La jeune pousse Absolutely French, incubée par HEC, propose un accompagnement à l’expatriation pour les conjoints d’expatriés, majoritairement des femmes qui renoncent bien souvent à leur carrière pour suivre leur partenaire. Cours de Français, création d’un réseau, sorties, aide au quotidien et recherche d’emploi, la start-up créée en 2015 compte passer cette année à la vitesse supérieure, et pourquoi pas se déployer rapidement à l’international.
Comme souvent, l’histoire commence avec une expérience personnelle. Chef de rang dans la restauration gastronomique durant sept ans, Armelle Perben est amenée à suivre son conjoint à l’autre bout du monde, et à plusieurs reprises. Chine, Thaïlande, Inde, Vietnam, Malaisie… « Je me suis tout à coup retrouvée conjointe d’expatrié en Chine avec l’impossibilité d’exercer le métier auquel je prétendais », raconte-t-elle. A son retour, elle passe un Master 2 en business international entre deux expatriations afin de trouver plus facilement un emploi. Et puis la famille repart, mais les choses ne changent guère. « Quand on part sur une courte période, il est difficile de trouver un emploi, se faire un réseau, car cela prend du temps », a-t-elle pu constater dans différents pays. Six, au total.
« J’ai créée Absolutely French sur de la colère. Sur cette injustice de la carrière du mari et de voir celle du conjoint ne pas être prise en compte. » Du mari ? Oui, les expatriés sont bien souvent des hommes, accompagnés par leur épouse. Dans 92% des cas.
Dans 9 cas sur 10 la femme suit le conjoint
En juin dernier, Expat communication, la Caisse des Français de l’étranger et Humanis publiaient une étude sur l’impact de l’expatriation sur le couple et les doubles carrières. Conclusion, celui qui suit a le sentiment de « sacrifier » sa carrière. Selon l’étude, plus de quatre français sur cinq s’expatrient en couple. Et dans neuf cas sur dix, c’est la femme qui suit son conjoint. Les expatriés ont entre 35 et 45 ans, partent pour 2,5 ans, sont au minimum diplômés d’un master, et parlent deux langues, en plus de la langue maternelle, selon le portrait-robot issu de l’étude. Surtout, il faut en moyenne plus de dix mois au conjoint pour trouver un emploi sur place. Un emploi qui ne correspond bien souvent ni aux études, ni aux attentes de la personne.
« Je n’ai jamais pu trouver de travail dans le secteur, alors que j’avais passé un master pour travailler dans des grands groupes à l’international », déplore-t-elle encore aujourd’hui. Pas assez d’expérience, pas assez d’ancienneté. « Je me suis donc retrouvée prof de Français. C’est d’ailleurs ce que l’on propose presque systématiquement aux conjoints d’expatriés. »
Pas question de dénigrer l’expatriation pour autant. « Je trouvais cela fabuleux de partir. L’expatriation est une opportunité, surtout si elle est prise en charge », tient-elle à souligner. Pas question non plus de dénigrer le métier d’enseignant, un métier « merveilleux », mais vers lequel elle ne se serait pas tourné naturellement.
« J’ai vu des femmes en dépression »
« Il n’y a pas de raison que seul le talent face carrière. Je trouvais cela d’une grande injustice que mon mari face carrière et pas moi », s’insurge-t-elle. Une situation néfaste pour le conjoint : « j’ai vu des femmes en dépression ! Notamment en Inde, un pays difficile pour les femmes. Je pense notamment à une expatriée qui avant de venir avait un travail, une vie sociale et qui là se retrouvait sans rien ». Mais une situation également néfaste pour le couple. Selon Armelle Perben, l’expatriation crée un décalage entre un époux happé par une vie professionnelle nouvelle, dynamique, et un conjoint s’occupant essentiellement de l’intendance, restant à la maison et ne vivant que rarement des choses épanouissantes. « Je pousse donc fortement les conjoints à avoir une activité professionnelle, même si c’est un mi-temps où à se consacrer à l’écriture, à l’engagement, une formation… »
En France, puis à l’international
Il y a cinq ans, à son retour en France, impossible de trouver un emploi, malgré les diplômes, malgré le fait de parler plusieurs langues, dont l’Anglais et le Chinois. « J’avais trop de trous dans mon CV », avoue-t-elle. Armelle Perben décide donc de créer son emploi et d’aider les personnes qui se retrouvent dans une situation qu’elle a bien connu. En 2015, elle lance Absolutely French, à Paris, pour donner le premier coup de pouce aux conjoints d’expatriés. Essentiel, apprendre la langue du pays dans lequel on s’installe, surtout en France, où la pratique de l’Anglais n’est pas encore diffusée dans la population. Forte de son expérience d’enseignante de Français Langue Etrangère (FLE), et accompagnés d’experts, elle lance une méthode pour apprendre à des adultes le français et les coutumes du pays.
Deux jours par semaines, durant un peu plus de trois mois (soit une centaine d’heures au total), les conjoints d’expatriés, en petit groupe de quatre à six personnes, se retrouvent pour apprendre, en s’amusant. Premier volet, et rien d’étonnant pour une ancienne cheffe de rang, « cook and learn » pour apprendre le français en allant sur le marché. Les étudiants apprennent à la fois à se débrouiller au quotidien, mais aussi découvrent la culture culinaire, au risque de se trouver cantonné à la cuisine en rentrant à la maison. « play and learn » pour pratiquer la langue à l’oral.
L’objectif d’Armelle Perben, en intégrant l’incubateur de HEC installé à Station F, est de déployer la méthode dans d’autres villes de France, puis dans des pays francophones, avant d’adapter la méthode à d’autres langues. Le tout, avec une plate-forme de e-learning.
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