Imaginez les rives tranquilles du lac Léman en 1890. D’un côté, les sommets déchiquetés des Alpes, et de l’autre les petites villes de Lausanne, Vevey, et Montreux. Partout, des manoirs et des palaces poussent comme des champignons en face de paysages époustouflants. Le tourisme est florissant dans le pays, mais il y a peu de candidats à la gestion des hôtels.
Jacques Tschumi, directeur de l’hôtel Beau-Rivage de Lausanne, entre alors en scène et imagine une école hôtelière locale. La première promotion démarrera en 1893 avec 27 élèves.
Avançons maintenant jusqu’en 2018 : l’École Hôtelière de Lausanne accueille environ 3000 élèves sur son campus principal dans les collines verdoyantes des hauteurs de Lausanne. Une annexe de 60 000 mètres carrés est actuellement en construction pour la modique somme de 200 millions de dollars, avec logements, salle de sport, et restaurant, et un « hub innovation » séparé proposera un incubateur de start-up, un laboratoire d’expérimentation alimentaire, et des partenariats avec des leaders du secteur. L’école prévoit également d’ouvrir une antenne à Singapour.
« Aujourd’hui, le tourisme est en plein boom » explique Rémi Walbaum, directeur général de l’innovation et de la valorisation, « un hôtel ouvre tous les jours en Chine, et 104 nouveaux bateaux de croisière seront livrés dans les mois à venir».
La technologie a également révolutionné l’industrie du tourisme : entre TripAdvisor, Airbnb, et des sites comme Hotels.com, les voyageurs d’aujourd’hui ont un accès direct et n’ont plus forcément besoin d’interagir avec qui que ce soit avant d’arriver sur place. Cependant, qu’une expérience soit positive ou négative dépendra du facteur humain, et c’est là que l’EHL veut faire la différence.
Dans un monde où le présent et le passé semblent constamment se mêler, le défi est, pour M. Walbaum, « d’empêcher les étudiants de devenir obsolètes. Entre un cours et la remise de diplôme d’un élève, il peut s’écouler des années et le secteur peut avoir totalement évolué ».
Une façon de faire, explique-t-il, est d’encourager la curiosité : « nous ne nous contentons pas d’enseigner sans discussion, mais demandons au contraire aux étudiants de chercher des solutions sur Internet ou lors de travaux de groupe ».
Dans le foyer spacieux et lumineux de l’école, des groupes hétéroclites d’élèves (l’école comptait 115 nationalités cette année) tirés à quatre épingles travaillent sur leurs ordinateurs tout en participant à des débats animés.
« Nous voulons créer des managers capables d’une grande flexibilité intellectuelle et d’une grande empathie », indique M. Walbaum.
Un autre aspect-clé de l’EHL réside dans son mélange de cours pratiques et théoriques.
« Comment peut-on gérer une équipe en cuisine si l’on a jamais fait l’expérience du métier de plongeur ? » demande Philippe Gobet, le chef de l’école, qui gère plats et boissons. « Quels sont les problèmes rencontrés par les plongeurs ? L’eau est-elle suffisamment chaude ? Le savon est peut-être efficace, mais nuit-il à l’environnement ? ».
L’école gère Le Berceau des Sens, un restaurant d’application gastronomique (ouvert pendant l’année scolaire), où les élèves de première année préparent et cuisinent les plats, accueillent les clients, servent leurs plats et leur vin, et apprennent même à réaliser les plats les plus théâtraux (comme les crêpes Suzette) sous l’oeil vigilant de leurs professeurs. Tout est évidemment délicieux, mais il y a quelque chose d’émouvant à voir ces jeunes gens venus du monde entier apprendre avec enthousiasme en cuisine et en salle.
Une jeune élève grecque a mentionné vouloir ouvrir une chaîne d’hôtels, et une française a indiqué ne pas se voir continuer dans le secteur de l’hôtellerie, mais plutôt se diriger vers le monde de la finance.
Une fois leur diplôme en poche, 40 % des élèves restent dans le secteur, tandis que le reste part travailler dans la finance, la grande distribution, ou même le secteur de la santé.
Comme le dit Georgette Farkas, ancienne élève et restauratrice new-yorkaise, « L’EHL m’a appris la rigueur et la discipline, mais aussi la flexibilité. Il existe une bonne façon de faire les choses, mais cette façon diffère selon le contexte ».
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