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Unibail-Rodamco-Westfield : De L’Intérêt Des Activistes A L’Intérêt De L’Entreprise

Alors que la pandémie jette le monde économique dans de profondes turbulences, on observe une inflation inédite de conflits entre actionnaires. Pour ne citer que les dossiers les plus incandescents, ce sont Lagardère, dont la demande conjointe du fonds Amber Capital et Vivendi de convoquer une nouvelle assemblée générale a été rejetée le 14 octobre ; l’offre publique d’achat non sollicitée de Veolia sur Suez, puissamment défendue par le président du conseil d’administration d’Engie alors même qu’il n’est que président non exécutif ; enfin, l’âpre bataille qui oppose des actionnaires minoritaires aux dirigeants d’Unibail-Rodamco-Westfield, dont l’un des dénouements majeurs devrait se jouer lors de l’assemblée générale extraordinaire le 10 novembre prochain.

Le 15 octobre, un consortium d’actionnaires minoritaires conduit par Xavier Niel et Léon Bressler appelait au rejet du plan de désendettement d’Unibail-Rodamco-Westfield, présenté par Christophe Cuvillier le 16 septembre. Baptisé Reset, celui-ci prévoit notamment une augmentation de capital de 3,5 milliards d’euros à laquelle sont farouchement opposés les deux activistes, désormais actionnaires du groupe à hauteur de 5.01%.

Tout en opposant des moyens humains et financiers importants, cette contestation minoritaire frappe par la puissance et la rigueur de la communication déployée, dont le site « RefocusnotReset » est la figure de proue de cette campagne. 

D’une part, elle revendique la proposition d’une stratégie alternative à celle défendue par les dirigeants d’Unibail-Rodamco-Westfield et laisse penser que nous sommes en présence d’une dynamique de projet contre projet. D’autre part, le consortium manifeste la volonté d’incarner le conflit en discréditant la gouvernance et plus particulièrement le Président du directoire, Christophe Cuvillier. 

Cette campagne, lancée dans un contexte économique sans précédent marqué par la crise sanitaire, favorise insidieusement de nombreux amalgames, notamment concernant la dégradation du cours de bourse. Elle entretient ainsi la confusion entre les conséquences attribuées à l’acquisition de Westfield en 2018 – au demeurant soutenue par Léon Bressler, monté à 2% du capital en avril de la même année – et les répercussions désastreuses de la pandémie sur une industrie dépendante de la présence physique des consommateurs.

Cette tactique n’est pas sans bénéfice. En présentant le plan Refocus comme une seconde voie maitrisée et articulée, elle maquille l’absence de stratégie alternative réelle du consortium activiste. De manière évidente, l’unique ressort de cette campagne est de repousser une augmentation de capital de 3,5 milliards d’euros dont on sait qu’elle sera fortement dilutive pour les actionnaires, notamment pour Léon Bressler, financièrement investi dans le groupe depuis plusieurs années. 

Il est acquis que les activistes font de la gouvernance un volet désormais incontournable de leur incursion, parfois de manière virulente, comme ce fut par exemple le cas dans le dossier Thyssenkrupp, marqué par la démission de son Président du directoire Heinrich Hiesinger sous la pression des fonds Elliott Management et Cevian Capital. Les récentes tentatives de nomination au conseil de surveillance par Amber Capital lors de l’assemblée générale de Lagardère, le 5 mai dernier, illustrent cette évolution dans laquelle s’inscrit la demande de nomination de Xavier Niel, Léon Bressler et Susana Gallardo au conseil de surveillance par le consortium activiste. 

Or, si la critique de gouvernance peut se révéler parfois pertinente, elle n’en reste pas moins lourde de conséquences. Elle touche en effet l’émetteur dans « sa chair », le fragilise, le décrédibilise et ce, plus encore en temps de crise.

La question névralgique qui sera soumise le 10 novembre prochain aux actionnaires est simple : le plan Refocus préserve-t-il l’intérêt de tous les actionnaires ou cherche-t-il à satisfaire celui de quelques minoritaires – pour certains investis récemment ? On pourrait en effet soupçonner que ceux-ci escomptent un sursaut du cours de bourse, similaire à celui observé lorsqu’ils ont appelé les actionnaires d’Unibail-Rodamco-Westfield à voter contre le plan de désendettement, le 15 octobre.

En admettant que l’intérêt de quelques-uns coïncident avec celui de tous – ce qu’il serait souhaitable de démontrer pour convaincre – le plan Refocus préserve-t-il l’intérêt de l’entreprise ?

Rappelons que cet intérêt repose sur deux principes cardinaux, la pérennité de l’entreprise d’une part, la vision qui la garantit d’autre part. Il revient à la gouvernance de construire cette pérennité en maintenant la confiance des actionnaires, comprise comme un actif à part entière.

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