Dormir au beau milieu de la forêt perché sur un arbre, la tête dans les étoiles, est une expérience qui séduit de plus en plus. Effet de mode ? Pas si sûr en cette ère de Covid-19 et d’urgence à modérer sa consommation numérique…L’entrepreneure Anne-Caroline Frey nous invite à prendre la voie du bien-être sylvestre le temps d’un séjour épicurien sous le signe de l’art. Forbes est allé à la rencontre de l’instigatrice de Loire Valley Lodges, une Parisienne qui s’est mis au vert et qui porte un projet inédit en France. Rencontre.
Plus qu’une aventure entrepreneuriale, Loire Valley Lodges c’est le film de votre vie et de vos passions…
Anne-Caroline Frey : Complètement ! Loire Valley Lodges, c’est le couronnement de toute une vie. Quand j’ai prononcé mon discours d’inauguration, j’ai dit que je présentais mon « huitième enfant »… fruit de la grossesse la plus longue et la plus compliquée ! Pouvoir regrouper dans un même lieu toutes mes passions : l’art monumental et l’art contemporain, la nature la plus brute, la sylvothérapie, l’épicurisme… est une démarche aussi insolite que novatrice. Ce concept calqué sur mon parcours de vie est donc forcément singulier puisqu’il fait écho à mon vécu et à celui de ma famille. Chaque étape de mon existence m’a amenée à cheminer vers la création de ce concept hôtelier. Unique. Je rembobine : Parisienne de souche, j’ai aussi un ancrage plus terrien du côté de mon père, Berrichon. Après des études dans la finance à Dauphine, j’ai complété ma formation par un cursus en Marketing & Communication au CELSA. Par la suite, j’ai fait carrière dans la publicité en tant que media planner. Avec trois enfants à la maison, j’avais des journées marathoniennes !
En dehors de ma famille, j’étais aussi habitée par une autre passion, l’art. Fort fâcheusement, j’étais bien souvent frustrée de ne pas pouvoir vivre la meilleure expérience, car lorsque j’arrivais dans les vernissages, il était souvent très tard ! Les artistes étaient fatigués, les lieux commençaient à se vider… Bref, pas l’idéal pour passer un bon moment. Ceci a suscité l’envie d’imaginer un lieu d’exposition. Ainsi, j’ai monté ma société ‘Art Galerie’ pour accueillir des accrochages éphémères d’une durée de un à trois jours. Je mettais en avant un artiste qui m’avait touché auprès de collectionneurs avertis de mon réseau.
Mon idée a très bien marché, si bien que j’ai ensuite lancé des dîners 100% arty et des événements artistiques dans ma maison de campagne en Touraine. Bien plus qu’un lieu de villégiature de Parisiens hyperactifs, la Touraine est une terre qui m’appelle. Bertrand, l’homme que j’ai épousé en secondes noces est originaire de la région. Ensemble, nous nous sommes retrouvés à la tête d’une véritable tribu avec ses trois enfants, mes trois enfants et notre petit dernier ! Chaque week-end, nous retrouvions notre havre de paix de la Loire, jusqu’à décider un jour de venir nous y installer quand nos aînés sont partis faire leurs études supérieures.
C’est à ce moment-là que j’ai découvert quelque chose… ou plutôt que mes amis citadins m’ont amenée à prendre conscience d’un changement.
C’est-à-dire ?
A-C.F : Ma migration en Touraine a eu pour effet de me transformer : j’étais débordante d’énergie, plus épanouie que jamais. A mesure que mes amies parisiennes me rendaient visite, elles constataient ma grande forme… déplorant au passage leur état de fatigue exacerbé par le stress. J’ai alors pris conscience que la forêt dégageait potentiellement quelque chose de chimique, d’énergétique : les arbres participaient à cet état de renaissance, de plénitude. J’ai fini par mettre un mot sur ce bien-être : la sylvothérapie. Cette thérapie part du principe qu’on peut se soigner grâce à l’énergie déployée par les arbres. De fait, j’ai décidé de me documenter pour en apprendre davantage en vue de maîtriser le sujet.
J’ai donc découvert que si l’on effectuait une promenade dans les bois en prêtant attention à ses sensations, le bain de forêt devenait une séance de méditation et de relaxation, voire une promenade de santé. Des études menées au Japon ont montré que le sang de personnes ayant marché dans les bois contient un taux de cortisol, l’hormone du stress, beaucoup plus bas que celui de personnes ayant couvert la même distance en ville. D’autres chercheurs constatent une diminution du sucre dans le sang ainsi que de la tension artérielle. J’ai par ailleurs contacté des experts en la matière, Laurence Monce (coach, naturopathe et conférencière) et Jean-Marie Defossez (un scientifique), pour me former à l’art de la sylvothérapie. Ces deux sommités françaises ont investigué le sujet dans plusieurs livres.
Très naturellement, j’ai fait le choix d’intégrer cette dimension dans mon projet d’éco-lodges de luxe arty.
Vous nous proposez donc une expérience hôtelière très pointue et inédite. Comment présenteriez-vous Loire Valley Lodges ?
A-C.F : Au cœur d’un espace forestier protégé de 300 ha, à 25km du château de Chenonceau et du château d’Amboise, Loire Valley Lodges est un lieu exceptionnel haut de gamme composé de 18 suites de 55m² nichées au cœur des arbres, à 4m de hauteur, dont 25m² de terrasse avec jacuzzi privatif (sauna dans l’hébergement pour les personnes à mobilité réduite). Ces lodges sont éparpillés dans une forêt privée autour d’un corps de ferme rénové, offrant tout le confort d’un hôtel de luxe – piscine, bar-lounge, restaurant, room-service. Dessinés par l’architecte tourangelle Isabelle Coulin, les différents cottages sont répartis sur une surface de 5 ha. Nous avons travaillé main dans la main avec les autorités locales ainsi qu’avec une association de protection de la nature et de la biodiversité pour dresser un inventaire de la faune et de la flore. Dans une idée de communion parfaite avec la nature, Loire Valley Lodges respecte son environnement préservé.
Le confort de nos lodges ouverts sur la forêt par de larges baies vitrées et terrasses privées favorise l’immersion dans la nature brute. Le spa et les massages prodigués directement dans les suites ou en terrasses nous ouvrent la voie du bien-être sylvestre à partir d’huiles essentielles issues de nos arbres. Dans cet écrin naturel et chaleureux, le temps s’arrête. Parmi les expériences, imaginez-vous masser au gré des senteurs et des sons de la nature environnante par la thérapeute Anne-Sophie Dufeutrelle, une spécialiste dans le rééquilibrage des énergies… Ici, le luxe est de pouvoir s’évader, de prendre de la hauteur dans un bain de forêt avec la promesse d’un séjour sensoriel d’exception. Pour ce qui est de la gestion de l’établissement, j’ai confié les clefs à Tancrède Bazin de Caix, expert chevronné de l’hôtellerie 5 étoiles. J’ai également la chance d’être accompagnée par le chef Hippolyte Delcher qui réinterprète la cuisine de terroir en l’agrémentant de saveurs d’ailleurs. Ce dernier revient tout juste de Hong Kong.
L’art est par ailleurs un invité permanent que vous incorporez à tous les niveaux. Qui sont les artistes impliqués dans le projet ?
A-C.F : J’ai réuni des artistes de renom pour lesquels j’ai eu un coup de cœur et qui n’ont de cesse de me bouleverser. Leurs œuvres suscitent en moi de très fortes émotions qu’il me fallait partager tant dans le design des suites que dans la création d’un véritable parcours d’art extérieur. Ainsi, j’ai invité Michel Audiard, Laurent Garreau, Tara, Aurèle, Jacques Bosser pour que chacun insuffle sa personnalité aux différents lodges et nous offre une balade inspirante en pleine nature à travers l’installation d’œuvres contemporaines monumentales. A l’occasion d’une promenade, vous pourrez vous arrêter devant un totem d’Aurèle, un cerf de Laurent Garreau, une fourmi géante de Michel Audiard, une vache de la Cow parade peinte par Jacques Bosser. Ces artistes ont eu carte blanche pour designer les habitations, ce n’est qu’après que j’ai chiné des meubles en fonctions de leurs projets.
Dans un autre registre, il y a aussi Vincent, un ténor à la voix incroyable qui est passé par l’Opéra de Vienne, de Shanghaï… Cet artiste nous propose des expériences mémorables en pleine forêt dans une acoustique sans pareille…
Loire Valley Lodges a ouvert ce 1er juillet et vous étiez déjà complet…
A-C.F : Un éco-lodge de 5 ha dans une forêt protégée de 300 ha, c’est déjà en soi la promesse d’évoluer dans un environnement sain où la distanciation sociale est assurée. Mais au-delà de la crise du Covid-19 et de ses terribles conséquences dans nos vies, les gens ont besoin d’un retour aux sources, de déconnecter. La nomophobie est aussi symptomatique de nos sociétés esclaves du numérique. Loire Valley Lodges devient alors ce havre de paix où l’on retrouve ses sens, où l’on en découvre de nouveaux, pour juste se rappeler la signification “être vivant”. C’est si bon d’être vivant : cesser de courir après le temps, de se dépasser, de se surpasser… Ici, on vous propose d’aller à l’essentiel : vivre l’instant présent, suivre une envie, écouter et s’écouter. Le but : faire lâcher le mental pour ouvrir les sens.
Parmi les nombreuses activités proposées, j’encadre des personnes – en groupe ou individuellement – lors de séances de sylvothérapie. A cette occasion, « j’aime » les priver d’un sens (la vue) pour en exacerber d’autres comme le toucher, l’ouïe, l’odorat, cet exercice a également pour vertu de solliciter les sens intérieurs qui répondent davantage du registre de l’émotion (envie de rire, de pleurer…). En d’autres termes, ma philosophie est d’amener les gens à extérioriser des choses, à réaligner leurs chakras en se mettant face à un arbre.
En milieu urbain, notre vue « étouffe » nos autres sens car nos yeux sont sur-saturés d’images, d’informations, de requêtes…
Parce que nous avons tous ‘un arbre’ caché au fond de nous, que ce soit celui de nos souvenirs d’enfance, celui à qui nous aimions nous confier petit, celui qui nous offrait ses fruits l’été… (ré)-apprenons à regarder les arbres en tant qu’êtres vivants.
Est-ce que vous prévoyez d’autres implantations ?
A-C.F : Bertrand et moi souhaitons développer ce projet dans d’autres régions qui ont une forte identité culturelle à l’image de la Touraine. Nous pensons aux Landes près de Bordeaux, au Pays Basque ou même à La Camargue où il y a une nature brute et sauvage. Des proches me proposent de regarder aussi du côté de l’Alsace. Hier réfractaires, les banques sont enclines à nous suivre aujourd’hui…
Quoi qu’il en soit, pour l’heure, j’ai d’abord envie de faire grandir le petit.
Fraîchement inauguré, Loire Valley Lodges a déjà à cœur de venir en aide à nos soignants en soutenant l’opération : « Prenons soin de nos soignants, naturellement! »
Plus d’informations sur : https://fr.ulule.com/prenons_soin_de_nos_soignants_naturellement/
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