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« Moon Music » : Coldplay clôt la tournée la plus lucrative de l’histoire avec leur pire album

LAS VEGAS, NEVADA - SEPTEMBER 21: Chris Martin of Coldplay performs onstage at the 2024 iHeartRadio Music Festival at T-Mobile Arena on September 21, 2024 in Las Vegas, Nevada. (Photo by Jeff Kravitz/FilmMagic)

On pourrait croire que rien n’arrêtera Coldplay, lancé sans vergogne dans une guerre des étoiles commerciale. Music of The Sphere, le précédent album des quatre Anglais, a donné son nom à leur actuelle tournée, devenue en septembre la plus lucrative de l’histoire de la musique, en dépassant le milliard de recettes, et surtout le précédent record détenu par Taylor Swift. Coldplay finira sa tournée mondiale par dix dates à Wembley en septembre 2025 – encore un record volé à Swift. Un délire. 

Ce délire dit beaucoup de ce qu’est Coldplay, un ogre mercantile, qui a depuis longtemps joué dans les zones grises de la direction artistique et du marketing visuel. Le quatuor mené par Chris Martin a imposé dans les concerts de stade ses codes ostentatoires : des tenues bariolées jusqu’au clownesque, des canons qui tirent des milliers de papillons en papier, des bras de scène qui traversent la pelouse pour mieux se prolonger entre les spectateurs, des bracelets qui clignotent à l’unisson, introduits dès 2011 lors du Mylo Xyloto Tour, et qui ont essaimé jusqu’aux JO de Paris 2024. Et bien sûr, à l’heure de la crise écologique, le groupe assure que tout ceci est fait en réduisant au maximum son empreinte écologique. 

Car Coldplay s’est imposé, comme on dit, comme un groupe de stade qui aura produit des tubes interplanétaires, taillés pour être chantés par une communion de fans. Mais à quoi bon ? C’est bien ce qu’il reste en tête à l’écoute de leur dernier album Moon Music, sorti ce vendredi 4 octobre. Ne faisons pas semblant que tout va bien : Coldplay a mis en vente leur album le plus abouti dans l’insipide, le plus étoffé dans la médiocrité que leur discographie ait jamais compté. On pourrait presque saluer cette apothéose, entamée depuis, allez, soyons gentils, au moins 10 ans avec l’insignifiant Ghost Stories – même si déjà Mylo Xyloto en 2011 avait posé les premières bases de la dépravation esthétique des Britanniques. 

Le degré de catastrophe de Moon Music est sans doute insondable, mais confine au miracle : Coldplay a repris toutes les recettes des préfabriqués pop en poussant les potards de l’inacceptable à fond : des arrangements d’une niaiserie confondante, des voix de tête désincarnées, des boites à rythmes sans ambition, des cacophonies estampillées « world ». Qu’ils sont loin les temps bénis des mélodies psyché de Parachutes, et de la poésie mystique de Viva la Vida, or Death and all his friends. 

Il faut être sévère avec Coldplay car on ne peut pas admettre sans broncher que les derniers héritiers de la pop anglaise, que cette joyeuse petite bande d’artisans musicaux longtemps mis au même niveau que Buckley, Radiohead ou Oasis, soit devenue cette grande multinationale du potage sous vide qui ne cherche plus à fabriquer de la musique mais à faire hurler des stades industriels et leurs publics de chaînes de montage.

On pourra dire que là est le succès du groupe : c’est sans doute très faux. Puisqu’au fond, Coldplay n’a jamais autant vendu que du temps où il pondait des albums époustouflants de finesse et de mélancolie – ces dernières années, leurs récents albums n’ont même pas dépassé le million d’exemplaires vendus. Et les « vieux » disques, d’ailleurs, regorgeaient déjà de chansons intimistes qui pouvaient faire office de splendides hymnes à stade (« Clocks », « In my place » entre autres). 

Au fond, Coldplay a cru qu’en épousant les dynamiques de la musique des années 2010, ils pourraient s’imposer comme des rocks stars. La vérité est que leur succès réside dans leur habileté à avoir imposer leur empreinte sur la mise en scène des concerts mainstream. Mais surtout à avoir, pendant près de dix ans, pondu des disques à l’ambition musicale affirmée. Pas en suivant des diktats industriels. Car voilà le drame de Coldplay : ils finiront leur carrière en étant le groupe le plus bankable de l’histoire, tout en ayant produit le pire album de leur carrière. Une autre forme de délire. 

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