« Économiquement, hommes et femmes constituent presque deux castes ; toutes choses égales, les premiers ont des situations plus avantageuses, des salaires plus élevés, plus de chances de réussite que leurs concurrentes de fraîche date » soulignait Simone de Beauvoir dans le Deuxième Sexe. Heureusement, de plus en plus de femmes viennent aujourd’hui faire démentir l’analyse du Castor – surnom donné par un ami en 1929 en pensant à beaver, castor en anglais, et qui se prononce presque comme Beauvoir, à l’instar de l’avocate Rebecca Silli ou Karena Belin, co-foundatrice de WHub et AngelHub, à Hong-Kong. Elles sont en effet de plus en plus nombreuses à diriger des institutions économiques et des réseaux clés. Retour pour Forbes avec la première femme à diriger la Chambre de Commerce et d’Industrie Française de Hong-Kong (FCCIHK).
Questions/Réponses à la Présidente de la Présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Hong-Kong
Rebecca Silli, présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française de Hong-Kong
- Quel est le rôle de l’organisation, son ambition et votre vision ?
« La FCCIHK est tout d’abord une organisation privée. Les statuts sont complètement différents de ceux des chambres de commerce opérant sur le territoire français. Celle de Hong-Kong a par exemple été établie en 1986 par 6 entrepreneurs français. Ses missions peuvent être catégorisées en deux types : des services proposés « en amont », avec une offre de prospection pour les entreprises qui souhaiteraient s’implanter à Hong-Kong, et les services d’implantation « en aval » pour aider à la création d’une société sur place, organiser par exemple les démarches nécessaires à l’ouverture de comptes bancaires, la location de bureaux, l’obtention de visas. La Chambre de Commerce offre également un service de recrutement pour les sociétés. La FCCIHK opère par ailleurs un business center avec un service de sous-location de bureaux : 105 postes de travail, occupés à près de 93 %. Cet espace de travail est un lieu privilégié pour les entreprises s’implantant à Hong Kong et souhaitant bénéficier du réseau de la Chambre. »
- Comment se finance la FCCIHK ? A-t-elle connu une forte croissance depuis 10 ans ?
« Nous ne recevons aucun financement de l’État. Notre budget est d’environ 3 millions d’euros et nous comptons une trentaine de salariés. Les revenus proviennent à hauteur de 20 % des cotisations de nos membres, et 80 % de nos divers services (évènements et comités, missions, implantation, business center, recrutement). Nous avons effectivement connu une croissance très forte depuis plus de 10 ans, avec plus de 900 membres, symptomatique de la croissance de la communauté française à Hong Kong sur la même période. Il est intéressant de souligner que plus d’un tiers de nos membres – sociétés ou personnes physiques – ne sont pas Français. Cette chambre est véritablement internationale. »
- Quel projet passé souhaitez-vous mettre en valeur ?
« Le 5 mars dernier, nous avons accueilli 500 dirigeants d’entreprises de haut niveau pour célébrer la Journée Internationale des Droits de la Femme lors de notre conférence de soutien à HeForShe, une initiative mondiale des Nations Unies. L’événement de cette année — qui en est à sa troisième édition — a été organisé par la Chambre Française de Hong Kong et la Bourse de Hong Kong (Hong Kong Exchanges & Clearing Limited). Nous organisons également un très grand évènement de sourcing : Made in Asia, pour la 9ème édition. Très peu de gens savent que ces évènements sont organisés par la chambre française tant ils sont internationaux et intégrés à la communauté d’affaires Hongkongaise »
- Comment devient-on Présidente de la FCCIHK ?
« J’ai tout simplement été élue par le conseil de surveillance de la Chambre, composé de 40 membres, dont 25 % de femmes, ce conseil étant lui-même élu par l’Assemblée Générale. Je suis d’ailleurs la première présidente de la FCCIHK. C’est un vrai engagement, j’y consacre environ 15 % de mon temps de façon bénévole, mais c’est une expérience extrêmement gratifiante. Elle me permet de côtoyer des milieux économiques et des secteurs très divers, de développer des liens avec le Gouvernement de Hong Kong et la communauté d’affaires internationale, et de contribuer à soutenir le développement de la communauté d’affaires française. »
Madame Rebecca Silli avec le Consul Général de France de Hong-Kong et Macau, Monsieur Alexandre Giorgini, et le Directeur Général de Business France Monsieur Christophe Lecourtier, lors de la signature de l’accord de partenariat en décembre 2018
- Portez-vous un regard d’avocate lorsque vous traitez des affaires de la FCCIHK ? Que vous apporte votre position de Présidente de la Chambre de Commerce ?
« Presque toujours, sans doute par déformation professionnelle, notamment dans l’évaluation des risques, et dans la gestion de la gouvernance. La fonction de Président consiste surtout à accompagner les équipes permanentes dirigées par Sophie Leconte, avec le soutien des membres du Comité Exécutif qui m’entourent, pour gérer cette organisation – véritable PME. . Mon travail à la Chambre me permet sans aucun doute de rester très informée des changements sectoriels, de la transformation économique et sociale de Hong Kong et de l’évolution des réseaux professionnels, de plus en plus désintermédiés. C’est le prochain défi : faire en sorte que la Chambre reste pertinente pour ses membres et saisisse les opportunités de la « Greater Bay Area », comme tous les acteurs économiques ici présents. »
- Dernière question plus personnelle : que feriez-vous si vous aviez 25 ans ?
« Je partirais sans hésiter à nouveau en Chine, comme je l’ai fait en 2000 – mais j’apprendrais cette fois-ci le mandarin!»
Mais Rebecca Silli n’est pas la seule femme à diriger un réseau économique à Hong-Kong. « Un parcours tout aussi impressionnant est celui de Madame Karena Belin, Co-Founder de WHub et AngelHub, premier écosystème de startups à Hong-Kong » souligne Mathilde Aubinaud, fondatrice de la Saga des Audacieux. Second portrait pour Forbes d’une femme à la tête d’un réseau clé à Hong-Kong.
Karena Belin,Co-Founder de WHub
Questions/Réponses à Karena Belin, Co-Founder de WHub et AngelHub, premier écosystème de startups à Hong-Kong
- WHub en quelques mots ?
« La mission de WHub consiste à aider les startups à se développer et croître, tout en promouvant l’ensemble de l’écosystème. WHub, le “power-connector”, permet à travers différents programmes, on-line, et off-line, à différents acteurs économiques d’accéder au monde de l’innovation. WHub crée ainsi des passerelles vers d’autres écosystèmes, permettant aux startups de s’étendre à l’étranger et de trouver des financements grâce à AngelHub.»
- Et AngelHub, en quelques mots ?
« AngelHub est la seule Equity Crowdfunding Platform pour investisseurs professionnels régulée par la SFC – autorité de régulation financière hongkongaise. AngelHub démocratise la possibilité d’investir dans les startups du monde entier qui cherchent à croître en Asia, créant ainsi une toute nouvelle classe d’actifs pour les investisseurs. Je suis très fière de voir que HK est désormais l’un des écosystèmes les plus florissants d’Asie pour les Start-ups. »
L’équipe de WHub, de gauche à droite: Karen Contet Farzam, co-founder and chief hustler,
Gram Milosevic, Alchemist and CTO, Diane de Beaudrap, COO, Karena Belin, co-founder and CEO
- Comment voyez-vous évoluer Hong-Kong et le système des Startups ?
« En trois ans, Hong Kong a donné naissance à 9 “unicorns”, société valorisée à plus d’un milliard de dollars US, affichant la plus grande densité de “unicorns” par habitant dans le monde. Parmi nos records, nous comptons également Sensetime, la société avec la plus grande valorisation au monde en matière d’IA, mais aussi TNG wallet, qui a levé la plus haute série A pour une FinTech, et les deux premiers accélérateurs au monde spécialisé en IA et Hashgraph (technologie de blockchain). On peut trouver plus de détails dans nos rapports sur écosystèmes de l’innovation. Stratégiquement positionné au cœur de “Greater Bay Area”, qui devrait atteindre entre 3 et 4 trillions de dollars US de PIB entre 2025 et 2030, Hong Kong continue à grandir très rapidement. Imaginez que vous mettiez la Silicon Valley, New York et Las Vegas dans la même région : Bienvenue dans la Greater Bay Area ! »
« Les femmes portent la moitié du ciel » affirmait le Président Mao Zedong. Rebecca Silli et Karena Belin sont finalement les nouveaux visages de ces femmes qui réussissent et qui font prospérer la France à l’étranger. Les progrès pour les femmes sont donc là, en France comme à Hong-Kong. Si le portrait de ces deux femmes indique une évolution dans la bonne direction : « n’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » prévenait aussi Simone de Beauvoir.
Interview de la Présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Hong-Kong Rebecca Silli et Karena Belin, Co-Founder De WHub Et AngelHub
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