’étais en sortie avec l’école au Musée d’Art contemporain de Jacksonville en Floride, lorsque j’avais 7 ou 8 ans. Il y avait une exposition, et parmi toutes les photos, une photographie de l’atterrissage sur la lune. Ils avaient placé une fausse lune à côté de la photo, et un de mes camarades m’avait dit que c’était grâce à elle que Superman avait eu ses pouvoirs. Je tiens à préciser qu’à l’époque, Internet n’existait pas et que Superman était plus connu sous forme de comics, la production des films venait tout juste de commencer avec Christopher Reeves. À cet instant, j’ai fait ce que tout le monde aurait fait à ma place, selon moi, j’ai passé la barrière et j’ai enlacé la fausse lune. Mon professeur m’a rappelé à l’ordre, ce à quoi j’ai répondu que j’avais maintenant des super pouvoirs. Je n’ai pas raconté cette histoire depuis longtemps, et en la racontant je réalise à quel point je suis différent, et je trouve ma réaction assez drôle. Donc je suppose que j’ai bel et bien reçu un super pouvoir à l’époque.
FC : Parlez-nous de votre parcours, et comment vous êtes devenu un artiste…
Lorsque j’étais petit, je faisais de la moto, puis je suis passé skater pro. J’ai alors quitté l’école pour me consacrer à ma carrière de skater professionnel jusqu’à mes 19 – 20 ans. Puis, je me suis lancé dans la production de clips musicaux. Je sortais avec une fille qui m’a trompé avec un photographe, alors j’ai jeté toutes ses affaires et j’ai pris une photo de l’armoire vide. Cette photo a eu du succès sur MySpace, et depuis je ne me suis pas arrêté de prendre des photos. Bien que la photographie ait été un coup de foudre pour moi, à l’époque ce domaine n’était pas prépondérant. Et puis, je ne faisais pas comme tout le monde. J’ai dû me frayer mon propre chemin, et j’ai finalement réussi à exposer dans des galeries d’art et à vendre mes œuvres.
FC : Quels sont les artistes qui vous ont inspiré ?
Irving Penn, Helmut Newton et Richard Avedon, la Sainte Trinité, ont assurément eu un impact sur moi. Ce qui est intéressant à savoir c’est que je n’avais jamais vu leurs œuvres avant de devenir un photographe moi-même. C’est un collectionneur qui m’a donné un livre sur les œuvres de Helmut Newton et j’ai été impressionné, et aussi un peu envieux. Ces artistes m’ont donné envie d’être un meilleur photographe. J’aime aussi Kubrick, Paul Thomas Anderson et Hitchcock, ceux qui ont repoussé les limites.
FC : Comment décririez-vous l’esthétique de vos œuvres ?
Je ne sais pas si je pourrai un jour répondre à cette question. Je vois les choses à ma façon et je ne peux pas faire autrement. Je pense que lorsqu’on expose des œuvres, c’est à l’artiste de poser cette question et c’est aux spectateurs ou au collectionneur de dire ce qu’ils en pensent.
FC : Parlez-nous de vos inspirations, comment vous procédez…
Mon inspiration vient de mes modèles. Par exemple, je me souviens qu’un jour un modèle avait une très longue langue alors j’ai fait pousser des orchidées pour aller avec la longueur de sa langue. Et puis il y avait un groupe de filles que je voulais prendre en photo ensemble, alors j’ai construit une mise en scène du Château de Versailles. Ou encore, des amis que j’ai présentés l’un à l’autre qui sont tombés amoureux au premier regard, je les ai pris en photo sous la pluie. J’adore piloter alors j’ai piloté un avion qui s’est posé dans un champ, et j’ai demandé à quelqu’un de courir à côté de l’avion comme un clin d’œil à Hitchcock, faire exploser une Rolls Royce, mettre le feu à une Birkin… Toutes ces choses qui me passaient par la tête, j’ai été assez fou pour leur donner vie. Quant au procédé, il est différent à chaque fois. J’ai passé plus de 8 mois sur la création du plus grand tirage platine-palladium du monde, alors que l’idée de l’avion n’était pas prévue et la photo a été prise sur-le-champ. Chaque photo a ses propres challenges et le plus excitant est de les relever tous d’une manière différente.
FC : Quel est le message que vous voulez faire passer à travers vos œuvres ?
Pour moi c’est un tour de magie. Si je vous dis ce à quoi je pense, cela va casser le mythe. J’ai toujours aimé poser des questions, converser avec les autres. L’art c’est la capacité de faire réagir les spectateurs, les amener à ressentir quelque chose. C’est quelque chose de spécial. Mais mon but ultime est de pouvoir exposer aux côtés de la Sainte Trinité. Je me souviens, lorsqu’ils ont exposé ma photo pour Sotheby à Londres, elle était à côté d’une photo de Richard Avedon. Je me suis dit que c’était un grand honneur, d’être le plus jeune artiste de la vente aux enchères et d’obtenir la place à côté de la fenêtre, aux côtés d’un des plus grands noms de la photographie. C’était stupéfiant. Je veux faire de grandes choses, de meilleures choses ; d’une certaine façon, j’ai l’impression de n’être qu’au début de l’aventure.
FC : Quels sont vos œuvres préférées ?
Lynching, Mouthful, Gator Birkin, Train Tracks, Under the Rain, Lion Queen, Let them Dance, Red Lips, Rolls Royce, Girl running from Plane, Batman, Orchid, Bunny II, Glitter Mouth, Pull, Butterfly, Girls on the Beach, Let them Eat Cake, Creation of Color, Burning Birkin, Kodak, Lace, Oven, Mystery in the mouth, Oven. Je pourrais continuer, mais je pense vraiment que c’est l’avis des spectateurs qui compte…
FC : Quels sont vos projets à venir ?
Je suis heureux d’annoncer la sortie d’une série appelée UNIQUE, qui sera une collection de tirages en 1/1. Il n’y aura qu’un seul tirage comme pour une peinture. Elle comprend la platine-palladium, des photogrammes et quelque chose de nouveau que j’ai créé et que personne n’a jamais vus auparavant, j’espère faire son lancement au plus tard cette année, et je ne crois pas avoir déjà été si excité par une série.
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