Trente ans presque jour pour jour après le krach d’octobre 1987, où Wall Street encaissait une chute vertigineuse de 22,6%, les craintes d’une crise financière sont de retour.
Alors que nous retrouvons enfin un peu d’optimisme à propos de l’économie mondiale, plusieurs risques pourraient déclencher un nouveau choc.« Après plusieurs années de croissance décevante, l’économie mondiale a commencé à accélérer », a indiqué la semaine dernière Jim Yong Kim, président de la Banque mondiale. Dix ans après la crise des subprimes, l’économie mondiale entame sa reprise. La croissance mondiale reprend une allure perdue depuis 2011 et devrait passer de 3,2% en 2016 à 3,6% en 2017 et 3,7% en 2018 (d’après les estimations du FMI). L’investissement se renforce et les chefs d’entreprises et consommateurs retrouvent confiance. Les indices boursiers sont, pour beaucoup, à leur plus haut historique. Pour autant la reprise n’est pas acquise et plusieurs risques pourraient déclencher une nouvelle crise financière. Alors n’oublions pas que les crises reviennent régulièrement et que cela fait déjà cinq ans que le monde n’en a pas connu.
Le danger de nouvelles bulles
Dans cette période d’accalmie et de reprise conjoncturelle de la croissance, plusieurs risques font craindre une prochaine crise financière. Si l’on observe les crises de 1929 et de 2007, on retrouve une dette importante, de fortes liquidités et une insuffisance de la régulation. Aujourd’hui, malgré un renforcement des réglementations, ces trois facteurs sont réunis. Pourtant en juin dernie,r Janet Yellen affirmait qu’elle n’imaginait « pas de nouvelle crise financière de notre vivant ».
Bulle sur les marchés financiers
Les marchés financiers, dopés par les politiques expansionnistes, battent actuellement des records. Le DAXX dépassait pour la première fois la semaine dernière les 13 000 points, le DOW JONES a franchi le cap des 23 000 points mardi et le S&P 500 a vu son cours s’apprécier de 65% depuis son dernier point haut d’avant crise. Et ce, dans un contexte de faible volatilité. En effet le VIX, aussi appelé « indice de la peur », a atteint son plus bas historique le 29 septembre 2017, montrant un excès d’optimisme des marchés. Le prix Nobel d’économie Robert Shiller alerte d’ailleurs sur les similitudes entre Wall Street aujourd’hui et Wall Street à la veille du krach de 1929 : « Le marché est aussi cher qu’en 1929 », a-t-il déclaré à CNBC.
Dans ce contexte, l’AMF a identifié plusieurs risques qui pourraient ébranler la stabilité des marchés financiers. Le premier serait une remontée trop brutale des taux d’intérêts dans le monde, engendrant des pertes très importantes, en particulier si les marchés n’ont pas anticipé le rythme de remontée. Les portefeuilles obligataires devront encaisser de lourdes pertes dans ce cas-là. Le second risque serait une dépréciation brutale des prix des actifs qui ferait subir des pertes considérables aux investisseurs.
Bulle de crédit
L’important taux d’endettement public et privé au niveau mondial est également identifié comme un risque pouvant déclencher la prochaine crise financière. En effet en janvier dernier, l’Institute of International Finance a publié une analyse qui estime la dette globale mondiale à 217 000 milliards de dollars, atteignant ainsi plus de 325% du PIB mondial. Dix ans auparavant, celle-ci s’élevait à 276% du PIB. L’accroissement de l’endettement, dopé par le faible coût de l’argent ces dernières années, représente un risque de forte dégradation de la conjoncture économique sur le long terme. De nouveaux travaux ont d’ailleurs montré qu’une hausse du crédit au secteur privé pouvait accroître les risques de crise financière et freiner la croissance. Ainsi à long terme, la hausse des taux d’intérêt et des primes de risques pourraient exposer des fragilités sur la dette.
Dans son dernier rapport de la stabilité financière, le FMI a présenté un scénario catastrophe s’étalant de 2017 à 2022 dans lequel il pointe du doigt plusieurs risques pouvant déclencher une crise financière. Dans celui-ci, le FMI estime que jusqu’en 2020 la situation financière continuera d’évoluer sur la même tendance : des taux d’intérêts bas, les marchés financiers continuant de progresser et l’augmentation de la dette mondiale. A partir de 2020, le rapport expose le scénario d’une remontée rapide des taux d’intérêts, qui ferait chuter les marchés financiers de 15% et le prix de l’immobilier de 17%. Le FMI prévoit dans ce cas une chute de 1,7% de la production mondiale.
La prochaine crise risque d’être violente
Les politiques monétaires accommodantes injectent depuis des années des liquidités considérables sur les marchés, créant ainsi de nouvelles bulles. Ces bulles sont dispersées dans plusieurs pans de l’économie, tels que les marchés financiers, le crédit, le capital risque, ou dans l’immobilier dans plusieurs grandes métropoles mondiales. Si l’une d’elle venait à exploser, nous pourrions être confrontés à une des crises les plus violentes jamais connue. En effet, on assisterait à un retrait rapide des capitaux d’un de ces secteurs massivement investi. Or, plus la masse de capitaux qui circulent est grande plus les crises sont graves, ce qui est aujourd’hui renforcé par les politiques d’expansion monétaires. De plus, d’après Tobias Adrian, un responsable du FMI, les marchés financiers ne sont pas préparés à une telle alternative et « semblent complaisants au sujet des chocs potentiels ».
Maeva Courtois, Trader Algorithmique
Michel Ruimy, Professeur à l’ESCP Europe
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