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Sophie Bienaimé, une amazone moderne

cheval
Sophie BIENAIMÉ

À la tête des écuries de Chantilly et du musée du Cheval au domaine de Chantilly, telle la déesse Épona, Sophie Bienaimé est la gardienne du temple. Mise en selle par son père, grand écuyer, elle prolonge la passion familiale pour les chevaux à travers des spectacles équestres et circassiens qui font salle comble sous le dôme de 28 mètres de hauteur classé Monument historique.

Un article issu du numéro 25 – hiver 2023, de Forbes France 

 

Peut-on dire que vous êtes née dans des bottes d’équitation ?

SOPHIE BIENAIMÉ : Oui, mon père, Yves Bienaimé, est le fondateur du Musée vivant du cheval de Chantilly. À l’origine, c’était un centre équestre qui était abrité par les écuries de Chantilly, où il était instructeur dans sa jeunesse. Plus tard, il a proposé à l’Institut de France de créer un musée du cheval dans les écuries pour faire connaître au public ce patrimoine incroyable. En 1982, il a inauguré le musée du Monde du cheval. J’avais quinze ans et je suis tombée amoureuse de ce lieu. C’était un musée de famille en quelque sorte.

 

Les Grandes Écuries et le musée font-ils partie du domaine de Chantilly ?

S.B. : Le domaine de Chantilly appartenait au duc d’Aumale. C’est devenu, selon ses souhaits, une fondation abritée par l’Institut de France qui a pour mission la gestion et le développement du château de Chantilly avec Anne Miller, l’administratrice du domaine, qui regroupe aujourd’hui le château de Chantilly, les Grandes Écuries ainsi que son parc immobilier. Il y a une quinzaine d’années, le prince Aga Khan a sauvé de la faillite le domaine qui périclitait, en créant une fondation qu’il finançait entièrement au profit de la restauration du lieu. En investissant, le prince a souhaité que le domaine devienne une destination touristique incontournable. Il fallait tout regrouper sous la même entité, et le musée a été rebaptisé le musée du Cheval de Chantilly. J’ai eu la chance de continuer l’aventure en tant que directrice équestre et artistique.

 

Comment définiriez-vous votre rôle au sein des écuries ?

S.B. : Le musée est géré par l’équipe de conservation du château et, de mon côté, je m’occupe des écuries, c’est-à-dire de la gestion du lieu et de la création des spectacles avec une équipe de neuf cavalières et de quatre palefreniers pour quarante chevaux. J’ai à cœur de faire perdurer ce haut lieu du cheval et aussi d’entretenir cet esprit familial.

 

Votre poste cumule deux métiers, directrice d’une des plus belles écuries françaises et créatrice de spectacle.

S.B. : Tout est lié. Mon objectif est d’avoir une équipe soudée, où chacun est à l’écoute de l’autre pour atteindre un objectif commun. Je m’assure aussi que chaque cavalière avec qui je travaille développe une relation forte avec le cheval qui lui est confié et qu’elle va garder très longtemps pour l’amener aussi loin que possible dans sa progression. J’évite l’ambiance de compétition où les cavaliers se battent pour obtenir le meilleur cheval.

 

Comment gérez-vous cela ?

S.B. : Chaque cavalière a son propre caractère. Avant de monter un spectacle, je demande à chacune ce qu’elle aimerait faire l’année prochaine avec son cheval : monter en amazone, en liberté sans liens physiques… Si elle fait ce qu’elle aime, elle dégagera une énergie qui sera profitable au spectacle. C’est un travail en amont où l’on échange beaucoup pour faire progresser la cavalière, mais également son cheval.

 

Comment obtenez-vous cette progression avec les chevaux ?

S.B. : Nous sommes beaucoup moins exigeants avec les chevaux qu’avec les humains. Là où un metteur en scène peut demander à des danseurs de répéter des heures, c’est impossible avec les chevaux : une répétition ne dure pas plus d’un quart d’heure. L’entraînement des chevaux se fait tout au long de l’année, en les sollicitant constamment, mais sur de très courtes durées. C’est ainsi qu’ils apprennent le mieux et qu’ils tiennent. C’est une question de bien-être animal. Dernièrement, avec un jeune cheval extrêmement craintif, on a fait venir un chuchoteur pour nous aider. On est toujours en train d’apprendre et c’est ce qui fait l’intérêt de ce métier. Mais ce qu’il faut retenir, c’est l’importance de définir un petit objectif avec l’animal à atteindre chaque jour.

 

Parallèlement, vous trouvez le temps d’inventer de nouveaux spectacles équestres.

S.B. : Un spectacle prend environ une année de travail. Nous travaillons toujours avec les mêmes personnes depuis vingt ans, c’est une équipe très familiale, avec ma sœur Virginie qui est la metteuse en scène. Elle a un immense talent. Nos événements artistiques marient en général l’élégance de la haute école équestre à d’autres formes d’expression artistique comme l’acrobatie ou la danse. Tout cela, avec une dimension poétique et historique qui nous est chère.

 

Quels sont vos prochains défis ?

S.B. : Nous voulons développer une sellerie avec des selles du monde entier pour montrer toutes les disciplines équestres, car chacune recèle une manière de monter spécifique. D’autre part, une société des Amis du musée du Cheval vient d’être créée pour améliorer la collection et développer des événements. Comme, par exemple, des soirées de mécénat, car nous recherchons des donateurs, mais aussi des journées comme notre troisième édition des ÉquiÉtudes, un forum international consacré au bien-être et à la bonne compréhension du cheval : sept conférences alternant science et terrain. Tout cela est suivi de trois présentations d’Alizée Froment, qui a participé à des compétitions internationales de dressage et qui travaille sur le bien-être du cheval. Nous sommes également très fiers d’avoir été invités pour un spectacle commun avec le Cadre noir de Saumur en avril dernier. C’est un honneur pour notre jeune compagnie équestre de participer à ce type d’événement qui réunit les pratiques académiques et circassiennes.

 

Quelle est votre actualité ?

S.B. : Cet été, il faut venir voir notre spectacle, Équinoxe, imaginé autour de la cérémonie de coucher de soleil avec des numéros saisissants entre voltigeurs, acrobates et écuyères qui célèbrent la magie de la nuit. Sans oublier les costumes signés Monika Mucha pour magnifier tout cela. Pour la petite histoire dans la grande histoire, chaque fois que le prince de Condé recevait une personnalité, on visitait les écuries en attelage en les traversant d’une porte à l’autre. Aussi, il organisait là-bas des dîners pour de grandes occasions comme la naissance d’une princesse. Bref, c’est un lieu emblématique qui ne cesse jamais de nous inspirer.

 


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