Elle impose avec audace sa beauté élégante sur les podiums des grandes maisons de couture, mais également sur Instagram avec 1,6 million de followers. À 22 ans, Didi Stone fait partie de ces muses qui ne se contentent pas de correspondre à des canons de beauté : elle les façonne à son image. Ambassadrice de l’Unicef, elle s’engage aussi pour faire évoluer la situation des jeunes filles mariées de force en République démocratique du Congo. Rencontre.
Repérée à 15 ans dans la rue, vous défilez désormais pour les plus grands. Comment vivez-vous cette ascension dans la mode ?
DIDI STONE : Comme un rêve, parce que c’est – pour la jeune femme noire que je suis – un honneur d’incarner d’autres couleurs dans le monde de la mode. Je participe à mon niveau à davantage d’inclusivité dans ce milieu, malheureusement trop connu pour être fermé. Et puis je suis heureuse de servir de modèle à d’autres jeunes filles, qui ont les mêmes ambitions, les mêmes rêves que moi : je leur montre que cela est possible.
Avec votre casquette d’influenceuse mode, y a-t-il des créateurs avec lesquels vous aimeriez travailler ?
D.S. : J’ai l’immense chance d’avoir défilé pour Jean Paul Gaultier, mon créateur préféré ! Mais j’aime beaucoup d’autres créateurs aussi différents que la maison Schiaparelli ou Saint Laurent pour son côté structuré et minimaliste ou encore Rick Owens pour son excentricité… Je suis assez versatile en mode. Au fond, je me sens très parisienne, un peu au carrefour d’univers très opposés, mais toujours raffinés.
Comment définiriez-vous votre style ?
D.S. : Avant tout comme une femme qui ose l’extravagance tout en évitant le « kitch », sinon on bascule vite dans une mode « clown ». Mais je suis surtout très exigeante avec la coupe, il faut que la silhouette soit structurée et élégante.
Votre père, le célèbre musicien Koffi Olomidé, est également un sapeur reconnu : le goût pour la mode est-il héréditaire ?
D.S. : J’ai grandi entre le Congo (pays de la culture de la sape) et la France. La manière avec laquelle nous nous habillons est cruciale, et on m’a appris à toujours soigner mon style. Mon père, au-delà de son immense talent de musicien, m’a transmis le plaisir de s’habiller : c’est une façon de respecter son entourage chez nous.
Est-ce aussi une manière d’exprimer votre créativité ?
D.S. : Je cherche à me plaire avant tout, et cela se traduit beaucoup par les mélanges de styles. Quand on m’interroge sur mes inspirations en mode, je réponds que c’est selon mon état d’esprit le matin quand je me réveille (Rires). Mon humeur dicte mes choix vestimentaires, car c’est un moyen d’expression au sens littéral du terme : c’est tout ce qui se passe dans ma tête.
La notoriété de votre père a-t-elle été un avantage ou un frein dans votre carrière ?
D.S. : C’est drôle, je dirais les deux. J’avais un défi à relever, celui de se démarquer quand vos parents sont connus. J’avais le besoin de me prouver que je n’étais pas une « fille à papa ». Donc cette notoriété a, d’une certaine manière, boosté ma volonté. Le frein était plutôt lié à l’instinct de protection de mes parents qui voulaient me préserver de la dureté de ce milieu. Ils souhaitaient pour moi un métier plus conventionnel : médecin, avocate, mais certainement pas mannequin. L’industrie de la mode ne leur paraissait pas forcément sérieuse, mais ils ont eu le temps de changer d’avis, aujourd’hui, ils sont beaucoup à mes côtés.
Votre style très affirmé est-il la clé de votre succès sur Instagram ?
D.S. : J’essaie de garder ma spontanéité et de ne pas me prendre au sérieux. J’ai toujours partagé mes looks pour m’amuser. Je pense que mes posts très personnels ont touché, voire, inspiré des internautes qui ont partagé à leur tour. Cette communauté m’a permis de me faire connaitre auprès des grandes marques de mode et de réaliser mes rêves en devenant en quelque sorte leur muse.
Vous êtes également une cheffe d’entreprise…
D.S. : Oui, parce qu’il faut gérer son image, négocier avec les marques, mais aussi accompagner de nouveaux développements comme le lancement de ma propre marque de mode. La clé est de bien s’entourer. Je m’appuie sur une équipe très solide : ma mère, qui est extrêmement bienveillante, mais aussi mon agent, Mariama Barry, avec qui je forme une sorte de binôme. Elle est presque une deuxième mère ! Avec elles, je me sens prête à me lancer dans ce projet très personnel. Je rêve depuis mes 15 ans de construire quelque chose, de laisser une trace.
Quelles sont les femmes qui vous inspirent au quotidien ?
D.S. : Rihanna, à 100 %. L’empire qu’elle a construit, mais aussi ce qu’elle incarne m’inspirent énormément. C’est une femme qui bouscule les codes, qui s’impose par son style et son caractère. Elle n’a pas peur de ce qu’on pense d’elle. J’ai eu la chance de la rencontrer et d’échanger avec elle, après avoir posé pour ses marques Fenty (Fenty Beauty et Fenty Skin). Cela n’a fait que renforcer mon admiration.
Quel est le meilleur conseil que l’on vous a donné pour réussir ?
D.S. : Mon père me disait tout le temps : « Rien de ce qui est grand est facile. » Une phrase qui m’a beaucoup accompagnée dans les moments difficiles, car cela me poussait à me dépasser. Et ma mère, qui est une femme de caractère, m’a toujours répété « Tout passe » : une phrase très philosophe sur la vie, qui apprend à prendre du recul. Ce n’est pas toujours simple, je suis parfois touchée par la calomnie ou la méchanceté qui sévit sur les réseaux sociaux. Ma mère me pousse à prendre de la distance. Et cela vaut aussi professionnellement, car le mannequinat vous plonge dans une vie professionnelle parfois très dure.
À quoi étiez-vous exposée dans le mannequinat ?
D.S. : À certains agents qui font des remarques sur votre poids alors que vous n’avez que 15 ans. J’ai très vite voulu combattre cette injonction. J’ai profité de ma petite notoriété pour m’imposer aux marques telle que j’étais : avec mes propres mensurations. C’est aussi pour cela que j’aime Rihanna : elle ne se soumet pas et elle casse les codes de la mode. Et de la beauté également : Fenty Beauty avec sa palette de 30 nuances de fonds de teint a révolutionné le maquillage puisqu’elle a été suivie par toutes les autres marques.
Quelles sont les qualités d’une bonne influenceuse selon vous ?
D.S. : Rester soi-même. On me demande souvent des conseils pour démarrer et c’est mon principal message : s’affirmer avec sa singularité, c’est l’assurance de trouver des gens qui te suivent dans la durée. Il n’y a pas de modèle. Sur les réseaux, il faut garder sa spontanéité et savoir affronter le regard des gens, le jugement, les critiques. D’une certaine manière, la notoriété de mon père m’avait un peu préparée à tout cela.
Vous êtes ambassadrice de l’Unicef au Congo. Comment vivez-vous cet engagement ?
D.S. : J’ai toujours fait de l’humanitaire au Congo, au travers de petites associations, en allant voir les enfants et en partageant ma célébrité pour lancer des appels au don.Mais quand l’Unicef m’a contactée il y a un an pour que je devienne leur ambassadrice, cela m’a paru évident de m’engager. Quand on sait qu’au Congo près d’une femme sur trois a été mariée avant l’âge de 18 ans, la lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris le mariage des enfants, est une cause primordiale. Encourager l’accès à l’éducation est essentiel, notamment dans la prévention du mariage forcé. Il y a tellement d’injustices à combattre, c’est le début d’une belle histoire avec l’Unicef.
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