L’hypothèse de la stagnation séculaire a été formulée dans les années 40 par Hansen (1939) qui s’inquiétait de la faiblesse de la croissance économique américaine en raison d’un fléchissement de l’investissement mais aussi de la dynamique démographique. Elle est définie comme un régime économique de croissance restreinte et de sous-emploi auxquels s’ajoute une inflation limitée et un taux d’intérêt d’équilibre (« naturel ») faible.
Cette théorie a connu un regain d’engouement après la crise des subprimes pour qualifier la situation des pays développés, notamment celle des Etats-Unis où la croissance devrait avoisiner seulement 2% sur la période [2010-2016]. Dans le même temps, le rythme de progression des salaires n’a jamais excédé 3% en rythme annuel et l’inflation est restée contenue, majoritairement sous le seuil de 2% (qui constitue l’objectif de la Réserve Fédérale Américaine). L’absence de rebond significatif des perspectives économiques ces dernières années (assez commune à toutes les sorties de crises financières) a conduit beaucoup d’économistes à déclarer l’avènement d’une nouvelle norme censée perdurer sur le long terme.
Cependant la récente accélération de l’activité économique au troisième trimestre, le rebond des bénéfices des entreprises du S&P (après cinq trimestres consécutifs de contraction en rythme annuel) et les attentes autour du programme économique de Donald Trump constituent un premier revers à la théorie de la « stagnation séculaire ». En effet, même si plusieurs facteurs vont continuer de peser négativement sur la croissance à l’image du ralentissement de l’accroissement de la population active ou encore celui de la productivité du travail, d’autres, au contraire, vont avoir un effet bénéfique.
« Contrechoc positif » en 2017
L’année 2016 aura été marquée par les incertitudes politiques autour du Brexit mais surtout par les élections présidentielles américaines qui, dans un contexte de repli des profits [T2 2015-T2 2016] et de fléchissement de la croissance mondiale [3,0% attendu en 2016 vs 3,2% en 2015], ont contraint les entreprises à restreindre leurs projets d’investissement. Cependant, le rebond des prix du pétrole (favorable au secteur de l’exploration et de la production minière), l’amélioration des résultats des sociétés au second semestre 2016, la réaction positive des marchés financiers à l’élection de Donald Trump et l’embellie des perspectives mondiales [3,3% attendu pour 2017] devraient se traduire par un contre choc positif en 2017. Ce scénario est d’autant plus probable que le programme économique du président élu est expansionniste.
Dès la première partie de l’année, ce dernier est susceptible de lancer une vague de dérégulation dans le secteur bancaire de manière à soutenir le crédit. En parallèle, il pourrait introduire un stimulus fiscal visant à réduire les impôts des entreprises mais aussi des ménages (potentiellement avec un effet rétroactif). La croissance devrait également être dopée par la hausse des dépenses d’infrastructures qui pourrait avoir lieu dès la deuxième partie de l’année 2017 (ou début 2018). Ainsi, le PIB pourrait flirter avec les 3% tandis que le marché de l’emploi renouerait avec l’équilibre (positif pour les salaires) et l’inflation excéderait enfin les 2%.
Lourdes conséquences pour les gestionnaires d’actifs
Cette hypothèse a d’ailleurs été en partie prise en compte par les membres de la Réserve Fédérale américaine lors de la dernière réunion de politique monétaire de l’année (14 décembre). 11 des 17 membres du comité s’attendent désormais à trois hausses de taux ou plus en 2017 (contre seulement 7 en septembre). Plus intéressant encore, depuis que la Fed publie ses anticipations de taux directeurs (2012), c’est la première fois que l’estimation médiane relative au taux d’intérêt d’équilibre (long terme) a été ajustée à la hausse passant de 2,9% à 3,0%.
Dans ce contexte, la croyance bien installée d’un nouveau monde où les taux d’intérêt seraient voués à rester bas s’effrite peu à peu en cette fin d’année, et pourrait bien disparaitre si le taux à 10 ans américain poursuit sa progression au-delà de 3%. Ce retour progressif à la normale aura de lourdes conséquences pour les gestionnaires d’actifs qui seront peu à peu amenés à réduire la proportion d’obligations dans leurs portefeuilles, potentiellement au bénéfice des actions.
Source : HANSEN A. (1939), « Economic Progress and Declining Population Growth », American Economic Review, Vol. 29 (1), pp. 1-15.
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