Selon les dernières prédictions du cabinet d’étude Forrester, de nombreuses entreprises risquent de freiner leurs investissements en intelligence artificielle (IA) en raison de retours sur investissement jugés trop lents. Cependant, cette prudence pourrait s’avérer coûteuse sur le long terme, car l’IA s’inscrit dans la continuité de la transformation digitale qui a déjà bouleversé le monde des entreprises.
Une contribution de Sridhar Iyengar, Directeur Général de Zoho Europe
Pour tirer parti de cette technologie et éviter les écueils, les organisations doivent adopter une vision stratégique et ne pas se laisser guider par des résultats immédiats. Le défi repose ainsi sur la façon dont elles peuvent intégrer l’IA de manière durable et pertinente, sans céder aux sirènes des attentes souvent surestimées.
Une évolution naturelle de la transformation digitale
Plutôt que de voir l’IA comme une révolution disruptive, il est essentiel de la considérer comme une évolution logique de la transformation digitale, entamée il y a plus de deux décennies. Comme le Big Data, le cloud ou l’automatisation, l’IA permet d’exploiter les données de manière plus intelligente, offrant aux entreprises une capacité accrue d’analyse et d’aide à la décision, ainsi que la possibilité d’accroître considérablement leur productivité. Cette technologie n’est donc pas une rupture mais une extension des outils numériques existants, qui s’intègrent progressivement dans les processus de l’entreprise pour en améliorer l’efficacité et l’innovation. En ayant une vision à long terme, les organisations peuvent utiliser l’IA pour anticiper les défis futurs, renforcer leur compétitivité et s’adapter à un environnement économique en constante évolution.
L’IA, par exemple, trouve des applications concrètes dans de nombreux secteurs. Dans l’industrie, elle permet d’optimiser la maintenance des équipements en analysant des données issues de capteurs qui permettent d’anticiper les pannes et réduire les interruptions de production. Dans la finance, les outils d’IA sont utilisés pour détecter les fraudes en analysant des millions de transactions en temps réel et en repérant les comportements suspects. Pour les acteurs du retail, l’IA permet de personnaliser les recommandations de produits en temps réel, augmentant les ventes et améliorant l’expérience client en analysant les comportements d’achat et les préférences des consommateurs. En outre, l’automatisation alimentée par l’IA transforme les flux de travail dans tous les secteurs, en traitant les tâches répétitives telles que la saisie de données, la gestion des stocks et le support client avec rapidité et efficacité. Ces exemples montrent que l’IA représente un levier d’optimisation des processus existants, apportant des gains de productivité et de précision qui s’inscrivent dans la continuité des évolutions digitales passées.
Cependant, parler d’évolution naturelle ne garantit pas pour autant la réussite d’un projet d’IA qui nécessite des efforts et une certaine maturité en matière de développement et d’intégration des technologies, incluant la gestion efficace des données, l’automatisation des processus, et l’adoption d’infrastructures modernes.
La maturité digitale, un facteur clé de réussite des projets d’IA
Pour maximiser le retour sur investissement de l’IA, les entreprises doivent atteindre un certain niveau de maturité numérique. Une organisation mature a déjà mis en place des infrastructures robustes, telles que le cloud, des systèmes de Big Data, et des réseaux interconnectés, qui facilitent l’intégration de solutions d’IA. La gestion des données est également un élément crucial : les entreprises les plus avancées ont appris à centraliser et à structurer leurs informations pour permettre à l’IA de les analyser de manière centralisée et non fragmentée. Cette approche facilite la création de systèmes qui communiquent efficacement entre eux et permettent à l’IA de s’appuyer sur des données fiables et complètes.
Pour parvenir à cette maturité numérique, il est essentiel de commencer par optimiser et rationaliser les processus internes. En révisant les méthodes de travail et en supprimant les inefficacités, les entreprises peuvent rendre leurs opérations plus fluides et compatibles avec l’automatisation. La centralisation des données joue également un rôle central. Elle évite les silos d’informations, permettant d’obtenir une vue d’ensemble des activités de l’entreprise, ce qui améliore la précision des analyses et des prévisions. Enfin, les premières étapes de l’implémentation de l’IA doivent souvent passer par une automatisation progressive, basée sur des règles et des processus déjà existants, afin de faciliter la transition et de construire des bases solides pour des déploiements plus avancés.
L’IA, entre tendance et réalité stratégique
L’enthousiasme actuel autour de l’IA peut entraîner des attentes irréalistes et créer une pression pour obtenir des résultats immédiats. Or, il s’agit avant tout d’un outil technologique dont la véritable valeur réside dans son intégration réfléchie et stratégique. Pour éviter que les modèles d’IA ne divergent au fur et à mesure de leur formation, les entreprises doivent privilégier une approche mesurée de l’investissement, en alignant la technologie sur leurs objectifs à long terme et en veillant à une intégration transparente avec les processus existants. Il est tout aussi important d’assurer un suivi continu et des contrôles réguliers pour évaluer les performances et procéder aux ajustements nécessaires.
Les questions éthiques liées à l’IA, telles que l’équité des décisions automatisées et la transparence des algorithmes, doivent également être prises en compte. C’est là qu’intervient l’IA explicable (XAI) : comprendre comment les décisions sont prises par un algorithme est crucial pour en valider la pertinence et garantir qu’elles ne vont pas à l’encontre des valeurs de l’entreprise. La supervision humaine reste, par conséquent, une nécessité absolue, car elle permet de contrôler la qualité des décisions et d’assurer que celles-ci soient en phase avec la stratégie globale de l’organisation. En restant attentif à la manière dont l’IA est utilisée et en mettant en place des garde-fous, les entreprises peuvent naviguer entre l’influence des tendances et la réalité pour en tirer le meilleur parti.
L’IA ne doit pas être perçue comme une solution miracle, mais comme une évolution naturelle des outils numériques. Pour réussir à en tirer parti, il est indispensable de la considérer sur le long terme et de l’intégrer à une stratégie globale de transformation. La maturité digitale d’une organisation, incluant la centralisation des données, l’optimisation des processus internes et l’automatisation progressive, est un facteur déterminant du succès des projets d’IA. En ne cédant pas à la tentation d’attentes démesurées et en investissant de manière réfléchie, les entreprises pourront véritablement tirer profit de l’IA, renforcer leur position concurrentielle et se préparer aux défis futurs de manière proactive.
À lire également : EN BREF | Emmanuel Macron annonce 109 milliards d’euros d’investissements en France pour l’intelligence artificielle
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
![](https://www.forbes.fr/wp-content/themes/forbesfr/img/abo-mag-029/couv-029.jpg)
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits