Après avoir été parmi les pionniers de la navigation en temps réel avec ses boîtiers, TomTom se réinvente pour prendre le virage de la voiture autonome. L’entreprise néerlandaise a été cofondée en 1991 par une Française, Corinne Vigreux.
TomTom, c’est ce petit boîtier qui est venu s’accrocher aux pare-brise des voitures au début des années 2000. Il trace la route en direct, fixe le cap avec ses flèches. TomTom, c’est elle, Corinne Vigreux, une Française cofondatrice en 1991 de l’entreprise néerlandaise. TomTom est une société éditrice de logiciels de planifications d’itinéraires et de systèmes de navigation GPS mobiles et embarqués. Après s’être lancée sur smartphone à la fin des années 2000, TomTom anticipe la fin d’un besoin, celui de son produit, le boîtier, et réoriente son activité en misant sur la voiture autonome.
De passage à Paris, Corinne Vigreux reçoit autour d’un thé dans l’alcôve d’un hôtel parisien. Cette originaire de la banlieue lyonnaise, formée à l’ESSEC, débute sa carrière par un stage dans le monde du jeu vidéo.
Envoyée à Londres, elle intègre ensuite Psion, marque de logiciel et de matériel informatique, précurseur du téléphone portable. Corinne Vigreux a alors une vingtaine d’années, « rien à perdre », et « un boss qui [lui] faisait confiance ».
« Et puis, j’étais bonne dans ce que je faisais. » Pour son entreprise, elle développe les marchés du bassin méditerranéen, de l’Europe de l’Est, du Bénélux, puis les Pays-Bas où elle rencontre Harold Goddijn, le distributeur néerlandais de Psion. Coup de foudre, mariage, mais, pour Corinne Vigreux, prudente et indépendante, il est hors de question de partir aux Pays-Bas sans un emploi sur place.
Aux Pays-Bas, elle intègre une coopérative laitière. « J’avais 28 ans et devais manager une équipe composée de personnes de plus de 50 ans. » La quinquagénaire pétillante regarde cette époque comme elle semble aborder la vie, avec un grand sourire.
« Je le dis souvent aux jeunes femmes : l’important est de savoir prendre des risques. Certes, les risques sont plus faciles à prendre quand est jeune et sans enfant », souligne l’entrepreneure. Mère de deux grands enfants, aujourd’hui à l’université, elle insiste sur un point : « la confiance est le principal problème des femmes. Aux sociétés de créer un climat de confiance. »
Boîtiers de navigation
La tech lui manquait, elle retourne à la tech. Son mari lui présente deux anciens camarades d’université Pieter Geelen et Peter-Frans Pauwels. Avant TomTom, ils se lancent dans l’aventure entrepreneuriale et deviennent ensemble éditeurs de logiciels sur ordinateurs de poche, notamment de produits Psion : dictionnaires, jeux, logiciels financiers… et navigation embarquée. En 1993 – 1994, les trois associés voient se développer la vente de produits embarqués. D’un côté, les automobilistes impriment leur itinéraire et « au premier virage manqué, c’est foutu » ; de l’autre, la navigation embarquée est un produit de luxe et encore peu fiable. Éditeurs de logiciels, ils se lancent, grâce à ODM Manufacturing avec 200 000 produits. Vendus en quatre mois. « Des boîtiers de navigation avec cartographie en temps réel. »
« La croissance est faramineuse ! » Et puis, vient la crise, vient le choix de Google de donner gratuitement accès à la navigation sur téléphone. L’entreprise, aujourd’hui présente dans 35 pays, est obligée de se réinventer. « Nous vendons encore 3 millions de boîtiers par an, soit environ 35% du chiffre d’affaires de l’entreprise », indique Corinne Vigreux. Insuffisant.
Bout d’histoire
« Nous avons déjà créé un bout d’histoire, nous comptons bien faire la même chose avec la voiture autonome. » Pour la PDG, sur ce sujet, l’entreprise est en avance. Grâce au rachat, pour près de trois milliards d’euros, en 2007 de Tele Atlas, fournisseur de données géographiques pour les fabricants de systèmes de navigation, TomTom perfectionne une plate-forme de cartographie en temps réel, en haute définition et avec un service d’info trafic.
« C’est indispensable pour la smart city, cela permettra le désengorgement des villes et des autoroutes », ajoute l’entrepreneure qui voit toujours un pas en avant.
L’entreprise a notamment travaillé sur Renault Symbioz. Une voiture pour laquelle TomTom re-cartographie la route. Largeur de la route, marquage au sol… 400 000 kilomètres ont déjà été re-cartographiés par TomTom HD map, outil du futur qui permettra aux voitures de se guider en toute autonomie.
TomTom, ce sont aujourd’hui 5 000 personnes à diriger. Pour Corinne Vigreux, le « plus dur a été lors de la fusion des deux sociétés, TomTom et Tele Atlas». L’ensemble des salariés partage désormais une vision et un objectif, celui de la voiture autonome.
Mi-avril, le groupe a fait état d’un bénéfice de 43 millions d’euros, stable par rapport au premier trimestre, a rapporté Reuters. Des résultats qui rassurent les investisseurs inquiets de la chute des ventes de boîtiers. La nouvelle stratégie de l’entreprise semble porter ses fruits puisque TomTom voit ses ventes aux constructeurs automobiles progresser de 42% à 78 millions d’euros, selon un communiqué de l’entreprise. Le groupe s’attend toutefois à une baisse du chiffre d’affaires de 800 millions d’euros sur l’année après 903 millions en 2017.
Article publié dans le numéro 2 du magazine Forbes France, mars-avril-mai 2018.
Mise à jour effectuée le 25 avril avec les chiffres des premier et deuxième trimestres de 2018.
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