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Les Crypto-Monnaies Peuvent-Elles Résister A Des Evénements Extrêmes ?

Les grandes devises fiduciaires ont de nouveaux concurrents, les crypto-monnaies. Mais quelle est la capacité de ces dernières à résister à des événements extrêmes ?

 

L’été a vu le réveil inopiné de l’or, la « relique barbare » selon Keynes, mais surtout l’envol phénoménal des crypto-monnaies : bitcoin, ethereum, litecoin et plus de 900 autres systèmes de transactions échappant aux contrôles des gouvernements et des Etats.

 

Evolution comparée en dollar depuis le 1er juillet

 

Cours au 13 juillet 2017

Cours au 30 août 2017

Evolution depuis 2 mois

Once d’or

1 229,25

1 310,60

6,6%

Once d’argent

16,48

17,44

5,8%

Bitcoin

2 386

4 610

93,2%

Ethereum

256

381

48,8%

 

Le réveil de l’or et l’essor vertigineux des crypto-monnaies seraient-ils des signes avant-coureurs que l’argent commence à fuir les marchés financiers pour se réfugier à l’abri ?

En cette fin d’été 2017, dix ans après la grande crise financière, le constat est clair : toujours plus de dettes, une croissance atone dans les pays développés, de gigantesques bulles sur les marchés actions, obligataires et immobiliers dans plusieurs grandes villes autour du monde.

 

  • L’endettement mondial vient d’atteindre 217 000 Mds de $ alors qu’il n’était que de 142 000 Mds de $ il y a dix ans. Dans ces seuls derniers 12 mois, la dette américaine a augmenté de 2 000 Mds de $ 
  • 3 $ ou 3 € de dette publique achète misérablement 1 $ ou 1 € de PIB supplémentaire

 

  • Le shadow banking, la finance pratiquée hors des établissements bancaires, atteint 100 000 Mds$ alors que ce phénomène ne pesait en 2007 « que » 50 000 Mds de $ 

 

  • Dans le même temps, le Dow Jones a triplé depuis son point bas de 2009. L’indice Nasdaq, lui, a quadruplé. Les actions des entreprises se payent à des prix exorbitants au regard de leurs bénéfices 

 

  • Les revenus des ménages stagnent comme les salaires.

 

La réalité est autre que dans les livres

 

Les banques centrales sont empêtrées dans leurs contradictions. Tous les manuels des banquiers centraux keynésiens indiquaient qu’il fallait baisser les taux pour lutter contre les effets néfastes de la crise de 2008.

Les résultats constatés sont médiocres. Il faudrait maintenant profiter d’une courte embellie économique pour les remonter et arrêter la multiplication infinie du crédit quasi-gratuit. Mais ce faisant, les banquiers centraux risquent de provoquer l’éclatement des bulles qu’ils ont laissées gonfler.

Monsieur Le Marché flaire cela et la volatilité est de retour. La volatilité est le jargon des professionnels pour indiquer une hésitation dans la baisse des valorisations. Vous remarquerez qu’on ne parle jamais de volatilité lorsque les marchés financiers montent mais toujours lorsqu’ils baissent !

Lorsque les premiers intervenants vont vouloir se diriger vers la sortie, ils disposeront de quatre portes possibles : le cash, les bons du Trésor US, l’or et les crypto-monnaies.

 

Le cash est condamné. Ce n’est pas une solution pour investisseurs professionnels, sauf quelques rares cas isolés.

« Renoncer aux frais de gestion, aux honoraires sur performances et rendre les fonds des investissements que nous gérons est une décision charnière. Toutefois, la préservation des actifs de ses clients doit être la priorité des gérants  avant leurs propres intérêts.

[…]

Nous pensons qu’il y a trop de risques sur ces marchés en ce moment. Nous pensons qu’ils sont fous. »

Philip Parker, président de la société de gestion Altair, mai 2017.

 

Philip Parker a trente ans d’expérience sur les marchés. Ce fonds australien a liquidé ses positions et rendu l’argent déposé par ses clients.

Mais Philip Parker, tout comme les gérants obligataires démissionnaires de Pimco, le plus gros fonds au monde, Bill Gross et Mohammed El Erian, sont de très rares exceptions.

 

Sortir, mais par quelle porte ?

 

Les professionnels aguerris ont en réalité le choix entre trois autres sorties.

  • Le bon du Trésor US est un grand classique. Les rendements baissent depuis deux mois. Ce qui indique que le nombre d’amateurs a augmenté. Le titre valait en juillet 2,86%. Il vient de passer à 2,77%. Peut-être que certains investisseurs se dirigent vers cette porte. Mais pas encore de bousculade.

 

Actuellement, l’or et les crypto-monnaies attirent. Evidemment, ces portes n’ont pas les mêmes dimensions et sont beaucoup plus étroites que celle des bons du Trésor, qui nous l’avons vu, s’élargit de 2 000 Mds de $ par an et pèse 20 000 Mds de $.

L’or est un marché à 8 000 Mds de $ en évaluant les stocks d’or existants à 1 300 $ l’once.

La capitalisation des crypto-monnaies affiche un montant de l’ordre de 150 Mds de $. Pour que ces monnaies immatérielles pèsent autant que l’or, il faudrait qu’elles attirent 53 fois plus de liquidités.

C’est faisable car ces monnaies sont très jeunes.

Mais cette jeunesse est aussi un handicap…

 

Les cryptomonnaies doivent prouver qu’elles sont antifragiles

 

Le cimetière des monnaies fiduciaires est bien garni : les mortes par guerre, hyperinflation, effondrement d’empires, les peuplent. Parmi 775 monnaies fiduciaires ayant existé ou encore existantes, 599 sont mortes.

A l’opposé, de crises en crises, depuis des millénaires, l’or est devenu « antifragile » selon la terminologie de Nassim Taleb. Les crises passent, l’or reste.  Tel le staphylocoque doré, immunisé aux antibiotiques, tapi dans les hôpitaux… un sujet un peu faible et le voilà qui repasse à l’attaque !

Lundi 4 septembre au matin, après le sixième essai nucléaire de la Corée du nord dimanche 3 septembre à 3h30 GMT, alors que les unes sinistres se multipliaient, presque toutes les crypto-monnaies s’affichaient dans le rouge…

L’or, lui, s’adjugeait à +1%.

 

evolution crypto monnaies Or septembre 2017 graphe simone wapler

 

Evolution des crypto-monnaies le 4 septembre au matin : dans le rouge

 

Evolution de l’or le 4 septembre au matin : dans le vert

OR evolution cours graphe gold

 

Comme l’or, les crypto-monnaies ne peuvent être multipliées à l’infini. Mais, contrairement à l’or, elles ont besoin de réseaux de télécommunication pour exister. Or, dans de nombreux pays ces réseaux sont contrôlés par les gouvernements et seraient vulnérables en cas de guerre.

Il va falloir que les crypto-monnaies traversent quelques crises avant de pouvoir conclure à leur caractère antifragile. Mais j’espère bien qu’elles n’auront pas à affronter « le feu et la fureur » si jeunes, les pauvrettes !

 

Simone Wapler

 

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