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À tables avec Forbes | Chez Lucas Carton, Hugo Bourny sublime nos cauchemars d’enfant

Hugo Bourny
Institution parisienne de la gastronomie, Lucas Carton accueille depuis 2021 un chef exceptionnel – mais qui a l’air de ne pas le savoir. Une cuisine aussi joliment moderne que le cadre est superbement classique. 
 
 
Il faut comprendre que les traumatismes gastronomiques de notre enfance reposent quasi exclusivement sur l’incapacité familiale à cuire autrement certains légumes qu’à l’eau ou en vapeur. Il faut donc saluer les chefs qui œuvrent dans la sublimation de ces dons du ciel, si mal aimés par les enfants aux palais mal éveillés.
 
C’est ainsi que Hugo Bourny (une étoile au Michelin) réhabilite auprès de nos papilles écœurées une très belle betterave, cuite longtemps et confite sur elle même accompagnée d’un jus à la baie de Manakara qui offre à cette racine terreuse des dimensions de pâte de fruit. On ne manquera pas de saluer non plus la courgette déclinée en textures multiples, accompagnée de fromage de chèvre et d’un jus au thé Matcha qui rappelle que cette courge mérite mieux que de l’eau bouillie et que c’est certainement quand elle est crue, qu’elle est la plus délicieuse. On apprécie de voir une cuisine si moderne dans cet écrin qu’est le restaurant Lucas Carton, établissement iconique de l’Art nouveau parisien, et table institutionnelle depuis pas loin de 150 ans.
 
HUGO BOURNY
 
Bourny l’explique lui-même : il aime sublimer des produits peu désirés. Outre la betterave et la courgette, le chef est vraiment époustouflant quand il vous mène vers son association de poireau et de dorades marinées dans un bouillon de citron gingembre et huile de vert de poireau absolument somptueuse, ou toutes les saveurs se répondent dans l’allégresse d’un cri d’enfant dans l’écho d’une falaise. 
 
 
Un oignon comme dans un œuf 
 
Le chef, qui a appris et développé son métier chez les reines de la discipline (Pic et Darroze, ça vous place un homme), sait aussi aller jouer du côté des saveurs plus marquées et est obsédé par le pas de côté : « J’essaye toujours de faire des choses que je n’ai jamais vues ailleurs. » Et c’est vrai qu’on n’avait jamais vu cet oignon confit avec purée de prunelle, présentée dans la peau de l’oignon, qu’on nous invite à manger à la petite cuillère comme un œuf à la coque. Une alliance sucrée-salée marquée, tout autant que le pigeon servi à ses côtés, avec huile de prunelle et feuilles de figuiers, prouvant que le chef qui joue du bout des doigts avec les légumes, sait taper fort au moment de sortir la viande. Bourny nous reprend quand on lâche dans la conversation que c’est un grand chef. Il a tort, et on est pas les seuls à le penser. 
 
Arrivé en début d’année, le chef pâtissier Sylvain Goujon s’est adapté au tempo de Bourny, mêlant surprise et efficacité : l’une symbolisé par un pré-dessert fait d’une mousse de bière et d’une tuile de pain grillé ; l’autre incarné par ce dessert qui mêle fruits rouges (mûres cassis) et le chocolat, qui varient du sorbet au crumble, et de la mousse à la sauce – une association étonnement classique mais d’une perfection tonitruante dans l’intensité et l’efficacité. 
 
 
Tout se passe en outre dans un décor splendide, surtout si vous aimez le XIXe siècle, et une vaisselle très heureuse – si vous aimez le XXIe. On a également rudement apprécié le choix des vins. Le service, très marqué palace dans l’esprit, ravira ceux qui sont fan de déférence ampoulée. Le chef passera saluer ses convives : ne manquez pas d’échanger avec lui, il est loquace et passionnant. 
 
L’avis de Forbes : exceptionnel. Un lieu qui ronronne de luxe passéiste héberge un chef moderne et d’une grande humilité, qui travaille ses produits avec la maestria et la dose de surprise nécessaire pour que tous les palais s’y amusent. 
 
 
Lucas Carton, 9 place de la Madeleine à Paris 
Menu en 4, 5 ou 7 services (120, 150, 200 euros)
 
Forbes a été invité par le restaurant pour essayer sa carte
 

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