Politique | Si le risque de voir les taux d’intérêts s’envoler en cas de dégradation est nul, cela donnerait du grain à moudre aux oppositions pour tacler la politique de l’exécutif.
C’est une petite musique qui revient à intervalle régulier dans le débat public. Le gouvernement craint une dégradation de sa note auprès des agences Fitch et Moody’s, qui rendront leur verdict, ce vendredi 26 avril. Une première salve avant Standard and Poor fin mai. « Hélas, les mauvaises surprises sur les recettes rendent ce risque plus important », commente auprès de Forbes France, Jean-René Cazeneuve, député Renaissance et rapporteur général de la Commission des finances de l’Assemblée nationale. En raison de recettes inférieures aux montants escomptés, le déficit public s’est élevé à 5,5% du PIB contre 4,9% initialement prévu.
« Il n’y pas de fatalisme sur le sujet de la dégradation, souligne néanmoins Antoine Armand, porte-parole de Renaissance à la Chambre basse. Il y a beaucoup d’énergie mise en place pour l’éviter. Le ministre de l’Economie se bat en interne pour réduire les dépenses ». Dans son nouveau pacte de stabilité, présenté début avril, Bercy a annoncé dix milliards d’euros d’économie supplémentaires, après avoir déjà entériné 10 milliards d’euros d’annulation de crédits en février. L’exécutif prévoit également un retour du déficit public sous les 3% en 2027.
Une différence minime
Une trajectoire jugée « de plus en plus hors de portée » par Fitch. L’agence de notation, qui a déjà abaissé la note souveraine de la France en avril 2023, ne devrait pas récidiver. Du moins pas cette fois. Tous les regards sont donc portés vers Moody’s qui n’a pas écarté la possibilité d’une dégradation. « Cela conduirait à une augmentation des taux d’intérêt auxquels la France emprunte de l’argent, donc in fine à une nouvelle dégradation des comptes publics », signale Antoine Armand. Cet argument est régulièrement avancé par les membres du gouvernement pour justifier la crainte d’un abaissement de la note du pays et la nécessité de réduire le déficit public.
Les évaluations des agences servent à fournir des informations aux investisseurs. Ces derniers seraient-ils plus enclins à prêter à moindre coût lorsque la note d’un pays est élevée, et inversement ? En théorie, oui. Dans la réalité, la corrélation entre ces deux caractéristiques n’est pas vraiment établie. L’exemple du Japon est le plus marquant. Pendant plusieurs années, le pays noté A (soit deux crans en dessous de la France), a vu son taux d’endettement diminué, jusqu’à passer en territoire négatif. Autre exemple, la France n’a pas davantage souffert, lorsque Standard & Poor’s lui a retiré son triple A en 2012. Si bien que les analystes de la banque d’investissement UBS calculent qu’une dégradation de la note française renchérirait les taux d’intérêts de 0,05 à 0,07% (par rapport au niveau des emprunts allemands).
Pression de la part des oppositions
Reste que si l’argument d’une sanction économique ne tient pas, une mauvaise nouvelle serait synonyme de camouflet pour le gouvernement. Les oppositions auraient alors carte blanche pour remettre en question la politique de l’exécutif. « S’il y a une dégradation, le principal danger viendrait des oppositions », estime un proche du ministre de l’Économie dans les colonnes du Parisien.
Pour les Républicains, cela serait une nouvelle occasion de fustiger la « gestion calamiteuse des finances publiques ». Eux, qui viennent d’annoncer la création d’une commission d’enquête sur « les raisons de la très forte croissance de la dette française sous la présidence d’Emmanuel Macron et ses conséquences sur le pouvoir d’achat des Français ». Le gouvernement souhaite éviter toute pression supplémentaire dans son objectif de réduction de dépenses, alors que les réformes attendues font déjà preuve d’impopularité.
A l’inverse, la gauche pourrait s’en servir pour agiter la nécessité d’une hausse de la fiscalité sur les plus grosses fortunes et entreprises. Ce à quoi, le gouvernement s’est toujours refusé. En clair, la décision des agences donne des sueurs froides à l’exécutif, et pas pour les raisons avancées.
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