Diplômée d’EPITA, cette ingénieure de formation passée par les bancs d’HEC, a débuté sa carrière en 2006 dans le conseil, au sein du département Technology Transformation de Capgemini Consulting, où elle accompagne les entreprises et notamment les institutions financières dans leur transformation technologique et numérique. Contributrice d’une étude sur la transformation digitale des grands groupes menée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) en 2011, elle rejoint le bureau de Londres de Capgemini pour piloter le centre digital du secteur Financial Services.
En 2012, Claire Calmejane se tourne vers la banque, avec l’ambition d’œuvrer à la rendre plus accessible à tous, grâce au formidable levier qu’est la technologie. Recrutée par Lloyds Banking Group, en tant que responsable du Digital delivery au sein de la direction des services en ligne, puis Directrice de l’Innovation, elle y met en place les Labs d’innovation et la Digital Academy, avant d’être nommé Directrice de la transformation des risques au sein de Lloyds Banking Group. En septembre 2018, Claire Calmejane rejoint Société Générale en tant que Directrice de l’Innovation du Groupe et membre du Comité de direction.
En charge de l’accélération de la transformation de la banque, cette spécialiste du numérique et des Fintech déploie sa culture de l’innovation, aussi bien en modernisant les business models existants du groupe, qu’en inventant ceux de demain. Rencontre avec une femme qui transforme le concept d’innovation en réalisations concrètes.
Marie-Caroline Selmer : Vous avez rejoint en septembre 2018 la Société Générale en tant que Directrice de l’Innovation. Quelles sont vos missions au quotidien ?
Claire Calmejane : Il s’agit d’une part d’un rôle d’accompagnement de la transformation des métiers, qui représentent 16 lignes de business pour 133 000 collaborateurs dans le monde, avec une présence importante en soutien des marchés et des métiers connexes comme la location de voitures, et d’autre part, la création de valeur autour du business model de Société Générale Ventures, qui a déjà investi 200 millions d’euros dans des start-up.
Marie-Caroline Selmer : Comment fait-on de l’innovation un pivot de la stratégie business afin de l’intégrer au cœur du business model de Société Générale ?
Claire Calmejane : D’abord grâce à l’anticipation, puisque la banque investit dans les technologies de l’information et de la transformation du système bancaire depuis plus de dix ans, et ensuite par la constitution d’une équipe dédiée pour s’assurer d’une prise en main rapide des métiers. Au quotidien, 60 personnes seniors sont mobilisées sur les questions de transition business, d’acquisition clients, et d’efficacité. Ces « Digital Leaders » sont une porte d’entrée du management, ils sont directement rattachés aux CEO de leurs entités, et permettent un ancrage de l’innovation au sein de la gouvernance.
Marie-Caroline Selmer : De quelle façon la crise du COVID a davantage accéléré la digitalisation de l’organisation ?
Claire Calmejane : Nous nous sommes adaptés avec agilité et réactivité, de façon à maintenir à 100% nos activités, même sur l’investissement, tout en faisant de la protection de nos équipes une priorité en basculant 50 000 collaborateurs qui le pouvaient en télétravail. Le premier confinement a été en réalité un stress-test, qui par son caractère à la fois soudain et intense a permis de valider notre stratégie digitale. Nous avons ainsi été en mesure d’absorber le pic d’appels téléphoniques sans précédent de cette période grâce aux chat bot implémentés sur nos sites, et notamment sur celui de Boursorama et Société Générale en France, qui enregistrait alors 15 000 conversations par jour. La crise a également encouragé nos clients PME qui se situaient au milieu de leur transformation digitale à déployer des services d’E-commerce, à souscrire des prêts de financement pour moderniser leurs outils de production ou encore à digitaliser leurs process. Des démarches pour lesquelles nous avons pu leur offrir un accompagnement continu et un large éventail de services.
Marie-Caroline Selmer : Votre stratégie d’innovation passe également par l’identification et le financement de nouveaux modèles, comme c’est le cas avec les entreprises que vous soutenez à travers le fonds Société Générale Ventures. Qu’est-ce qui fait la spécificité de ce fonds ?
Claire Calmejane : Société Générale Ventures est une structure d’investissement transverse dont l’objectif est de déceler des activités de rupture pour nos métiers comme en dehors, par le financement de start-up en interne comme par l’acquisition externe de sociétés. Nous visons notamment les entreprises qui fonctionnent sur le modèle de plateforme de « Bank-as-a-Service » (Baas), et qui disruptent les services de gestion de comptes ou ceux des crédits à la consommation. C’est le cas de la fintech Treezor, qui permet aux entreprises d’avoir un interlocuteur unique pour gérer l’intégralité de la chaîne de paiement, ou encore de Shine, qui se place comme un intermédiaire de la relation bancaire vis-à-vis des indépendants et des TPE, afin de leur proposer une expérience globale de la gestion de compte. Toutes deux ont été acquises par le fonds depuis 2019 et incarnent une lame de fonds dans la transformation de ce marché. SG Ventures compte aujourd’hui 30 start-up à travers le monde.
Marie-Caroline Selmer : Quels sont les autres secteurs que vous suivez de près et dans lesquels vous investissez ?
Claire Calmejane : Le digital est un monde tellement vaste qu’il impose de faire des choix. La mobilité et les services e-commerce font partie de sujets auxquels nous sommes attentifs, même si la mobilité fait partie des métiers historiques de la Société Générale, notamment à travers la filiale ALD Automotive, leader européen du secteur. Sa stratégie à 2025 est de diversifier la mobilité au sens large, d’opérer un virage massif sur l’électrique et de mettre à disposition des corporates une offre globale intégrant des véhicules connectés, un système de tracking de la donnée, couplée à une offre d’assurance adaptée.
Marie-Caroline Selmer : Quelles relations entretenez-vous avec l’écosystème des Fintech ?
Claire Calmejane : Cet écosystème, dont nous avons assisté à l’essor à compter de fin 2014, est un formidable vivier d’innovations, lui-même source de partenariats fructueux pour la Société Générale. En général, les Fintech pénètrent le marché en BtoC, puis ouvrent une ligne en BtoB qui nécessite de s’appuyer sur l’expertise régulatoire d’une banque comme la nôtre. En se positionnant en tant que « Bank-as-a-plateform », la Société Générale tisse des collaborations étroites avec ces start-up, comme c’est le cas avec l’entreprise Harvest, un éditeur de logiciels pour la gestion de patrimoine et la vente de produits financiers à qui nous fournissons des produits sur le segment de l’assurance vie. C’est une stratégie win-win qui permet à chacun d’accroître sa part de marché, tout en participant à la structuration de l’écosystème digital global.
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