A 28 ans, Nora Touré est business developer chez Sculpteo, entreprise française leader dans l’impression 3D. Après s’être installée dans la Silicon Valley en 2013 pour créer la filiale française de Sculpteo aux Etats-Unis, elle a fondé Women in 3D Printing, un réseau de femmes qui travaillent dans l’impression 3D. Aujourd’hui, elle encourage les filles à devenir des makers. Interview.
Pourquoi avoir choisi de créer un réseau dédié aux femmes qui travaillent dans l’impression 3D ?
Quand je suis arrivée à San Francisco, j’avais besoin de me constituer un réseau. Petit à petit, j’ai réalisé que mes contacts féminins ne se connaissaient pas entre elles et il y a deux ans, j’ai décidé de créer Women in 3D Printing. Quand on est une femme dans la tech, on est souvent la seule dans les salles de réunion, les conf call ou les conférences. Ce réseau était aussi un moyen d’échapper à ce phénomène, en pouvant faire appel à une collègue pour nous accompagner lors d’un événement. Au sein du réseau, nous pouvons aussi être plus naturelles, alors que dans le milieu de la tech, les femmes ont l’habitude de mettre la barre très haute. Mais j’espère vraiment qu’un jour nous n’aurons plus besoin de ces réseaux féminins.
Women in 3D Printing réunit 2000 femmes à travers le monde. Quelles sont les caractéristiques de ce réseau ?
C’est d’abord un site web, sur lequel je publie des interviews de femmes qui travaillent dans l’ impression 3D. Je mets en avant leur parcours. Beaucoup ont eu trois carrières différentes ou suivis des études très diverses avant de rejoindre cette industrie. Women in 3D Printing est également une plateforme de networking sur Linkedin et Facebook. Avec Barbara Hanna (fondatrice de Cyant, une entreprise qui encourage les enfants à s’initier aux sciences en mêlant art et nouvelles technologies), nous organisons des rencontres : les 3D Talk. Une fois pas trimestre, nous réunissons trois à quatre femmes pour aborder différentes thématiques comme l’éducation à l’impression 3D, comment faire un fichier 3D, le 3D modeling… En 2017, nous parlerons d’impression 3D dans l’automobile, la mode ou encore la santé.
L’industrie de l’impression 3D est un univers majoritairement masculin. Comment l’expliquer ?
La raison principale est liée aux diplômes. L’impression 3D, c’est du manufacturing et de la tech. Or aux Etats-Unis, la proportion de femmes diplômées en informatique est de 11 %, elle est de 26 % en manufacturing et d’environ 24 % dans le secteur tech. L’impression 3D est une industrie ancienne – cela existe depuis 1984 – mais c’était principalement utilisé dans les laboratoires de recherche et développement des gros industriels. Et quand on regarde le nombre de femmes qui travaillent dans les bureaux de RetD de ces gros groupes, elles sont une minorité. C’est très difficile de sortir de ces tendances. Mais aujourd’hui, l’accès à la technologie se démocratise, nous n’avons plus besoin d’être dans les 11 % de femmes diplômées en informatique pour utiliser l’impression 3D.
Comment encourager les filles et les femmes à se lancer dans ces métiers ?
Il ne faut pas avoir peur parce qu’on a pas le diplôme ! Nous sommes dans une économie très flexible, on ne fait plus carrières pendant 30 ans dans la même boîte. C’est certes précaire, mais c’est aussi synonyme d’opportunités pour les femmes qui n’ont pas de diplôme dans la tech. C’est le moment d’y aller ! Il faut juste avoir la bonne idée et l’envie. Les femmes peuvent faire aussi bien que les hommes et peut-être encore mieux. Dans l’impression 3D, on parle de fabriquer quelque chose et donc d’être un maker. Et pour être un maker, il faut être polyvalent. Il faut savoir modéliser, avoir des bases de design, savoir quelle technologie utiliser, trouver la bonne machine, savoir imprimer, sortir son objet, le vendre… Et du fait de leur éducation, les femmes ont une meilleure capacité à être polyvalentes que les hommes. Quand les femmes font de la couture, de la cuisine, de l’artisanat : elles sont des makers !
Vous vivez actuellement dans la Silicon Valley, avez-vous pour projet de développer Women in 3D Printing en France ?
J’ai eu beaucoup de demandes pour organiser des événements en France. Je prévois déjà d’organiser un ou deux 3D Talk à Paris en mars prochain. J’aimerais mettre en avant des chercheuses, des personnes que nous n’avons pas l’habitude d’entendre parce qu’elles restent dans leurs laboratoires.
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