Après une année 2017 stratosphérique, la reine des cryptomonnaies est tombée de son petit nuage en 2018 et a perdu près de 80% de sa valeur. Une chute vertigineuse. Mais Le Bitcoin n’a peut-être pas dit son dernier mot.
L’année 2018 aurait dû être celle de la consécration pour le Bitcoin. Tous les voyants semblaient au vert et tous les ingrédients réunis pour que la reine des cryptomonnaies consolide les promesses entrevues en 2017 où son cours avait flirté avec les 20 000 dollars. Rien ne semblait pouvoir entraver l’irrésistible ascension du phénomène. « Hors norme », « incroyable », « époustouflant », « extraordinaire », les superlatifs ont fleuri tout au long de ce « cru 2017 » qui restera dans l’histoire de ces devises 2.0. Outre le Bitcoin, le grand public s’est familiarisé avec d’autres « currencies » qui étaient jusque-ici l’apanage des puristes et autres investisseurs chevronnés. Citons pêle-mêle l’Ethereum, le Litecoin ou encore le Ripple… Les plateformes d’échanges et de « trading » ont également émergé et tout le monde a pris de front la déferlante. Et 2018, qui marque la dixième année – l’âge de raison ? – du Bitcoin sorti de terre ou du « cerveau » du nébuleux Satoshi Nakamoto le 30 octobre 2008, devait concrétiser cet avènement. Mais la roche tarpéienne est proche du Capitole et la chute fut aussi brutale que l’ascension fut irrésistible. Dès le début de l’année, les premiers grains de sables sont venus enrayer le rouleau-compresseur Bitcoin et consorts. Exit les « 36 000% » de croissance du Ripple et les rêves d’intronisation à Wall Street. Le Bitcoin et ses comparses sont restés à quai.
Les espoirs des tenants des cryptomonnaies de voir ces nouvelles devises tenir le haut du pavé ont été rapidement douchés. Dès le mois de janvier 2018, la vedette des devises 2.0 a perdu près de 50% de sa valeur, flirtant avec le seuil symbolique des 10 000 dollars. « Quand apparaît une idée nouvelle, les Américains la transforment en business, les Chinois la copient et les Européens la réglementent ». Ce bon mot d’Emma Marcegaglia, ancienne « patronne des patrons » italiens semblait particulièrement à propos au moment de constater les premiers craquements dans la maison Bitcoin. Car, en effet, dès le mois de janvier les appels à la réglementation se multipliaient allant à l’encontre de l’essence même des cryptoactifs. En France, le gouvernement a chargé l’ancien sous-gouverneur de la Banque de France, Jean-Pierre Landau, de plancher sur la question de la réglementation des cryptomonnaies. Ce dernier finira par dévoiler un rapport au mois de juin sur cette question, préconisant de ne pas « réguler à la hâte et d’accepter, du moins un certain temps, de vivre avec une certaine ambiguïté ». Fin de citation.
Un mois de janvier « meurtrier »
Les tentatives de régulation ont-elles donc eu raison de la trajectoire du Bitcoin? Un crainte déjà exprimée dans nos colonnes, fin 2017, par Jean-David Bénichou expert ès-crytpomonnaies mais également PDG de Via.io. « Ces monnaies virtuelles suscitent la défiance de tout ce qui est organisé et régulé. Le paradigme de base des cryptocurrencies est justement celui-ci : moins de centralisation, moins de régulation et plus de pouvoir entre les mains des utilisateurs. Si vous êtes un Etat, vous disposez de la souveraineté sur votre monnaie avec des réglementations juridiques et fiscales et tout est réglé comme du papier à musique. Et là vous voyez un « objet non identifié » qui bouscule tous ces codes, qui échappe à ces contrôles et, surtout, qui attire de plus en plus de capitaux ». Autre phénomène ayant (probablement) contribué à mettre sous pression le cours des « cryptos », la multiplication des piratages de plateformes d’échanges, comme l’entité sud-coréenne Bithumb ((la sixième la plus active au monde selon le site de référence coinmarketcap.com) ou d’autres.
La « hype Bitcoin» a également fini par lasser le grand public et les particuliers qui s’étaient emparés souvent trop tard du phénomène et qui ont tout perdu par excès de confiance et d’optimisme. Les discussions à ce sujet sur les forums dévolus à la question des cryptomonnaies sont légion et certains traders amateurs se sont laissés griser par l’appât du gain. Un « gain facile » comme l’expliquait à ses millions de followers Nabilla Benattia, ancienne « gloire » de la téléréalité qui n’hésitait pas à distiller ses conseils sur la question. « C’est vraiment sûr, c’est vraiment cool et si ça vous intéresse vraiment vous pouvez y aller les yeux fermés », expliquait la jeune femme, en faisant la promotion d’une de ces plateformes d’échanges. Suivant d’un regard pas toujours acéré les fluctuations des cryptomonnaies, retenant essentiellement leurs montées respectives spectaculaires, et espérant rapidement faire fortune en un temps record, le grand public a trop rapidement eu les yeux de Chimène pour ces nouveaux hérauts, symboles de l’argent (trop) facile. Bitcoin, Ethereum, Litecoin ou encore Ripple étaient ainsi mentionnés quotidiennement, tout au long du premier quart de l’année, comme autant de placements miracles.
Le Bitcoin « bouge encore »
Mais la réalité s’est avérée bien plus complexe, chaque médaille disposant de son revers. Cette « ruée vers l’or » et cet exode massif d’un public pas vraiment averti ont aiguisé l’appétit des hackers. « La récompense est maintenant plus grande, les pirates vont, par conséquent, multiplier les attaques et autres raids », confirmait, toujours dans nos colonnes dès le mois de février 2018, Alexey Malanov, expert antimalware chez Kaspersky Lab. Une funeste prophétie qui s’est malheureusement révélée exacte. Mais il serait imprudent de sous-estimer la capacité de résistance du Bitcoin qui a, par le passé, fait montre d’une imprévisible capacité de rebond, même s’il ne vaut plus, aujourd’hui, « que » 3 200 dollars. Une chose est néanmoins certaine : ce « grand cadavre à la renverse » qu’est le Bitcoin bouge encore.
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