Rechercher

Le Crazy Horse, Une Certaine Idée Du Féminisme

©Riccardo Tinelli

Quelle est la femme « Crazy Horse » aujourd’hui en 2019 ? Certainement plus femme-objet qui répondrait à l’injonction « sois belle et tais-toi ! ». « Complexe et décomplexée, libre et multi-facettes », la Crazy Girl 2.0 est une muse à la fois forte et avec ses fragilités, qu’elle choisit de montrer ou pas, selon Andréee Deissenberg, Directrice générale Création & Développement du Crazy Horse. Cette Franco-Américaine polyglotte a à cœur de « casser les idées reçues » et de dissiper les malentendus. Forbes vous emmène dans ce temple du glamour hexagonal qui fascine depuis bientôt soixante-dix ans. Leçon de féminité et de féminisme avec Andrée Deissenberg.

En 1951, Alain Bernardin, fondateur du mythique cabaret, idéalisait la femme selon ces critères : grande, belle cambrure et rapport jambes – buste : 2/3, 1/3… Des canons très physiques. Comment définir la femme Crazy Horse 2019 ?

La Crazy Girl 2019 est internationale et libre, indépendante, curieuse, fière, passionnée, bien dans sa peau. C’est une danseuse, artiste, actrice et sportive de haut niveau, une bête de scène avec un certain « je-ne-sais-quoi ». Elle croque la vie à pleines dents et aime profondément la scène du Crazy Horse, qui lui permet d’évoluer, de mieux se connaître et de se définir continuellement aussi bien sur le plan artistique qu’humain et féminin. Dans nos spectacles, nous avons gardé une certaine uniformité des corps pour magnifier l’effet visuel et scénographique du show, mais la personnalité de l’artiste est, de nos jours, et de loin, le critère de sélection le plus important.

Depuis l’onde de choc de l’affaire Harvey Weinstein, les mouvements de libération de la parole de la femme – illustrés par les phénomènes #MeToo ou #Time’s Up – ont polarisé les débats autour des problématiques sexistes et misogynes.  Comment le Crazy Horse, symbole universel d’une fabrique à fantasmes, a-t-il vécu de « l’intérieur » ce glissement sociétal ?

Aujourd’hui, le Crazy Horse est avant tout une histoire de femmes. La direction artistique et créative est assurée par une femme, le recrutement des artistes aussi, tout comme la gestion de la troupe au quotidien. Nos Crazy Girls sont aussi des jeunes femmes, qui vivent dans leur époque, sont concernées et font intégralement partie de ces mouvements de « female empowerment ». Elles amènent donc tout naturellement cette réflexion au sein du cabaret. Cela sans oublier le public, qui est très largement féminin. D’ailleurs sur les réseaux sociaux plus de 70% de nos followers sont des femmes.

La mise en scène astucieuse met les Crazy Girls en position de force et d’autodétermination. Les artistes sur notre scène s’épanouissent et s’approprient leur féminité. Elles se sentent sublimées. Ce ne sont pas des femmes-objets mais au contraire elles utilisent leur corps et leur jeu pour créer des émotions, explorer le pouvoir du féminin et jouer avec des fantasmes. Les spectacles du Crazy touchent et inspirent de nombreuses femmes, célèbres ou pas, qui nous le font savoir.

©Solve Sundsbo

Peut-on être à la fois showgirl au Crazy Horse et féministe ?

Absolument ! C’est le cas pour la grande majorité des femmes qui travaillent ici aussi bien sur le devant de la scène que derrière. La Crazy Girl est maître d’elle-même, c’est une femme qui s’assume entièrement. Nos danseuses disent souvent que ce n’est que sur cette scène qu’elles se sentent les plus puissantes et glorifiées dans leur féminité. Le Crazy opère comme un accélérateur, elles prennent conscience de leur pouvoir ; de filles, elles deviennent des femmes (plus) sûres d’elles.

Patricia Folly, directrice adjointe de création au Crazy Horse, conteste cette idée de « femme-objet ». Pourtant, la Crazy girl n’est-elle pas née selon les canons hétéronormatifs de son fondateur, Alain Bernardin ?

A l’origine, la signature artistique du Crazy Horse est issue de la tête de son fondateur Alain Bernardin. C’était en 1951. Il a été inspiré par les spectacles du mouvement burlesque américain, qu’il a remodelé et repensé à sa façon. Dès le départ, il a eu un souci esthétique exacerbé – qui semble naturel dans la Cctale de l’élégance et de la mode – pour sublimer l’éternel féminin en mettant en scène le corps tel un tableau ou une sculpture. Il y a environ 10-15 ans, le burlesque a connu un revival mondial, porté par les jeunes femmes, qui y ont trouvé une forme d’autodétermination et de liberté. La suite logique du mouvement néo-burlesque est le mouvement « Free the nipple » porté par des femmes telles que Cara Delevingne (grande fan du Crazy Horse !) ou encore Miley Cyrus.

Il en va de même avec le Crazy Horse, qui lui aussi, grâce aux femmes et à la création, a retrouvé un deuxième souffle. Au Crazy, le pouvoir est avec les femmes sur scène !

Que représente le Crazy Horse à vos yeux ?

Pour moi le Crazy Horse représente deux choses : d’un côté, la création, avec à son centre la femme puissante et confiante dans toute sa complexité et de l’autre, un spectacle unique, pétillant et étonnant, qui éveille toute sortes d’émotions et permet de passer un extraordinaire moment.

©Riccardo Tinelli ZoraMoon

Peut-on parler de vocation ? D’un rêve devenu réalité, lorsque l’on intègre la troupe du Crazy Horse ? 

Les artistes qui se présentent aux auditions du Crazy Horse ne le font pas de manière anodine. Elles ne veulent pas juste danser dans un cabaret mais souhaitent faire partie de cette signature artistique et créative, d’un spectacle qui les sublime en tant qu’artistes et leur permet d’évoluer sur tous les plans.

Quelles figures du Crazy Horse vous ont marquée, inspirée le plus ?

Ce sont surtout les artistes, aussi bien les Crazy Girls que les artistes de variété et maîtres de cérémonies à l’image de prestigieux guests comme Dita Von Teese, Arielle Dombasle et Conchita Wurst mais aussi Philippe Decouflé, Christian Louboutin, Ali Mahdavi… Tous les créateurs et « créatures » qui insufflent de la vie et un grain de folie sur la scène.

 Comment gère-t-on l’après-cabaret ?

Le Crazy Horse est très soucieux de préparer au mieux « l’après Crazy » de sa troupe. Nous conseillons et accompagnons les artistes, proposons des formations, nous adaptons les plannings pour faciliter les démarches de celles qui entament une reconversion, avant de quitter notre scène.

Avez-vous des exemples de danseuses ayant fait une incursion dans le monde entrepreneurial ou tout autre domaine ? 

Oui absolument ! La liste est longue ! Il y a, juste pour en citer quelques-unes, Aria Crescendo, qui s’est convertie au yoga et a depuis bâti une vraie entreprise de yoga avec plusieurs centres, dont un bel espace à Paris et des stages dans des lieux magiques à l’étranger. Elle a publié plusieurs livres, donné des cours online et a aujourd’hui plus 85,5K followers sur Instagram. Il y a aussi Bamby Splish Splash qui – tout en étant encore sur scène ! – a monté une petite entreprise de création et production de pin’s. Ou encore Neva Nevada qui a fait carrière dans l’immobilier et vient tout récemment de s’acheter sa propre agence d’immobilier tout en élevant seule ses trois enfants… La femme Crazy prend sa vie en main ! 

Une anecdote à partager ?

Il y a effectivement une histoire très amusante qui nous est arrivée en tournée à Londres et qui démontre qu’au Crazy tout est chic, même les incidents ! Nous présentions notre show « Forever Crazy » sous un magnifique chapiteau installé à South Bank, sur les rives de la Tamise, et une nuit, des renards se sont glissés sous le chapiteau et ont littéralement grignoté des chaussures du spectacle. Mais pas n’importe quelles chaussures, uniquement des Louboutin ! L’épisode était tellement croustillant que même l’Evening Standard en a parlé dans ses pages. Et heureusement d’ailleurs, car cet article nous a servi ensuite comme preuve pour les assurances…qui ne voulaient pas croire à cette mésaventure.

©Riccardo Tinelli MikaDo

Crazy Horse

12 avenue Georges V – 75008 PARIS

Réservation : Tél. 01 47 23 99 04

Nouveau Show exclusif : BIONIC SHOWGIRL Du 3 au 16 juin 2019

Viktoria Modesta, artiste futuriste aux multiples facettes, sera la première Guest Star bionique du Crazy Horse. Icone d’un genre nouveau, à la fois différente et stupéfiante, elle incarne sur cette scène mythique la femme du futur sublimée par la technologie le temps de 29 représentations exceptionnelles.

Bionic-Showgirl©Crazy Horse

Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook

Newsletter quotidienne Forbes

Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.

Abonnez-vous au magazine papier

et découvrez chaque trimestre :

1 an, 4 numéros : 30 € TTC au lieu de 36 € TTC