La naturopathie, une discipline qui ne connaît pas la crise. Ces nouvelles figures du bien-être sont aujourd’hui incontournables dans nos salles de sport, dans nos centres-villes ou dans les palaces, des lieux souvent précurseurs en matière de wellness. Derrière le phénomène, un double enjeu : booster ses défenses immunitaires face au Covid-19, mais aussi se libérer de déséquilibres chroniques ou passagers. Définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme la troisième médecine traditionnelle, derrière les médecines chinoise et ayurvédique, la naturopathie est une véritable réponse à notre époque. Forbes a rencontré Dimitra Kontoyannatos, naturopathe au Beau-Rivage Palace de Lausanne, pour un éclairage salutaire.
Une définition de la naturopathie ?
Dimitra Kontoyannatos : On l’appelle également la médecine traditionnelle européenne. C’est une discipline en santé complémentaire qui a pour but de rééquilibrer, via l’hygiène de vie, ce qui est déséquilibré chez une personne. On considère que les déséquilibres sont à l’origine des maux passagers et chroniques que vit l’individu, et qui peuvent se transformer en maladie de stade avancé, ce qui nécessite alors la prise en charge par un médecin allopathique. Pour accompagner le retour à l’équilibre, les naturopathes s’intéressent de manière très individualisée à l’alimentation, à la mise en mouvement du corps et des liquides, et à la gestion de l’émotionnel et du mental.
Comment avez-vous cheminé jusqu’à la pratique de cette discipline ?
D.K : Après avoir terminé un master en sociologie à l’EHESS (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales), j’ai commencé à travailler dans un institut d’études parisien. J’aimais beaucoup me balader dans les parcs et jardins car la nature me manquait. Un jour, je me suis rendu compte que je pouvais disserter sur des sujets pointus dans mon domaine mais qu’il m’était impossible d’identifier l’espèce des arbres plantés dans ma rue… ce qui m’a paru complètement absurde. Mes parents ne m’ont pas transmis de savoir sur les arbres et les plantes et je n’ai reçu aucune éducation sur ce sujet à l’école. J’ai donc décidé de m’intéresser à cette « nature » que je ne connaissais pas en intégrant l’Ecole des Plantes de Paris où l’on apprend, entre autre, à identifier et utiliser les plantes médicinales de nos régions.
De fil en aiguille, j’ai entendu parler de la naturopathie et j’ai découvert une discipline traditionnelle qui redonne de l’autonomie aux individus sur les questions de santé et de bien-être. J’ai intégré à temps plein l’école de naturopathie ISUPNAT de Paris qui fait partie de la fédération française FENA ( Fédération française des Écoles de Naturopathie), et j’ai commencé à pratiquer cette discipline dès la fin de mon cursus. Et maintenant, depuis presque un an, j’exerce la naturopathie au Beau-Rivage Palace de Lausanne.
Hier confidentielle, votre médecine a de plus en plus d’adeptes car perçue comme une véritable réponse à notre époque. Sur quelles problématiques êtes-vous principalement sollicitée ?
D.K : Beaucoup de personnes viennent pour des problèmes récurrents pour lesquels ils ne trouvent pas de réponses satisfaisantes. En tête, on retrouve les problèmes digestifs : constipation, ballonnement… tout ce qu’on regroupe sous le nom d’intestin irritable ou colopathie fonctionnelle. Puis viennent les problèmes de sommeil, de fatigue chronique, de saute d’humeur et d’épuisement allant jusqu’au burn-out. Il y a aussi beaucoup de personnes ayant des terrains allergiques, des problèmes de peau et des problèmes veineux. On retrouve également tout ce qui concerne la sphère uro-génitale, particulièrement féminine : douleurs avant ou pendant les règles, irrégularité du cycle menstruel, infections à répétition.
Comment se déroule la première consultation ?
D.K : La première consultation est un bilan global de l’individu, bien que généralement les personnes arrivent avec une problématique définie. Le naturopathe porte un regard global et non spécifique sur les organes. Prenons l’exemple d’une personne qui arrive pour une constipation chronique, il y aura plusieurs points à éclaircir au-delà de l’alimentation et du système digestif : est-ce qu’elle dort bien, est-ce qu’elle vit beaucoup de stress ? Est-ce que son foie est surchargé ? Est-ce qu’elle respire correctement en utilisant le diaphragme, le muscle qui sépare la cage thoracique du système digestif ? C’est donc pour prendre le problème dans sa globalité, et ne pas passer à côté de quelque chose, que l’on commence par une observation corporelle avant de discuter plus en profondeur. Pendant toute la séance, le naturopathe récolte des informations sur le fonctionnement spécifique de l’individu, afin de le conseiller de manière personnalisée. Car nous sommes toutes et tous différents et pour deux personnes qui viennent en consultation avec une problématique similaire (par exemple la constipation) des réponses différentes peuvent être apportées.
A la fin de la séance, le naturopathe estime quelles sont les priorités et propose des ajustements d’hygiène de vie à mettre en place. Par exemple, pour certaines personnes ayant des troubles digestifs, la priorité ne se trouve pas dans l’alimentation, mais dans la mise en mouvement du corps et l’apaisement du mental. Le naturopathe peut conseiller différents outils qu’il a appris à utiliser : alimentation, mise en mouvement du corps, exercice de respiration, soin avec l’eau. Mais aussi des outils extérieurs comme les fleurs de Bach, les huiles essentielles, les plantes médicinales et les compléments alimentaires. Le naturopathe peut aussi réorienter vers des spécialistes : réflexologue, posturologue, psychothérapeute, hypnothérapeutes (…) si besoin.
Le stress, la pollution, les addictions (dont numérique)… sont – dit-on – les maux du XXIème siècles. Quelles règles s’appliquer au quotidien pour atténuer le niveau de tension ?
D.K : La naturopathe donne des conseils très personnalisés, il n’existe donc pas de ‘règles précises’ applicable pour tous. Par exemple, dire à une personne qui déborde d’énergie le soir qu’il faut se coucher tôt peut être contre-productif. Tout comme expliquer à une personne qui n’a jamais faim le matin la composition du petit déjeuner idéal ne fait pas sens. Cela dit, j’inviterais les personnes qui le souhaitent à s’observer et à se demander si elles sont totalement en accord avec leur manière de vivre. S’observer, et donc être dans un temps de repos, est devenu très compliqué dans nos modes de vies. Certaines personnes vivent dans un état de stress constant et n’ont plus conscience que cet état n’est pas sensé perdurer. Car le stress n’est pas mauvais si l’on donne au corps l’occasion de se reposer. En revanche, être en état de stress continu, et donc puiser dans ses réserves vitales, amène au burn-out.
Il en va de même pour la pollution. Quand un corps en bonne santé est face à un agent toxique, il réagit aussitôt pour s’en débarrasser : transpiration excessive, fièvre, vomissement. Un corps surchargé par une grosse quantité de polluants n’arrivent plus à suivre et l’individu ne se rend même plus compte qu’il est intoxiqué jusqu’au moment où la maladie se déclare. Pour savoir où l’on en est réellement, mon conseil serait de faire des pauses. Tous les jours, de toutes les manières possibles : si vous êtes une personne qui ne dort pas beaucoup mais qui continue d’être opérationnel grâce à la caféine ou au sucre industriel, essayez d’arrêter le café et le sucre quelques jours pour vous rendre compte de votre niveau réel de fatigue. Après la phase d’observation qui permet de prendre conscience de la réalité des choses, vient le moment d’apprendre à se recharger en énergie.
Globalement, une alimentation riches en légumes et fruits biologiques, locaux et de saison va apporter les vitamines et minéraux dont le corps à besoin. Observer la nature et sentir le vent, l’eau et le soleil sur sa peau redonne de l’énergie, y compris en ville et dans un périmètre restreint.
Dans ce contexte de pandémie de Covid-19, davantage de personnes « s’essaient » à la naturopathie. Comment cette médecine alternative nous aide-t-elle à renforcer nos défenses immunitaires ?
D.K : En rééquilibrant ce qui est déséquilibré, on renforce notre système digestif ainsi que notre capacité de récupération physique et émotionnel. Par conséquent, nous renforçons notre capacité naturelle à gérer les agents pathogènes extérieurs comme les virus. S’il est parfois pertinent de se protéger de l’extérieur via les masques et produits désinfectants, cela ne fait pas sens de se focaliser dessus sans prendre soin de notre intérieur. Tous les jours de notre vie, notre corps, ce merveilleux et complexe organisme, compose avec des virus et des bactéries qui pourraient être dangereux pour nous. Aidons le à faire son travail. Plus concrètement, certains compléments alimentaires ou plantes stimulent le système immunitaire et peuvent être intéressants, comme la propolis, la gelée royale, l’echinacea et la vitamine C. Mais il faut prendre conscience que ses produits se prennent en cure, pour une durée limitée dans le temps, et sont utiles uniquement si un travail de fond est réalisé en parallèle.
Des conseils pour nous accompagner au mieux en cette rentrée…
D.K : Pour beaucoup, ces derniers mois ont été l’occasion de mettre les choses à plat, de redéfinir les priorités et de prendre conscience de certains déséquilibres. Sur le long terme, cette rentrée 2020 est l’opportunité de mettre en place les changements qui seront justes pour nous : un déménagement vers un lieu de vie qui nous convient mieux, une réorientation professionnelle vers un métier plus épanouissant ou un aménagement différent de l’emploi du temps de la semaine qui laisse plus de temps pour réaliser ce que l’on mettait toujours de côté.
Sur le court terme, c’est le bon moment pour se faire accompagner par des professionnels de la santé et du bien-être au naturel qui donneront des conseils et feront un suivi personnalisé pour rester en équilibre face à l’incertitude. C’est aussi l’occasion de s’intéresser aux fleurs de Bach, elles sont très efficaces pour calmer le stress venant des doutes et de l’inquiétude face à l’avenir. Pensons également aux tisanes de plantes médicinales de nos régions, comme l’aubépine, qui permet de calmer l’anxiété et prépare au sommeil réparateur.
Et s’il ne faut garder qu’un conseil : aménagez-vous des temps de pause, de la manière qui vous convient. Bain, lecture, massage, balade dans la nature… Chaque jour, trouvez votre manière de faire une pause.
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