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Meet My Mama, Quand La FoodTech Donne Le Pouvoir Aux Femmes

A.C

La start-up Meet My Mama propose des “voyages culinaires” aux entreprises. Des prestations réalisées par des femmes issues des migrations ou réfugiées. La jeune pousse de la foodtech n’a pas oublié d’être responsable et se dédouble en association pour former les femmes à l’hygiène, la sécurité, mais aussi l’entrepreneuriat. Quand social et rentable font bon ménage. 

« Le concept des petits four est français, et tous les buffets d’entreprises sont calqués sur ce modèle-là. » Du haut de ses 25 ans et de son franc sourire, Loubna Ksibi fait le pari de remplacer le classique amuse-bouche par une escapade des papilles à l’autre bout du monde. « Aujourd’hui sur notre plate-forme, nous proposons dix voyages culinaires : Pérou, Maroc, Brésil, Liban, etc. » Meet My Mama est une jeune pousse de la foodtech [contraction de nourriture en anglais et technologie, ndlr] qui permet aux entreprises de mettre un peu de cuisine du monde dans leurs événements ou leurs repas. Aux fourneaux, des « mamas », des femmes issues de l’immigration ou réfugiées qui profitent de cette aubaine pour vivre de leur passion et s’émanciper. « Notre objectif est de scaler l’activité traiteur qui n’avait pas pris le virage numérique », indique l’entrepreneure qui n’a pas peur de vouloir créer une entreprise à dimension sociale et qui gagne de l’argent.

Tout a commencé dans les jardins de PwC. Loubna Ksibi, originaire de Metz, a bifurqué de la fac de médecine à l’école de commerce. « Je rêvais plus de construire des hôpitaux en Afrique que de devenir médecin. » En stage dans le célèbre cabinet d’audit, elle rencontre Donia Souad Amamra. Originaire du 95, l’étudiante à Sciences Po revient d’une année aux Etats-Unis où elle s’est impliquée, « comme beaucoup de jeunes là-bas », dans des activités bénévoles et compte bien devenir son propre patron. « Je venais d’arriver à Paris et Donia me faisait découvrir la cuisine du monde », raconte Loubna. Si l’idée d’ouvrir leur propre restaurant les a effleurée, les deux jeunes femmes assistent à l’éclosion de la foodtech avec les livreurs à vélo et décident d’apporter leur ingrédient à la recette.

Plate-forme traiteur

Au cœur de leur réflexion, les « mamas ». « Des femmes au foyer qui rêvent de vivre de leur talent. » Pour Donia Souad Amamra, deux barrières doivent être franchies par ces femmes, « la langue et l’isolement ». Pour elle, « les femmes ne choisissent pas de rester au foyer ». La suite s’est déroulée à grande vitesse. Lors d’un start-up week-end, les deux néo entrepreneures « pitchent » leur idée. « C’était le dimanche, et le jeudi la SNCF organisait un événement. » Loubna et Donia ne se démontent pas et organisent leur premier buffet, avec leur première mama. La mayonnaise « Mama cook’in » prend grâce au bouche-à-oreille.

Elles sont rapidement repérées et contactées par Youssef Oudahman. A la tête de Mamma’s kitchen, le jeune homme travaille à monter des restaurants éphémères pour les mamas. « Nous avons les mêmes valeurs, la même vision, nous voulons résoudre le même problème », raconte Loubna. Début 2017, les deux projets fusionnent pour donner naissance à Meet my mama.

Du bon plan dont on entend parler, Meet my mama est devenu une offre structurée, « une plate-forme sur laquelle commander son traiteur ». Loubna récolte les besoins de l’entreprise, réalise un devis, et Donia joue les chefs d’orchestre en choisissant la mama en fonction de la demande, puis loue la vaisselle, trouve les serveurs et gère la livraison. « L’avantage de la plate-forme internet est que nous pouvons gérer plusieurs événements en même temps », soulignent les trois associés ambitieux et conscients de leurs responsabilités. « C’est de la food, nous ne pouvons pas nous planter », ajoute Youssef Oudahman. Avec l’augmentation de la demande, leurs rôles au sein de l’entreprise est amené à évoluer en prenant une dimension managériale.

La logistique, le nerf de la guerre

Chaque mois, la structure est capable de couvrir 100 à 200 événements et un total de plus de 700 événements ont été organisés pour 250 entreprises clientes, dont de belles pointures (Hermès, Bouygues, Google, etc.) « Notre plus gros événement sera pour Change Now en septembre  avec 1500 personnes à nourrir », s’enthousiasme Loubna Ksibi. Pour en arriver là, la petite troupe a mis les mains dans la pâte. « La logistique, c’est le nerf de la guerre ! », souligne la jeune femme. « Au début, ça a été très dur. Nous nous sommes retrouvés à couper des légumes à quatre heures du matin, nous avons eu un accident de voiture à cause de la fatigue… », raconte la toute jeune entrepreneure qui apprend aujourd’hui à manager une équipe d’une petite dizaine de personnes. Des salariés qui rejoignent l’aventure en raison de la force du projet. « Notre génération veut du sens au travail, là, ils peuvent s’impliquer. »

En parallèle de l’entreprise, « rentable depuis le début car nous sommes prestataires de services, nous mettons en relation des entreprises et des chefs », Meet my mama a monté une association pour accompagner les femmes avec lesquelles ils collaborent. Empower my mama permet à chaque femme de recevoir les outils pour devenir leur propre patron. La branche de l’entreprise est gérée par leur nouvelle recrue, Fatima Bouhadjeb qui a la tâche d’animer quatre pôles : Inspire my mama, une plate-forme en ligne pour diffuser les portraits de femmes dans des articles et des vidéos ; la Mama académie pour les former, de l’hygiène à la sécurité, en passant par le numérique et le design culinaire ; la Mama success box, un outil numérique permettant aux femmes d’être plus autonomes de sélectionner leurs prestataires, de s’inscrire à des formations, d’organiser leur emploi du temps ; et Launch my mama, un système pour penser à l’après en donnant aux femmes des opportunités professionnelles dans le monde de la cuisine toujours en demande de main d’œuvre qualifiée. Meet my mama veut créer un système global qui prenne par la main les femmes de leurs premiers pas à leur envol.

« Nous leur faisons passer un certificat d’hygiène et sécurité, indispensable, elles assistent à des ateliers de design culinaire, travaillent leurs soft skills [compétences douces, ndlr] car elles se déplacent dans les entreprises, apprennent les bases du numérique, et peuvent être épaulées d’un accompagnement juridique. »  Au total, 100 femmes immigrées, réfugiées ou expatriées collaborent régulièrement avec la start-up. « Notre objectif est d’atteindre les 1 000 mamas à la fin de l’année en France, mais aussi en Europe », ajoute Youssef Oudahman. Quelques villes comme Lyon, Londres et Bruxelles sont dans le viseur de ces trois entrepreneurs car présentant les « mêmes caractéristiques que Paris ».

Les trois associés, leur équipe et les mamas ne comptent pas s’arrêter en si beau chemin. Au printemps dernier, pour accompagner le lancement de yaourts aux saveurs du monde, Danone a proposé une association avec Meet my mama. Rue de Nazareth à Paris, les mamas réalisent le brunch du dimanche et le dîner du mercredi à l’Atlas, une cantine sponsorisée par Danone. Durant le repas, un conférencier et la mama sont invités à raconter le pays à l’honneur. L’expérience est reconduite tous les jours, de septembre à décembre, et probablement déclinée à Marseille. « Nous voulons que l’Atlas soit le premier spot de cuisine du monde à Paris », souligne Loubna. Outre les brunch et dîners, l’équipe a mis sur pieds une chasse aux trésors du monde dans la capitale pour voyager d’une épicerie tamoul à un temple Sri lankais. 

 

5 pépites de la FoodTech à suivre

Pour les gourmands, les anti gaspillage, et les curieux, les projets FoodTech fleurissent en France depuis quelques années. Profitant de la vague de livraison à domicile et de la tendance au mieux manger, les entrepreneurs se lancent avec plus ou moins de succès.

  • Frichti. Rendre accessible le bon au quotidien. C’est l’objectif que se donnent Julia Bijaoui et Quentin Vacher – un ancien de Birchbox Europe, des box de produits de beauté – en proposant chaque jour des menus variés et des produits de qualité à des tarifs abordables. A la différence de Deliveroo qui livre des repas de restaurants, Frichti livre ce qu’il cuisine. Des box food.
  • Seazon, la box de Foodchéri. La start-up FoodChéri (rachetée par Sodexo) qui livre des milliers de petits plats en région parisienne réalisés dans ses cuisines de Montreuil a lancé au printemps dernier une box de quatre à dix repas frais et sains operculés, Seazon. Et livrés par la Poste.
  • Nestor. Encore de la livraison. Mais cette fois, il s’agit de livrer aux entreprises, dans les quartiers d’affaires, le même repas, entrée-plat-dessert, entre 12 et 14h, et pour un prix unique. Le choix de l’efficacité.
  • Epicery. Site internet et application lancés en 2016 par Elsa Hermal. A 28 ans, l’entrepreneure a été repérée par le palmarès Under 30 de Forbes des jeunes de moins de 30 ans qui révolutionnent leur secteur. Epicery permet aux artisans et métiers de bouche d’étendre leur clientèle en proposant des commandes sur la plate-forme. Les produits sont ensuite livrés à domicile par des prestataires vert roulant à bicyclette ou en véhicule électrique.
  • Too good to go. Trop bon pour être jeté. L’appli anti gaspi propose de se faire plaisir tout en luttant contre le gâchis. Lancée en 2016 par Lucie Basch, l’application permet de récupérer les invendus de partenaires tels que des pâtisseries, des traiteurs, des restaurants et supermarchés.
  • Et retrouvez nos « dix startuppeuses food à suivre« 

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