Le monde ne tourne plus tout à fait rond, ni dans l’ordre politique, ni dans l’ordre économique des choses.
Les règles anciennes ne se vérifient plus : la création de masse monétaire ne déclenche pas d’inflation, la baisse du coût des matières premières ne suscite pas de croissance.
Et les taux d’intérêt, arrivés à un niveau historiquement bas, ne déclenchent pas une vague notable d’investissements, si ce n’est de la part des ménages dans l’accès à la propriété de leur logement.Les Etats dispendieux en revanche, y voient l’occasion de poursuivre leur endettement plutôt que de procéder à des réformes structurelles. Et les financiers s’interrogent sur les rendements appropriés à servir dans un contexte sur lequel pèsent les nombreuses incertitudes géopolitiques et les poudrières sociales du monde.
Dans cette situation inédite, l’assurance est elle-même questionnée sur deux points : dans sa capacité à servir dans la durée des rendements satisfaisants aux épargnants et dans son rôle de financeur optimal de l’économie à long terme.
Commençons par le premier point, celui du rendement pour les épargnants.
Les taux d’intérêts des contrats d’assurance-vie en euros sont en baisse depuis plusieurs années, s’établissant en 2015 à 2,3% en moyenne. Ce faisant, ils restent très attractifs par rapport à la plupart des autres instruments d’épargne, en servant des rendements supérieurs à l’inflation comme aux autres placements financiers liquides et sans risques (Livret A, LDD). Le seraient-ils même trop ? À cette question qui interroge les politiques prudentielles des entreprises du secteur, une réponse de place est en train d’être apportée avec la mise en place d’une provision pour rendements futurs destinée à lisser dans la durée les rendements servis aux assurés, afin de pouvoir faire face à toutes les situations de marché. Et ce notamment si les taux venaient à remonter : on sait qu’une hausse rapide des taux a toujours été le principal risque pour les assureurs-vie, même aux époques où les taux étaient à des niveaux bien plus élevés. Ce risque doit être pris en compte aujourd’hui, notamment dans le contexte post élection de Donald Trump, tout en étant lucide sur le fait que dans un scénario de hausse rapide des taux, c’est la rapidité qui fait problème, pas la tendance.
La seconde interrogation concerne l’allocation d’actifs des assureurs Français, dont on rappellera que la grande majorité de leurs 1600 milliards de placements sont dans des actions et des obligations d’entreprises, l’essentiel du solde restant servant à financer la dette publique dont les assureurs sont les premiers détenteurs.
Les entreprises du secteur ne demandent pas mieux que de pouvoir accroître leur part d’investissement en infrastructure ou en actifs d’entreprises de toutes tailles, des PME aux grandes, pourvu qu’elles soient ambitieuses. Les opportunités ne manquent pas, de la transition énergétique à la révolution numérique. Et quoi de plus logique pour un pays que de financer des dépenses d’infrastructures qui lui profiteront à l’avenir, quand les taux d’intérêt sont au plus bas ? Encore faut-il que la régulation prudentielle le permette, c’est à dire qu’elle soit tournée vers le long terme et non court-termiste. Après plusieurs années de discussions avec la Commission Européenne, celle-ci a fini par concéder en avril dernier que dans Solvabilité 2, les exigences en capital de la dette infrastructure soient réduites de 30%. C’est un progrès qu’il importe de saluer mais qu’il faut étendre aux investissements de toute nature dans les entreprises.
Pour investir sur le long terme, les conditions réglementaires sont en effet stratégiques.
C’est vrai à Bruxelles comme à Paris. En France, les assureurs et les pouvoirs publics ont ainsi travaillé pour permettre la création de fonds qui ont permis de porter à plus de 50 milliards l’allocation d’actifs dans les PME avec à la clé du premier de ces fonds, Novo, le succès d’entreprises comme Altrad. C’est ce même travail de coopération qui a été engagé pour favoriser la création des contrats Eurocroissance en assurance vie. Ils permettront quand les dernières adaptations réglementaires attendues seront prises, tout en assurant la sécurité de l’épargne – le capital investi est garanti au terme d’au moins 8 ans-de se projeter sur la durée, de réduire les coûts en fonds propres, de mieux diversifier les classes d’actifs et de servir des rendements dynamiques aux épargnants. Autre illustration de cette capacité pour l’industrie à créer des marges de manœuvre sans prise de risque pour l’épargnant, les Fonds de retraite professionnelle supplémentaire créés par la Loi Sapin II début novembre, qui sont aussi des supports d’investissements sur le long terme au bénéfice de tous : salariés, retraités, investisseurs…etc.
Qu’attend-on finalement d’une régulation, en dehors de la sécurité qu’elle doit légitimement offrir aux épargnants ?
Qu’elle favorise – et donc qu’elle récompense- l’engagement sur le long terme et la prise de risque. Nous sommes là au cœur du rôle fondamental de l’assurance-vie dans la modernisation de l’économie française et la valorisation de nos atouts en matière d’innovation, de mode de vie et de savoir-faire. Adopter un comportement permettant de diversifier les actifs et de donner du temps aux investissements pour qu’ils puissent créer durablement de la richesse et de l’emploi, c’est au fond répondre au double défi économique et politique du monde actuel.
C’est aussi contribuer à relancer un nouveau cycle porteur, en suscitant ces deux moteurs indissociables que sont la croissance et la confiance.
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