Dîner En Blanc Sur Un Pont Parisien, Reportage !

Qu’est-ce que le Dîner en Blanc ? Il s’agit d’une tradition de quelques Happy Few parisiens qui, il y a 29 ans, ont voulu organiser un pique-nique au Bois de Boulogne, et qui, depuis, ont chacun invité un peu plus de personnes dans des lieux plus prestigieux les uns que les autres (place des Vosges, Champ de Mars, les Invalides …).

Il y a eu jusqu’à 15 000 personnes réunies dans un lieu tenu secret jusqu’au dernier moment. En ces temps de plan Vigipirate, les pouvoirs publics continuent de tolérer cette pratique, car toujours organisée avec beaucoup de rigueur (lieu connu 1h avant le début de l’événement, nombre de participants et plan de table préétablis, à minuit tout le monde plie le camp en ramenant chez lui l’intégralité de ses déchets, le lieu est laissé dans le même état qu’en arrivant).

L’aventure a donc commencé il y a quelques semaines : un ami nous invite à être présents sur Paris le 8 juin au soir : réponse obligatoire et pas de désistement possible. En effet, les 7 « fondateurs » ont mis en place un système pyramidal : chacun a sous lui une dizaine de personnes qui ont elle-même la possibilité de déléguer à une dizaine de personnes. Au final, on est invité par le niveau 3 de la pyramide qui dispose lui-même d’une dizaine de tables. Les règles sont simples : table de 2 personnes, un couple, les hommes d’un côté les femmes de l’autre, tout est blanc et chic : les tenues, les nappes, assiettes et serviettes, les bougies pour l’éclairage tardif, les fleurs… Les mets sont raffinés : foie gras, champagne, saumon gravelax, macarons… Cette année, 6 800 personnes toutes de blanc vêtues se sont retrouvées dans le 5eme arrondissement, parmi lesquelles avocats, chefs d’entreprise, politiques.

A 18h le jour J, notre invitant nous convie pour 20h15, Boulevard Saint Germain. Les conjectures vont alors bon train sur le groupe Whatsapp créé pour l’occasion pour deviner le lieu final. Nous partons sous une chaleur estivale bienvenue, vêtus de blanc de la tête au pied,  avec nos victuailles dont nous avions préalablement partagés la confection ou l’acquisition via Fastplan (l’organisation virtuelle !), mais aussi notre table et nos chaises. Nous débarquons en taxi au lieu de RDV où une cinquantaine de personnes nous attendent dans les mêmes conditions, sous le regard amusé des badauds. Puis nous partons tous ensemble, en file indienne, sur les trottoirs parisiens jusqu’au lieu de rassemblement final. Nous traversons l’île de la Cité et nous arrêtons sur le pont d’Arcole. A 21h, tout le monde s’installe dans la bonne humeur et la décontraction sur les trottoirs du pont, le tout parfaitement orchestré, de nombreux convives n’en étant pas à leur première. Les bouchons de champagne commencent à sauter, et le tout se passe sans bruit, sans heurt, dans le respect mutuel. Le pont est alors encore ouvert à la circulation, et les badauds passent sur le mètre qui n’est pas utilisé. Une heure plus tard, le pont sera fermé à la circulation par la police et permettra une soirée sereine, aucun sentiment d’insécurité n’est venu effleurer ce bon moment de partage collectif dans le plus pur esprit libertaire français. Les nombreux bateaux passant sous le pont ont aussi participé à la fête surpris de voir tous ces gens en blanc sur le domaine public.

Après le dessert, nous avons eu la surprise de constater qu’il y avait autant de monde sur la Place de l’Hôtel de Ville, avec un petit groupe de musique qui nous a fait danser un moment. A minuit, le vent s’est levé, et dans le plus grand calme, tout le monde a sorti ses sacs, plié ses affaires et est reparti comme il était venu. A minuit trente, le lieu n’avait plus trace du passage des milliers de parisiens présents ce soir-là. Pour ma part, ce fût mon premier dîner sur un pont parisien, et j’en garderai un excellent souvenir de convivialité et respect. Vivement l’année prochaine, les organisateurs nous promettent un lieu inoubliable pour les 30 ans de l’événement, alors commencez à vous rapprocher d’amis invitants !