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Edwige Tuarze ( Eléa & Cybèle), L’Accord Parfait

© Lucie Sassiat

Jeune entrepreneure de 26 ans, Edwige Tuarze a pour ambition de reconnecter mode et nature via sa marque Eléa & Cybèle et ses collections alliant « éthique et chic », afin de recréer un cercle vertueux au sein de la seconde industrie la plus polluante du monde.

« Beauté universelle, surnaturelle, éternelle, Eléa, protagoniste de la nuit des temps de Barjavel, est la quintessence de la mode quand Cybèle, déesse phrygienne de la nature sauvage poursuivait le dessein de posséder l’entièreté de celle-ci ». Une symbiose savamment orchestrée par Edwige Tuarze, jeune entrepreneure de 26 ans qui, au sein de la marque « Eléa & Cybèle », fait le pari de préserver ce fragile équilibre. Un postulat à haut risque et un défi à la mesure de la force de persuasion d’une jeune créatrice armée d’authentiques convictions.

« Nous voulions réellement mettre un terme à ce système qui fait de la mode une industrie qui crée des déchets et qui est linéaire », résume la créatrice d’une voix douce qui n’en demeure pas moins ferme quand elle dépeint l’ambition d’une collection qui se veut « premium, éthique et chic » avec, en filigrane, la volonté de redonner ses lettres de noblesse à l’économie circulaire. Pour ce faire, Edwige Tuarze a tracé deux sillons : l’utilisation de tissus végétaux biodégradables et « l’upcycled » qui recycle les tissus de produits finis mais invendus des maisons de luxe ou de chutes.

Vision éthique

Fidèle à cette notion d’harmonie, Edwige Tuarze lèvera le voile, le 9 mars prochain, à l’occasion de la Journée de la Femme digitale, sur la première collection « d’Eléa x Cybèle » où l’équilibre entre collection permanente organique (60% de la collection totale) et « Upcycled » (40%) sera respectée. « Nous voudrons prouver à cette occasion aux marques qu’il est possible de créer une collaboration éthique très belle, avec un magnifique design, tout en respectant les codes du premium luxe », déclare la jeune femme. 

Autre doléance de la créatrice, davantage compliquée à respecter : disposer de fournisseurs et de producteurs de tissus 100% français et qui partagent les valeurs prônées par « Eléa & Cybèle ». « Notre priorité sera évidemment de soutenir le savoir-faire français, ce qui va peut-être s’avérer compliqué dans la mesure où cette industrie est embryonnaire dans l’Hexagone », précise la créatrice. Mais ce « Made in France » assumé ne sera pas pour autant revendicatif. « Nous avons aussi la responsabilité et le devoir d’offrir une jolie collection à nos clientes quitte à nous tourner vers des producteurs italiens ou britanniques ». L’équilibre, toujours.

Par monts et par vaux

Si la date du 9 mars fera résolument office de juge de paix pour Edwige Tuarze et ses équipes, inutile de préciser qu’elle peaufine, affine et cisèle la matière brute d’Elea & Cybèle depuis de longs mois, voire même des années. Une véritable vocation ? Oui et non. Là aussi, tout est affaire de point de vue et de perspectives. Avant même d’être diplômée de l’EM Lyon Business School (en 2015), Edwige déploie ses ailes aux confins des brumes de l’Asie Pacifique où elle occupe les fonctions de « business analyst » chez Bulgari. Au sein de ce joyau de l’industrie du luxe, elle est plus spécifiquement en charge du développement de la première application de bague de fiançailles sur mesure. « Mais j’ai toujours eu, à côté de mes projets professionnels, un développement entrepreneuriale », précise-t-elle tout de go. La combinaison parfaite, déjà.

Etienne Jeanson, « la » rencontre

Divers projets, parmi lesquels la création de l’association « Dress Code » au sein de l’EM Lyon. Une simple « initiative étudiante », comme elle l’a dépeint elle-même, qui va néanmoins lui permettre de monter de toutes pièces « la semaine entrepreneuriale de la mode » et introduire les premiers entrepreneurs sociaux de la mode au sein de l’établissement. Autre événement, charnière pour la jeune femme, la réouverture du bar « Les Fleurs du Malt » où celui qui n’est pas encore son associé, le créateur Etienne Jeanson, présente sa griffe éponyme. Là aussi, l’osmose est immédiate.

« On s’est très vite entendus, surtout qu’Etienne allait de plus en plus vers des collections sourcées éthiquement ». Les prémices d’une prometteuse association. « On est resté en contact et lorsque l’idée de monter ma marque était « mature » dans mon esprit, je l’ai immédiatement sollicité ». De fil en aiguille, Etienne Jeanson lui distille de précieux conseils et l’aide à designer la première collection. « Auparavant, je dessinais seule, et début décembre il a proposé que nous nous associions. ». Une opportunité que ne laissera pas passer la jeune femme. « C’est quelqu’un en qui j’ai entièrement confiance et qui m’a aidée bénévolement dans les étapes de mon business », narre les yeux brillants Edwige Tuarze, qui a investi ses propres deniers dans cette première collection.

Retour à la « maison »

Entre temps, la créatrice, qui a poursuivi ses pérégrinations asiatiques chez LVMH, n’oublie pas la « mère-patrie » et les événements de l’année 2015 vont la conduire à regagner l’Hexagone. « J’ai trouvé qu’il était important de revenir à ce moment-là. Je pense faire partie d’une vague d’entrepreneurs qui a eu la volonté de créer nos business ici afin de contribuer, même modestement, au développement de l’économie locale ». C’est alors que l’idée, moins nébuleuse et plus précise, « d’Eléa & Cybèle » commence à prendre corps. « Même si je ne me suis pas tout à fait lancée sur le concept, comme nous le connaissons aujourd’hui, j’ai commencé par reprendre le dressing des Lyonnaises et à utiliser leurs vêtements, plus ‘mettables’ car trop moches ou démodés, mais qui étaient empreints d’une certaine émotion ». Leur offrir une « seconde vie », en somme. « Je les ai redesigné avec une styliste qui avait déjà fait 3 ans d’up-cycling à Berlin », précise Edwige Tuarze. « Eléa et Cybèle » est sur rampe de lancement.

Au-delà de convictions chevillées au corps et au cœur – « rapidement sensibilisée à l’écologie, je me suis rendu compte lorsque j’étais en Chine que la mode était la deuxième industrie la plus polluante du monde » –  qui l’ont même, à juste titre, conduite à devenir végétarienne  – « plus je me renseignais, plus je me rendais compte que toute l’industrie de la viande, du cuir, de la fourrure perdait de son sens dans la mode » – , Edwige Tuarze, en bonne entrepreneure, n’en demeure pas moins pragmatique. « Je me suis également rendue compte qu’il existait une véritable clientèle pour ce type de produits, alors pourquoi ne pas leur créer une offre qui leur correspond ? ». La fusée Eléa & Cybèle est parée à décoller.

A l’avant-garde

Et elle ne laissera pas passer l’occasion de briller de mille feux au sein de la constellation « Hackaton Women in Innovation 2016 » où, avec trois autres projets, Edwige Tuarze décroche l’opportunité de s’exprimer – de « pitcher » selon le vocable en vigueur- au Women’s Forum de Deauville. « C’était un tremplin extraordinaire pour moi qui n’ait que 26 ans d’aller à la rencontre et de m’exprimer face à des personnes aussi influentes ». Une expérience qui lui permettra de travailler avec l’association « tissons la solidarité », soutenue par Publicis,  qui permet la réinsertion des femmes sur le marché du travail via son atelier baptisé Vitalis. Une expérience fidèle à ses convictions.  Avant d’illuminer, le 9 mars prochain, la Journée de la Femme digitale avec sa première collection ?  Rendez-vous est pris.

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