Quatre ans après avoir lancé sa marque de lunettes de luxe, Nathalie Blanc a reçu le prix spécial du jury 2018 avec un Silmo d’Or lors du Salon international des Professionnels de l’Optique et de la Lunetterie. Cette créatrice française plébiscitée par les opticiens du monde entier connaît une croissance fulgurante de sa start-up.
Rencontre avec Nathalie Blanc, fondatrice et créatrice de la marque de lunettes Nathalie Blanc Paris.
Quel est l’ADN de Nathalie Blanc Paris ?
Nathalie Blanc : Mon ADN ? Le chic français, bien sûr ! Enfant, je détestais tout ce qu’on me posait sur le nez. Je trouvais toutes les lunettes inélégantes et pataudes. Dès l’adolescence, l’idée de bousculer le monde fermé de l’optique est devenu une obsession. Au collège, mes amies voulaient être avocates ou journalistes. Je voulais dessiner de jolies montures pour ne plus jamais avoir à me cacher derrière les lunettes des autres.
Depuis le lancement de ma marque en 2015, Nathalie Blanc Paris, je dessine des lunettes à la fois sages et effrontées avec des lignes audacieuses. J’ai imposé l’idée d’une qualité irréprochable. Ce n’était pas négociable. La fabrication de mes lunettes « made in France » s’est imposée toute seule. L’artisanat et le savoir-faire français sont réputés dans le monde entier et demeurent indétrônables. Aujourd’hui, mes montures taillées avec précision sont conçues pour épouser parfaitement les courbes du visage.
Comment avez-vous créé la renommée de la marque qui porte votre nom ?
N.B : Si de nombreux opticiens dans le monde sont aujourd’hui mes ambassadeurs, c’est parce qu’ils savent que je ne me suis pas décrétée designer du jour au lendemain. Je viens du monde de l’optique. Chausser une lunette sur un visage, l’ajuster, c’est un exercice assez complexe… Cette expérience est essentielle dans le succès de Nathalie Blanc Paris. Avant de dessiner ma première monture, j’ai vu des milliers de nez, de regards. J’ai réglé, corrigé… Quand on dessine des lunettes, le sens du design est aussi important que l’expérience des visages.
Mes lignes très techniques et précises ont permis à mes produits de ne pas s’attarder dans le stock des opticiens.
Nathalie Blanc Paris a eu une chance phénoménale : beaucoup de célébrités, des comédiens, des journalistes, de grands chefs de cuisine ont passionnément aimé mes lunettes. Ces gens pensent peut-être que mes montures symbolisent le luxe français.
Cet élan incroyable m’a permis de développer la communication de façon très rapide. Le Salon mondial de l’optique a propulsé la renommée de ma marque. Nathalie Blanc Paris a remporté le Silmo d’Or en septembre 2018, la plus prestigieuse de toutes les reconnaissances dans notre secteur d’activité. Alors que nous étions en compétition avec les plus grandes marques internationales, le jury nous a donné le prix de la plus belle collection de l’année ! Quelle fierté pour mes équipes. Une sacrée consécration pour la petite collégienne qui n’aimait pas les lunettes des autres…
- Nathalie Blanc et son Silmo d’Or
Comment avez-vous réussi à financer le développement de votre entreprise ?
N.B : Le financement de la première étape de ma start-up a été réalisé auprès des « friends and family ». L’image exceptionnelle de notre jeune marque nous a permis d’obtenir un prêt auprès de la BPI. Compte tenu de notre fort développement, la société va devoir trouver un partenaire financier pour séduire de nouveaux territoires et conquérir de nouveaux marchés. C’est un moment important de la vie de l’entreprise. Il ne faut pas se tromper.
Quelle est l’histoire que vous racontez aux Millennials ?
N.B : Nous sommes très présents sur les réseaux sociaux notamment sur Instagram et Facebook. La compréhension de ces plateformes de partage est primordiale pour une start-up en pleine expansion. J’ai parlé de la chance de pouvoir compter sur des « people early adopters », mais je dois aussi avouer que c’est grâce à ces outils de communication que j’ai pu atteindre une population plus jeune et plus large. Aujourd’hui, je suis souvent ébahie lorsque je vois des jeunes fashionistas de 17 ou 20 ans qui se passionnent pour mes dernières créations. Elles m’envoient des posts de Berlin, Moscou, Los Angeles, Séoul, Kyoto. La semaine dernière, une bloggeuse californienne très connue posait avec mes lunettes devant la mythique colline d’Hollywood…
Vous imaginez, pour une marque qui n’existait pas voici quatre ans… Aujourd’hui, dans mon bureau de création, ça grouille, ça invente, ça fourmille d’idées. Je travaille avec des blogueuses et des influenceuses. Je leur dessine parfois une paire de lunettes. Elles nous permettent de gagner en visibilité et en notoriété auprès de ces jeunes qui ne lisent plus de magazines, ne regardent plus la télévision et s’informent via des canaux différents. Si j’étais ethnologue, je dirais que les Millennials fonctionnent de façon tribale. Il est donc très important de déchiffrer leurs codes, leurs rituels, afin de leur proposer des créations qui leur correspondent. Les réseaux sociaux sont le meilleur outil de compréhension de cette génération. Nous avons tous intégré cette réalité dans notre jeune entreprise.
Quelle est votre politique de Recherche et Développement ?
N.B : Je travaille avec mes fabricants français sur chaque couleur, chaque arrondi, chaque nez. Ces séances durent parfois huit ou dix heures. Le résultat est stupéfiant. Ils sont les meilleurs au monde. Grâce à eux, je développe de nouvelles couleurs, uniques, qui sont la propriété de Nathalie Blanc Paris. Ma marque et mes modèles ont été déposés à l’INPI.
J’ai beaucoup cherché à développer la qualité et l’originalité des verres solaires avec Carl Zeiss et Divel. Chaque paire de verres est équipée d’antireflet, ce qui permet une haute protection de la rétine. Nous avons lancé des tris dégradés qui n’existaient pas, des verres photochromiques dégradés. Nos demandes, parfois originales, poussent les usines à se dépasser. C’est dans cette confrontation, je dirais même dans cette coproduction entre le designer et le fabricant, qu’on arrive à repousser les limites du possible : à l’issue de l’échange, une solution technique émerge. Et ça change tout dans la monture. Elle devient sublime. Je vais vous étonner, mais ces longues heures dans ces ateliers dépositaires de la tradition lunettière française sont les moments que je préfère dans mon métier.
Comment exportez-vous vos savoir-faire à l’international ? Quels sont vos réseaux de distribution ?
N.B : Nous distribuons de trois façons différentes : soit avec un réseau d’agents, soit avec un réseau de distribution, soit avec des masters licences. Aujourd’hui, nos lunettes sont vendues dans plus de 800 points de ventes, principalement en Europe. Nathalie Blanc Paris commence son développement aux États-Unis, en Israël, au Canada, en Australie. Nous sommes sur des projets bien avancés avec la Russie et la Corée. La quasi-totalité de nos points de vente sont des opticiens. Il nous arrive cependant de choisir comme « écrin » de célèbres concept-stores comme le Nomad Hotel à Los Angeles.
Quel est votre style, votre signature ?
N.B : Nathalie Blanc Paris a vu le jour grâce au soutien que ma famille et mes amis m’ont apporté en particulier au début de l’aventure. Toutes mes créations portent les prénoms de mes proches (Suzanne, Madeleine, Eric, Fanny, etc…). Comme un remerciement… Tous ceux qui m’entourent, copains, créateurs, collaborateurs, comptables, stagiaires, amis opticiens, ont une lunette à leur nom. C’est un mantra chez nous ! Autre détail : dans le design de mes montures, vous retrouverez toujours deux ronds pleins symbolisant les rivets et un rond creux au bout de la branche. Une référence aux trois petits points de notre logo. Notre signature.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
N.B : L’inspiration me vient principalement en flânant dans les brocantes, en observant les lunettes que portent les gens dans la rue, mais aussi en regardant des photos anciennes et les vieux films de Renoir, Capra, Lubistsh. Retourner dans le passé me permet de mieux comprendre les modèles qui ont suscité des coups de foudre. Chaque époque, des années 30 aux années 2000, se réinvente et réinterprétant des montures du passé.
Notre société a fait des collaborations avec les marques de prêt-à-porter Swildens, Michel Klein et Rouje. Ces partenariats me permettent de m’aérer l’esprit en conciliant ma vision avec l’esprit et l’univers d’une autre marque.
Présentez-nous votre nouvelle collection
N.B : Ma nouvelle collection se compose de modèles en métal et en acétate. Élégantes et épurées, les lunettes métal sont le fruit d’un travail aussi minutieux que complexe. Fabriquées intégralement en France, les montures sont traitées à l’or fin 22 carats et regorgent de petits détails :
- la spatule bicolore au bout des branches est assortie aux verres solaires. Les formes hautes rappellent les montures des années 70 tandis que les versions rondes avec nez droit sont structurées et audacieuses.
- les « pilotes » sont serties d’acétate coloré qui leur donne une touche plutôt branchée. Nous utilisons des matières nobles, naturelles et recyclables comme l’acétate de cellulose, à base de fleur de coton et d’algue marine.
Lors de mes pérégrinations dans le Jura, j’achète souvent de vieux stocks d’acétate. Des plaques de plusieurs mètres de long, fabriquées après-guerre dans les vieux ateliers des lunettiers de la région d’Oyonnax, « La Mecque » de la lunette française. Ces plaques sont d’une qualité extraordinaire et d’une beauté subjuguante. Tradition et modernité : l’excellence française que j’ai toujours rêvé d’incarner !
Début 2019, nous avons lancé une collection pour adolescents : « Blanc… » Curieusement, l’offre était assez réduite pour les 13-17 ans. J’ai voulu y remédier en créant une ligne de lunettes pétillante, moderne et fonctionnelle. Elle s’adapte au quotidien parfois agité des ados et à leur goût prononcé pour le beau et le branché…« Blanc… » commence tout juste à être commercialisé et c’est déjà un vrai succès…
Nathalie Blanc Paris a aussi un projet important en gestation : une éblouissante collaboration avec l’immense bijoutier de la place Vendôme, Lorenz Baümer, pour le Silmo 2019 : une lunette-bijou… magnifique et surprenante.
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