Les géants des marchés basés à Chicago, le Cboe (Chicago Board Options Exchange) et le CME (Chicago Market Exchange) explorent, de différentes manières, le potentiel de l’Ethereum, cette cryptomonnaie qui bénéficie d’un marché de 49,6 milliards de dollars. Le problème était que, jusqu’à la semaine dernière, l’incertitude concernant la réglementation américaine les empêchait de prendre une décision cruciale au sujet de cette monnaie virtuelle.
Alors que des marchés à terme pour Ethereum existent déjà au Royaume-Uni, les doutes concernant la décision de la SEC (Securities and Exchange Commission aux États-Unis) au sujet de la légitimité de cette cryptomonnaie inquiétaient ces deux échanges, et bien d’autres dans le secteur.
Le Cboe et le CME proposent tous deux des marchés à terme pour le Bitcoin depuis l’an dernier, grâce à la classification du Bitcoin en tant que titre à part entière. Sachant que l’Ether, qui avait au début été acheté par un petit nombre de personnes, pouvait être reconnu en tant que titre, de nombreuses sociétés avaient élaboré des produits associés, en attendant davantage une décision de la SEC.
Puis, la semaine dernière, le directeur de la SEC, William Hinman, a prononcé quinze petits mots qui ont enfin levé le voile sur ce doute et ont plongé une bonne partie de l’univers de la cryptomonnaie dans la panique : « Les offres et les ventes actuelles d’Ethers ne constituent pas des transactions sur titre ».
Le président de la Cboe, Chris Concannon, était en plein vol lorsqu’il a entendu la nouvelle. Il a depuis confié à Forbes que la première chose qu’il a faite ensuite a été d’appeler son directeur de la communication afin de se préparer à un déluge de sollicitations de la part des médias. Le moment tant attendu était arrivé, il était donc temps nécessaire d’agir.
« Nous pensions aux marchés à terme pour l’Ethereum depuis un certain temps, explique Chris Concannon à Forbes. Clairement, le potentiel de l’Ether de devenir un titre à part entière s’est envolé, la voie est désormais libre pour lancer un marché à terme pour l’Ethereum ».
Alors que le président de la Cboe n’a pas déclaré publiquement si son échange de 15,6 milliards de dollars se préparait activement pour lancer un marché à terme, il explique qu’il a souhaité mettre en place de tels marchés depuis qu’il s’intéresse aux cryptomonnaies.
Afin de booster le processus, la Cboe, le plus grand échange d’options et de marchés à terme aux États-Unis avec 22,95 % de parts de marché, a formé un partenariat exclusif l’an dernier avec Gemini Trust Company, entreprise basée à New York et dirigée par Tyler et Cameron Winklevoss. En utilisant les informations des marchés de Bitcoin de Gemini, la Cboe a lancé les premiers contrats à terme pour le Bitcoin (XBT) aux États-Unis en décembre 2017 et a depuis échangé 680 000 contrats pour une valeur théorique de 6,85 milliards de dollars, selon les documents de l’entreprise.
Les raisons de l’implication de l’entreprise envers le Bitcoin datent d’une décision de 2015 prise par la CFTC (Commodity Futures Trading Commission), qui a officiellement reconnu la cryptomonnaie, qui ne repose pas sur une autorité financière, ainsi que toutes les copies ou branches de son code, en tant que titre. Mais l’Ethereum, qui a débuté en 2014 en vendant une partie de sa monnaie virtuelle avant son lancement, reste dans une zone floue, alors que certains sceptiques affirment que cette monnaie est davantage centralisée que d’autres ne veulent le reconnaître.
Alors que cette incertitude empêche les entreprises américaines réglementées de proposer des marchés à terme, Gemini, le partenaire de la Cboe, a ajouté l’Ethereum à sa plateforme en 2016 et vend des Ehtereum aux enchères quotidiennement depuis juillet dernier. Les informations de cette vente pourraient jouer un rôle important pour déterminer le prix des futurs contrats à terme que le Cboe pourrait éventuellement lancer, selon Chris Concannon.
En réalité, c’est le partenariat entre le Cboe et Gemini qui, d’après le directeur de l’échange, pourrait accélérer l’offre de marché à terme si elle devait voir le jour. Le mois dernier, en plus de l’Ethereum et du Bitcoin, Gemini a apporté son soutien au Zcash, au Litecoin et au Bitcoin cash, qui sont tous des dérivés du Bitcoin.
« Ce partenariat a été conçu afin de nous permettre de sortir des produits supplémentaires pour d’autres monnaies tout en utilisant la même structure, explique Chris Concannon. Nous n’avons rien de spécial à faire, ça ne fait que suivre les pas des marchés à terme de Bitcoins ».
Une semaine après le lancement des premiers marchés à terme régulés pour le Bitcoin, le CME s’est également lancé dans une possible adoption de marchés à terme pour Ethereum.
Contrairement au Cboe, qui est rapidement arrivé sur le marché grâce à son partenaire Gemini, le CME a créé ses propres indices pour le Bitcoin en partenariat avec Crypto Facilities, basé au Royaume-Uni. Le taux de référence Bitcoin CME CF et l’Index en temps réel du Bitcoin CME CF, des indices de plus en plus controversés, ont été lancés en novembre 2016 et ont déterminé le prix du Bitcoin en fonction des données fournies par les échanges participants.
Un peu plus d’un an après avoir mis les indices en place, le CME a débuté ses propres marchés à terme pour le Bitcoin (BTC), qui reposent sur ces indices. Au cours des trois derniers mois, les BTC ont échangé en moyenne au nombre de 130 millions par jour, selon les données de l’entreprise.
Le responsable international des produits d’action pour le CME a déclaré à Forbes que l’échange n’a pas de projets pour lancer un marché à terme pour Ethereum. Le mois dernier, le CME a cependant annoncé avoir créé un partenariat avec Crypto Facilities, l’entreprise qui l’a aidé avec les marchés à terme de Bitcoin, et lancé un taux de référence ether-dollar, ainsi qu’un indice en temps réel.
Lancé en plusieurs phases, l’indice est devenu un produit à grande échelle ce mois-ci, et alors que le nombre d’abonnés n’a pas été révélé, le porte-parole du CME a expliqué à Forbes que la page d’accueil du site pour l’Ethereum avait été visitée 5 200 fois depuis sa mise ne ligne. McCourt explique que le CME juge l’intérêt de l’indice en fonction des participants du marché et pourrait mettre un place différents services en fonction de la demande.
« Tout comme les marchés à terme de Bitcoin ont été mis en place pour répondre à la demande, tous développements de produits supplémentaires le seront également, qu’ils se rapportent à l’Ether ou à d’autres tokens, actifs crypto ou numériques », explique McCourt.
Malgré le fait que le CME a nié avoir pour projet de créer des marchés à terme d’Ethereum, un meilleur aperçu de la collaboration entre l’échange et Crypto Facilities fourni quelques indices de ce à quoi la « demande des consommateurs » pourrait ressembler.
Bien avant que le CME ne lance ses marchés à terme pour le Bitcoin, son partenaire, Crypto Facilities, a commencé à proposer les contrats, et il continue encore aujourd’hui d’élargir sa gamme de services. Fondée en 2015, la start-up basée à Londres a des années d’avance dans le monde de la cryptomonnaie. Supervisée par les régulateurs britanniques, la FAC (Financial Conduct Authority), depuis octobre 2016, Crypto Facilities a commencé à échanger des marchés XRP, et le mois dernier, juste une semaine avant que le CME révèle son indice ether, Crypto Facilities a lancé le premier marché à terme pour Ethereum réglementé en utilisant ces mêmes indices.
Peu de temps après leur lancement, ces marchés à terme pour Ethereum ont pris de l’ampleur, pour finalement représenter un dixième de la valeur totale. Le fondateur et PDG de l’entreprise, Timo Schlaefer, s’attend à un volume de transactions de 150 millions de dollars rien que pour ce semestre. Les volumes mensuels de XRP sont actuellement de près de 125 millions de dollars, par rapport à 30 millions de dollars en février. Le total du volume des échanges de marchés à terme se sont envolés de 84 % au premier semestre 2018 par rapport au dernier semestre de 2017, a-t-il ajouté.
« Nous constatons une forte demande pour des niveaux de prix fiables et dignes de confiance concernant les crypto monnaies », explique Timo Schlaefer.
Mais, bien sûr, tout ne va pas pour le mieux dans le monde des cryptomonnaies. Au-delà des inquiétudes croissantes concernant la capacité à vendre des Bitcoins à découvert qui ont contribué à la chute de prix du Bitcoin de 19 000 $ l’an dernier à 6 400 $ aujourd’hui, une nouvelle vague d’inquiétudes prend sa source dans de nouvelles manipulations encore plus malveillantes.
La semaine dernière, le CFTC a demandé des données à plusieurs échanges associés au taux de référence du Bitcoin CME CF. Malgré un certain nombre de protections mises en place pour le taux de référence, y compris une médiane de données pondérée par le volume et des données de cas particuliers, les inquiétudes ont persisté concernant la nature hautement instable de l’échange, sachant les données sont un potentiel point faible du système.
Le mois dernier, afin de répondre à ces inquiétudes, Crypto Facilities a recruté Sui Chung, l’ancien directeur général de Euromoney Institutional Investor, afin de surveiller le secteur d’activité entourant les indices et l’évaluation des prix. Tout en reconnaissant les inquiétudes ambiantes, Sui Chung a détaillé le processus de pondération des marchés à terme de cryptomonnaies, dans un courriel destiné à Forbes et a affirmé sa position : « Nous révisons toujours les niveaux d’adoption et de liquidité des tokens afin de comprendre si le marché nécessite, et si nous pouvons déterminer, des niveaux de prix fiables et solides ».
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits