Venu des Etats-Unis, le mouvement body positive, qui consiste à accepter son corps, est de plus en plus influent. Trop petite, trop grosse, trop maigre… Face aux injonctions pour avoir un corps « parfait », de plus en plus de femmes revendiquent leur silhouette. Des adeptes du body positive nous donnent les clés pour appliquer cette philosophie au travail.
Taille idéale, poids idéal, formes idéales : le mouvement body positive rejette les normes. Une philosophie difficile à importer dans le monde de l’entreprise, où la conformité est souvent de mise. Pour Jennifer Genestier, co-fondatrice du collectif féministe Les Chahuteuses, il est pourtant urgent de prendre en considération cette question. « Nous sommes dans une époque où nous voulons du bien-être dans l’entreprise, que les burn-out disparaissent… Pour un dirigeant, les bénéfices sont multiples : ça booste la productivité, diminue l’absentéisme, les déprimes… Mais il faut arrêter de ne penser qu’à la tête, le corps compte aussi ! », explique-t-elle.
Les femmes obèses discriminées à l’embauche
Selon un rapport du défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail (OIT), publié en février 2016, les femmes obèses seraient huit fois plus discriminées à l’embauche que celles ayant un indice de masse corporelle dans la norme. Cette enquête, qui repose sur l’expérience vécue de 1000 demandeurs d’emplois âgés de 18 à 65 ans, constate également qu’avoir une corpulence ou un style vestimentaire « hors normes » constitue un frein à l’embauche. « Dans le monde du travail, le corps ne devrait pas compter, estime Tatyana Razafindrakoto, co-fondatrice du collectif Les Aliennes. Mais en réalité, le corps est toujours au cœur de ce que l’on fait. Si vous êtes secrétaire, vous allez entendre des réflexions sur la manière dont vous vous habillez, si vous avez pris du poids… »
Ancienne obèse, Jennifer Genestier estime que la démarche body positive doit venir des employés, mais aussi des entreprises. « Il y a une éducation des patrons à faire, parce qu’ils ont peur, peur pour leur chiffre d’affaire, leurs objectifs… », observe-t-elle, avant de poursuivre : « Les chief happiness officer ou office manager, qui font en sorte que la culture de l’entreprise soit positive, doivent permette aux salariés de se sentir bien dans leur tête et dans leur corps. Cela passe par des fauteuils, des bureaux et des ordinateurs adaptés, mais aussi par une bonne entente entre les employés pour qu’il n’y ait pas d’exclusion. » Si elle prône des réponses au cas par cas, elle invite les entreprises à organiser des ateliers autour de l’estime de soi et de l’empowerment. Des interventions que son collectif, les Chahuteuses, propose.
Imposer sa singularité
Pour celles qui subissent des discriminations ou des moqueries sur leur lieu de travail, Jennifer Genestier conseille de s’entourer. Coach, associations, groupe de parole : des structures existent pour épauler les salariées. Et même si cela demande énormément d’énergie, elle invite les femmes à s’affirmer. « A partir du moment où vous êtes fières de vos formes, où vous êtes dans le body pride, les gens n’ont plus de pouvoir sur votre faiblesse, parce que votre faiblesse est devenue une force », détaille-t-elle avec conviction. Une démarche qui prend du temps, mais à laquelle Tatyana Razafindrakoto des Aliennes, croit aussi. « Il faut imposer sa singularité avec une forme de joie conquérante ! », assure-t-elle. Militante body positive, Olga Volfson a réussi à s’imposer. Celle qui se décrit comme « très en formes », se souvient de son entretien d’embauche il y a deux ans et demi. « Je me suis présentée comme j’étais, en assumant mon look excentrique, sans en faire un sujet de gêne, et c’est quelque chose qui a plu. Mon manager m’a dit que je m’étais démarquée », confie-t-elle. Pour s’assumer malgré les regards parfois insistants, Olga a sa technique. « J’ai réussi à m’assumer en faisant semblant et c’est venu petit à petit, à mesure que je voyais la réaction des gens changer. Si on est capable de faire ce coup de bluff, ça aide. Tout passe par l’attitude : il faut se tenir droite, ne pas regarder par terre, soutenir les regards, même si c’est difficile… Je compare ça à l’attitude que je peux avoir quand je marche dans la rue pour éviter le harcèlement », détaille-t-elle.
Et si l’entreprise reste hermétique à la philosophie body positive, il ne faut pas avoir peur d’en changer. « Je pars du principe que ce n’est pas forcément les entreprises qui doivent choisir leurs employés, c’est aussi aux employés de choisir leur entreprise », assure Jennifer Genestier, des Chahuteuses, avant de glisser que les start-up « où les codes vestimentaires ont complètement explosé », sont peut-être plus en avance que les banques sur ce point.
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