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Francesca Lavazza : « L’art nous permet d’exprimer les valeurs du groupe »

Francesca Lavazza, héritière des fondateurs du groupe éponyme au regard bleu marine, n’est pas seulement administratrice de la société, elle coordonne les activités artistiques et culturelles de Lavazza, qui jouent un rôle prépondérant dans l’image du groupe. Partenaire de plusieurs lieux et événements de la 58e Biennale de Venise, elle nous a accordé une interview exclusive entre deux vernissages dans la Sérénissime.

Comment et pourquoi occupez-vous cette fonction si particulière au sein du groupe Lavazza ?

FRANCESCA LAVAZZA : J’ai commencé mon parcours professionnel chez Lavazza au sein du service communication. La compagnie était sensible, depuis toujours, aux problématiques contemporaines. Au départ, j’étais concentrée sur le calendrier qui est l’instrument de communication le plus important de l’entreprise. Il a toujours été lié à l’art, notamment à la photographie puisqu’on demande aux artistes d’interpréter le café. Chaque année, nous choisissions des images du calendrier pour porter nos campagnes publicitaires à l’échelle internationale. De cette façon, les capitales européennes sont devenues des musées à ciel ouvert.

La France tient-elle une place à part dans vos campagnes ?

F.L. : La France a toujours eu un rôle central. À partir de 2002, nous avons travaillé avec David La Chapelle, ce qui a beaucoup changé notre approche puisqu’auparavant, nos calendriers étaient gratuits et en noir et blanc. Depuis vingt ans, ils sont en couleur. C’est un objet devenu iconique, qui compte beaucoup dans nos relations avec les médias.

Mais vos actions artistiques dépassent largement le calendrier aujourd’hui…

F.L. : À travers le projet du calendrier, nous avons développé une relation spécifique avec les artistes. L’art est un langage innovant et expérimental grâce auquel on arrive à s’adresser à des publics intéressants, notamment les jeunes. C’est un pont culturel pour faire connaître les valeurs de la marque, tout ce qui est derrière le produit. Au fur et à mesure, la culture est devenue un secteur stratégique pour le groupe qui a commencé à travailler sur des projets plus ambitieux. Nous avons soutenu l’art italien, notamment en nous associant au musée Guggenheim de New York où nous avons contribué à l’organisation de deux grandes expositions.

Ces activités sont-elles chapeautées par une fondation ?

F.L. : Non, c’est le groupe qui pilote tout cela directement. Moi-même, j’ai des activités artistiques au-delà du groupe puisque je fais partie du board du musée Guggenheim de New York et je préside le conseil d’administration du musée di Rivoli, à Turin.

Donc contrairement à certains grands groupes français qui développent leurs activités artistiques via des fondations, Lavazza ne bénéficie d’aucun avantage fiscal ?

F.L. : En effet. La fondation Lavazza, qui a été créée en 2004, gère des projets dans les domaines du développement durable et du social. Il arrive cependant que nos intérêts se rejoignent. Par exemple, la dernière expo que nous avons organisée au Guggenheim était dédiée à l’environnement. Nous savons que les nouvelles générations sont très sensibles au développement durable, à l’éthique et à l’authenticité qui font aussi partie de nos valeurs. Nous avons conscience qu’il faut dialoguer avec les jeunes autrement que par la télé, notamment via les réseaux sociaux, mais aussi via des lieux non conventionnels. Voilà pourquoi nous investissons dans le street art et le land art.

Le nouveau QG de Lavazza est lui-même pétri d’art. Pourquoi ?

F.L. : Nous avons voulu qu’il exprime nos valeurs d’authenticité, de tradition et d’innovation. Le design et la peinture nous aident à traduire cela visuellement.

Le street art caractérise-t-il, selon vous, l’art du XXIe siècle ?

F.L. : Non, il a commencé à percer dès le XXe siècle. En revanche, il est formidable pour communiquer sur le développement durable car de nombreux street artistes sont des activistes dans les secteurs qui nous intéressent, l’environnement, l’inclusion et la défense de la diversité.

Vous croyez à la percée des NFT et de l’art digital en général ?

F.L. : Ça n’est pas une révolution mais c’est une plateforme intéressante et un nouveau marché qui suscite de la curiosité. Je pense qu’il va s’inscrire dans la durée car il attire un nouveau public, celui du digital, du métavers, voire du spectacle et de la musique, qui consomme déjà beaucoup de culture digitale.

Êtes-vous collectionneuse ?

F.L. : Oui. Essentiellement des photos et de la sculpture, historiques et contemporaines. J’aime le mélange des styles et des langages. Je collectionne aussi les œuvres qui ont un lien avec le café ou les cafés. Ces derniers inspirent les artistes depuis très longtemps. C’est, pour moi, un plaisir et un investissement.

 

Saype, « ARTISTE LAVAZZA »

La grande marque italienne de café sponsorise un artiste de land art, le jeune Saype, dont le projet « Beyond walls » se déploie dans le monde entier. Au port de l’Arsenal, à Venise, il a exposé ses photos en vidéo pendant la 58e Biennale où l’on voit des mains jointes symbolisant la fraternité. C’est le « mur de Trump » érigé à la frontière américano-mexicaine qui avait donné à l’artiste l’idée de cette œuvre multiple qu’il implante sur tous les continents depuis 2019. « J’aimerais aller un jour à la frontière israélopalestinienne, explique-t-il, ce serait un message très fort. »

Le land artist franco-suisse se félicite chaque jour de sa collaboration avec Lavazza qui lui donne les moyens d’être audacieux. « Francesca est une femme exceptionnelle, dit-il, qui comprend parfaitement mon travail et me laisse beaucoup de liberté. » Saype, qui défend à la fois l’environnement, la diversité des peuples et le vivre-ensemble, sert, à sa manière, l’image du groupe sur toute la surface du globe. Ce qu’on appelle un partenariat « win-win ».

 

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