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Disneyland Paris annonce une productivité record, chaque employé a généré 119 676 euros de chiffre d’affaires

Disneyland Paris
Vue d'ensemble de Disneyland Paris le 16 janvier 2014 à Paris, France. | Source : Getty Images

Selon une analyse des états financiers de Disneyland Paris, la productivité du personnel a atteint son plus haut niveau depuis dix ans en 2022, chacun des employés du parc d’attractions générant en moyenne 119 676 euros de chiffre d’affaires.

 

Le chiffre d’affaires par employé est un indicateur clé de la productivité et plus le résultat est élevé, mieux c’est, car il indique que le personnel fonctionne de manière optimale. Il ne s’agit pas d’une mesure du montant directement généré par chaque employé, mais il est simplement calculé en divisant le revenu de l’entreprise par le nombre total de ses employés.

Le scénario idéal pour toute entreprise est de générer le chiffre d’affaires le plus élevé avec le moins de personnel possible, bien que cela n’ait aucun rapport avec le profit, qui dépend de la rémunération des travailleurs. Si un petit nombre d’employés génère une quantité énorme de chiffres d’affaires mais est payé très cher, l’entreprise risque de devenir déficitaire.

De même, cette donnée n’a aucun lien avec la satisfaction des employés, qui peuvent être satisfaits s’ils sont généreusement récompensés, quel que soit le montant du chiffre d’affaires généré par l’entreprise. Inversement, ils peuvent être insatisfaits même si (ou parfois même parce que) ils génèrent un important chiffre d’affaires, mais estiment qu’ils ne sont pas payés de manière adéquate par l’entreprise pour laquelle ils travaillent.

Or, Disneyland Paris est en proie à des grèves depuis un mois. Plus de 1 000 manifestants ont défilé dans les deux parcs du complexe à plusieurs reprises, entraînant l’annulation de spectacles et d’animations. La prochaine manifestation est prévue pour le lundi 19 juin, selon le canal de réseaux sociaux DLP Report.

Depuis plusieurs dizaines d’années, les observateurs tentent d’identifier ce qui différencie les parcs à thème de Disney de leurs concurrents. Actuellement, c’est la qualité du personnel, connu sous le nom de « Cast Members » en raison du rôle qu’il joue dans un environnement à thème, qui est déterminant. Les Cast Members envoûtent les visiteurs et plus les clients sont heureux, plus ils dépensent et plus ils ont envie de revenir, ce qui permet à l’entreprise de générer un plus grand chiffre d’affaires. Le contraste est saisissant avec les scènes d’une vidéo récente publiée par DLP Report qui est devenue virale et qui montre une foule de visiteurs devant le château de la Belle au bois dormant en train de huer lorsque le spectacle du soir a été annulé par les grévistes.

Les grèves dans un parc d’attractions sont le pire des scénarios pour tout exploitant. Garder le personnel satisfait semble donc être une évidence pour Disneyland Paris, d’autant plus que sa société d’exploitation, Euro Disney Associés, a réalisé un bénéfice d’exploitation de 51 millions de dollars l’année dernière.

« On voit les chiffres, les bénéfices dégagés, la richesse qui a été communiquée par la Walt Disney Company », a déclaré Ahmed Masrour, l’un des Cast Members désenchantés, dans une récente interview accordée à L’Obs. « Les visiteurs, parfois, ils discutent avec nous et nous : “Vous avez raison, on ne comprend pas pourquoi le billet a augmenté, pourquoi tous les produits à Disneyland ont augmenté, à commencer par les parkings, alors que vous, les salariés, votre salaire ne suit pas.” Donc c’est tout simplement une équation simple : partageons la richesse équitablement. »

Selon DLP Report, lors d’un discours vidéo adressé au personnel au début du mois, la présidente de Disneyland Paris, Natacha Rafalski, a déclaré que, bien que l’entreprise soit récemment devenue rentable, elle devait être prudente et ne négocierait donc pas les salaires avant une révision prévue au mois d’août.

Il ne fait aucun doute que les 51 millions de dollars de bénéfices réalisés par Disneyland Paris ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan, comparés aux 7,9 milliards de dollars que Disney a engrangés l’année dernière grâce à ses activités mondiales de parcs, d’expériences et de produits. Cependant, il semble que cela suffise à couvrir les demandes des grévistes.

Leurs revendications portent notamment sur l’amélioration de leur prime d’ancienneté, l’augmentation de la rémunération pour le travail du dimanche et une augmentation de salaire mensuelle de 200 euros. Cela ne représenterait pas plus de 3 millions de dollars par mois pour l’ensemble des 15 000 employés de l’entreprise, de sorte que le bénéfice annuel de 51 millions de dollars devrait suffire à couvrir cette somme. Cependant, cela ne pourrait être que le début.

Comme Forbes l’a signalé, Disneyland Paris a augmenté ses dépenses en personnel de 40,1 % au cours de la dernière décennie, pour atteindre le chiffre record de 761 millions d’euros en 2022. Et ce n’est pas tout : les employés de Disneyland Paris auraient reçu une nouvelle augmentation de salaire de 5,5 % au début de cette année.

Cela ne leur a pas suffi, car l’inflation galopante a jeté un sombre sort sur la France. Selon un récent rapport du magazine économique Barron’s, depuis que la Russie a envahi l’Ukraine l’année dernière, le coût de l’électricité en France a presque quadruplé, tandis que la farine, le beurre et les œufs sont tous environ 50 % plus chers.

Quelle qu’en soit la cause, l’effet réel est le même pour le personnel : les salaires qui étaient auparavant suffisants ne le sont plus. Il ne fait aucun doute que leur employeur en est responsable, mais l’inflation échappe totalement à son contrôle et il n’a donc aucune visibilité sur le fait de savoir si et quand elle va repartir à la hausse. Si Disneyland Paris augmente les salaires à chaque fois que l’inflation augmente, l’entreprise pourrait devenir déficitaire, ce qui mettrait en péril son avenir et les emplois de ses employés. Par conséquent, leurs grèves pourraient être contre-productives.

Au cours de la décennie se terminant en 2022, Disneyland Paris a terminé l’année dans le rouge à sept reprises, avec une perte d’exploitation totale de 1,2 milliard d’euros. Son bilan est encore plus sombre, puisque l’entreprise n’a dégagé un bénéfice net qu’à deux reprises et a enregistré des pertes totales de 2,2 milliards d’euros. Cela explique en partie pourquoi le président du parc déclare que les finances sont fragiles après une seule année de bénéfices.

Lorsque la plupart des entreprises perdent de l’argent, elles le gèrent en réduisant les effectifs et les salaires. Pas Disneyland Paris. Les états financiers d’Euro Disney Associés montrent qu’au cours de la décennie se terminant en 2022, les effectifs ont augmenté de 9,2 % pour atteindre 15 450 personnes, tandis que les dépenses de l’entreprise pour son personnel ont connu une hausse stupéfiante de 40,1 %.

Lorsque Disneyland Paris était déficitaire, il aurait été parfaitement raisonnable de se serrer la ceinture en licenciant du personnel et en réduisant les salaires, mais au lieu de cela, l’entreprise a embauché davantage de travailleurs et a augmenté ses dépenses à leur égard.

Cela étant, Disneyland Paris compte aujourd’hui un nombre d’employés similaire à celui de 2017 (il a baissé par la suite en raison de la pandémie), mais chaque employé produit en moyenne 27,7 % de chiffre d’affaires en plus. Les Cast Members devraient donc être récompensés en conséquence. Cependant, Disneyland Paris est une organisation à but lucratif et non une entreprise sociale, cet argument ne tient donc pas la route. Pour autant, les données montrent que les dépenses de l’entreprise pour son personnel ont augmenté de 18,5 % entre 2017 et 2022 et, fait crucial, l’entreprise était déficitaire au début de cette période, de sorte que dans la plupart des autres entreprises, le personnel aurait été menacé. Il est clair que cette situation n’est pas souhaitable pour le personnel, c’est pourquoi la comparaison entre 2017 et aujourd’hui n’a pas lieu d’être.

Les parcs Disneyland Paris se retrouve ainsi dans une situation où ils réalisent des bénéfices alors que le personnel a grand besoin d’une nouvelle augmentation de salaire, même s’il en a obtenu une il y a quelques mois. Il s’agit d’un dilemme épineux. Toutefois, Disneyland Paris peut s’inspirer de ses pairs, et c’est là que la mesure du chiffre d’affaires par employé prend tout son sens.

La définition d’Investopedia sur le chiffre d’affaires par employé indique que la mesure « est plus utile lorsque l’on examine les changements historiques dans le ratio d’une entreprise ou lorsqu’on le compare à celui d’autres entreprises du même secteur ». La comparaison la plus logique est le Parc Astérix, qui est le parc à thème le plus visité en France après les deux parcs de Disneyland Paris.

Le Parc Astérix est également situé à la périphérie de Paris et a attiré 2,6 millions de visiteurs l’année dernière, selon le Global Attraction Attendance Report de la Themed Entertainment Association et AECOM. Cette fréquentation est à comparer aux 5,3 millions de visiteurs des Walt Disney Studios à Paris et aux 9,9 millions de visiteurs du parc Disneyland voisin. Le Parc Astérix est exploité par Grévin et Compagnie et il compte beaucoup moins de personnel que Disneyland Paris (1 246 contre 15 450). Cependant, il est possible de comparer les deux parcs à l’identique en examinant le chiffre d’affaires par employé et les dépenses de l’entreprise par employé.

Grévin et Compagnie dépense 19,5 % de moins par employé que Disneyland Paris et ce montant est en hausse, mais il représente moins de la moitié de l’augmentation pour Disneyland Paris au cours des cinq dernières années. Surtout, le personnel du Parc Astérix génère 15,1 % de chiffre d’affaires en plus que celui de Disneyland Paris. En conclusion, le Parc Astérix dépense moins pour chaque membre de son personnel que Disneyland Paris et son personnel génère plus de chiffres d’affaires pour l’entreprise que celui de Disneyland Paris.

 

Article traduit de Forbes US – Auteure : Caroline Reid

<<< À lire également : En dix ans, Disneyland Paris a enregistré un chiffre d’affaires de 3,4 milliards d’euros grâce à ses hôtels >>>

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