La communauté mondiale a adopté l’Accord de Paris sur le climat il y a six ans dans le but de réduire considérablement les émissions de carbone et de freiner le changement climatique. Pendant cette période, les 60 plus grandes banques du monde ont investi un montant stupéfiant de 5 500 milliards de dollars (5 000 milliards d’euros) dans l’industrie des combustibles fossiles. Qu’il s’agisse de l’extraction à ciel ouvert du charbon ou de la fracturation hydraulique du gaz naturel, ces investissements alimentent littéralement le feu de notre planète.
Il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Si les grandes banques sont un accélérateur nuisible de la crise climatique, elles peuvent réorienter ce même pouvoir financier pour soutenir des solutions climatiques qui restaurent notre planète et créent une économie plus durable. De nombreuses institutions financières l’ont reconnu en prenant des « engagements nets zéro », ce qui signifie que le solde de leur portefeuille contient des investissements qui séquestrent autant de carbone qu’ils en émettent. Toutefois, en l’absence de mécanisme d’application de leurs engagements, ces banques peuvent se livrer à un « écoblanchiment » : elles annoncent leur soutien à des initiatives environnementales mineures tout en continuant à financer l’extraction de combustibles fossiles et d’autres formes de dégradation de l’environnement.
Pour que les banques se joignent véritablement à la lutte contre le changement climatique, elles doivent prendre trois mesures essentielles : se désinvestir des combustibles fossiles, investir dans les énergies renouvelables et rendre leur propre infrastructure physique durable. Il est vrai que la mise en œuvre de ces changements coûtera de l’argent. Mais, à long terme, ces décisions entraîneront la transformation nécessaire pour ralentir le changement climatique, aider les communautés à s’adapter et construire une économie plus durable pour tous.
Revoir ses engagements
La première étape, la plus essentielle, consiste à se désengager de l’extraction des combustibles fossiles. Lorsque les projets et les entreprises qui extraient des combustibles fossiles ne peuvent pas obtenir de financement, ces combustibles fossiles restent dans le sol, ce qui minimise les émissions. Toutefois, le désinvestissement des combustibles fossiles ne suffit pas si une banque finance d’autres projets ayant un impact important sur l’environnement.
Le Partnership for Carbon Accounting Financials (PCAF) propose une méthodologie pour mesurer l’empreinte carbone globale de tout investissement afin que les institutions financières puissent obtenir un portefeuille qui soit réellement net zéro. (La Beneficial State Bank a contribué à la création d’un PCAF pour les institutions financières américaines et canadiennes). Cela va au-delà de l’impact environnemental direct de chaque entreprise et inclut les émissions de l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement. Cela signifie qu’une banque doit non seulement réduire ses investissements dans l’extraction des combustibles fossiles, mais aussi cesser de financer les entreprises nuisibles à l’environnement.
Prenons l’exemple d’Apple, qui s’est récemment engagé à décarboniser sa chaîne d’approvisionnement, s’attaquant ainsi non seulement aux « émissions directes » (telles que l’empreinte carbone de la construction d’une nouvelle usine Apple), mais aussi aux « émissions indirectes ». Les émissions indirectes couvrent l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, y compris les matériaux incorporés dans les appareils vendus, les émissions des usines fabriquant leurs produits, les frais de transport associés à l’acheminement des appareils vers un magasin, les émissions de ces appareils au cours de leur durée de vie et le traitement en fin de vie des produits vendus.
Financer les énergies renouvelables
Au-delà de la suppression des investissements dans les industries nocives, les banques peuvent utiliser leur pouvoir financier pour stimuler l’innovation dans les énergies propres et financer une transformation environnementale. Les projets d’énergie solaire, éolienne et d’autres énergies renouvelables réclament des capitaux dans tout le pays, à une échelle jamais atteinte depuis la construction du réseau autoroutier inter-États il y a 70 ans. Les Américains dépendent d’un réseau électrique obsolète, alimenté par des combustibles fossiles, qui a besoin d’être massivement révisé et adapté au XXIe siècle.
Le moment n’a jamais été aussi propice pour investir dans des centrales à énergie propre et des infrastructures vertes. D’ici à 2030, la loi sur la réduction de l’inflation déploiera aux États-Unis des milliards de dollars d’incitations aux investissements dans les énergies propres afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % par rapport aux niveaux de 2005. Ces nouvelles mesures incitatives du secteur public entraîneront une transformation spectaculaire du marché, mais le secteur financier doit coopérer pour réaliser ce formidable potentiel. Les nouveaux prêteurs peuvent conclure des accords de participation avec des banques expérimentées qui ont été des pionniers dans ce domaine. Nous pouvons financer une transition vers l’énergie verte, mais nous devons tous travailler ensemble.
Rendre l’infrastructure physique plus durable et plus résistante au climat
Dans tout le pays, les bâtiments des banques sont une déclaration significative des valeurs de l’institution. Les banques du début du XXe siècle, conçues dans un style classique, étaient censées être des centres communautaires dont l’architecture à elle seule était synonyme de force et d’intégrité. Plus tard dans le siècle, les banques ont commencé à donner la priorité à l’expérience des titulaires de comptes, en s’installant dans des bâtiments aux couleurs vives, aux enseignes accueillantes et aux halls d’entrée baignés de soleil et dotés de grandes baies vitrées. La banque du milieu du XXIe siècle devrait mettre l’accent sur l’architecture climatique, en travaillant dans des bâtiments durables qui reflètent les valeurs de l’institution qu’ils abritent.
La succursale de la Beneficial State Bank à Seattle est située dans le Bullitt Center, qui est considéré comme l’un des bâtiments commerciaux les plus écologiques au monde, mais les banques n’ont pas besoin de s’installer dans des bâtiments ultra-écologiques pour faire la différence. En fait, la construction de nouveaux bâtiments a une énorme empreinte environnementale.
Au lieu d’investir dans une nouvelle construction, les banques peuvent envisager de rénover une structure plus ancienne pour la rendre plus écologique et la faire entrer dans le XXIe siècle. Celles qui n’ont pas l’intention de construire de nouvelles succursales peuvent envisager des installations de chauffage et de refroidissement plus efficaces sur le plan énergétique, telles que des pompes à chaleur, afin de réduire les émissions tout en se préparant à un avenir électrifié.
La modernisation des structures existantes avec des technologies d’énergie renouvelable permet également aux banques de contribuer positivement à des solutions durables. Par exemple, plus de 4 700 panneaux solaires ont été installés sur les toits d’entrepôts réaffectés sur le campus AltaSea du port de Los Angeles à San Pedro, où se trouve notre tout nouveau bureau de production de prêts. Ces panneaux produisent suffisamment d’énergie pour alimenter l’ensemble du campus ainsi que 700 résidences situées à proximité.
Enfin, les banques peuvent réduire leur empreinte physique en offrant certains services virtuels, le cas échéant. Les services virtuels peuvent contribuer à réduire les émissions dues aux déplacements et, dans certains cas, justifier une réduction de l’espace de bureau. Bien entendu, certains lieux physiques sont essentiels pour les personnes qui n’ont pas facilement accès aux services numériques, et l’aspect personnel permet de renforcer la confiance des clients, en particulier dans les zones sous-bancarisées.
Les institutions financières peuvent faire partie de la solution pour un avenir plus durable, tant sur le plan environnemental que financier. Si chaque banque commençait à prendre des mesures, même modestes, pour lutter contre le changement climatique, les bénéfices seraient considérables. Il est temps d’agir.
Article traduit de Forbes US – Auteure : Monique Johnson (La première vice-présidente de la Beneficial State Bank, directrice des partenariats avec les clients et les communautés)
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