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L’Essor Du Compostage Face Aux Limites De La Gestion Des Déchets Plastiques

compostage
Overhead view of fruit and vegetable scraps in a white enamel container, ready to go in the compost.

La Fédération des entreprises du recyclage (Federec) vient de présenter les résultats de son observatoire statistique pour le marché du compostage et du recyclage en 2018 et constate qu’après une année 2017 plutôt favorable, la conjoncture s’assombrit, avec des « filières plastiques, (…) particulièrement chahutées », le secteur devant faire face aux effets de l’arrêt de l’importation des déchets plastiques par les pays asiatiques depuis l’an dernier ou encore de la réduction accrue des capacités d’enfouissement des déchets. Par Jean-Pierre Rakoutz.

 

On compte de nombreux obstacles à l’amélioration de la collecte : le tonnage de plastique collecté n’a ainsi connu qu’une augmentation de 0,4% par rapport à 2017, le portant à 904 kilos tonnes. Si on ajoute à cela le manque de débouchés et faibles cours de certaines matières recyclées ainsi que les difficultés techniques ou financières de recycler certains emballages, on prend la mesure de la complexité de la situation et de l’impossibilité d’atteindre l’objectif (utopique) des 100% d’emballages recyclés à horizon 2025.

Au niveau mondial à ce jour, 5,8 milliards de tonnes de plastiques à usage unique ont été produits. 9% seulement sont recyclées. 12% sont incinérées. Et 79% se « baladent » dans nos champs, océans ou en décharges. Pourtant 97% des emballages produits sont encore en plastique conventionnel. Faute de consensus internationaux concrets et de changements drastiques de comportements, on ne peut que prévoir que la quantité d’emballages continue d’augmenter exponentiellement – ainsi que les déchets qui en découlent – avec toutes les conséquences environnementales et sanitaires que l’on connait.

Il apparait donc aujourd’hui évident que la politique du tout recyclage a ses limites. Les emballages souples (chips, barres de céréales, …), qui constituent une part importante de l’industrie de l’emballage plastique, sont presque impossibles à recycler, ou nécessitent un processus très couteux pour y parvenir. Ces emballages combinent en effet souvent plusieurs matériaux pour améliorer leurs propriétés mécaniques ou chimiques, ce qui a pour conséquence de les rendre difficilement recyclables. Des substances alimentaires en contact avec les films peuvent aussi les « contaminer » et rendre impossible leur recyclage en raison de normes sanitaires.

Or, en combinant le recyclage avec d’autres méthodes comme le compostage, nous pouvons parvenir à créer beaucoup moins de déchets. C’est précisément le signal envoyé fin septembre par le Sénat lors de la séance publique consacrée à la loi économie circulaire. En effet, deux amendements clés y ont été adoptés, et devraient être examinés en séance publique à l’Assemblée Nationale à partir du 9 décembre :

  • Un premier amendement encourage clairement le développement de toute la filière de compostage des biodéchets, en prévoyant que « la part d’écocontribution versée par les metteurs sur le marché de plastiques biodégradables [doit être versée] aux collectivités qui souhaitent développer la collecte séparée des biodéchets pour un recyclage organique » (rappelons que cette collecte séparée deviendra obligatoire dès 2023). Le Sénat donne ainsi le feu vert pour que les emballages certifiés biodégradables et compostables se retrouvent dans les mêmes poubelles que les déchets organiques, augmentant ainsi le tonnage et donc l’importance de ce flux, et le potentiel de développement économique de la filière toute entière.
  • Le second amendement propose la réduction de l’écocontribution pour les emballages moins polluants, c’est-à-dire « compostable en milieu domestique ou industriel ». L’objectif est de faire baisser le prix de ce type d’emballage qui, en plus d’être déjà plus chers à la production, étaient jusqu’à présent pénalisés par un malus car hors scope de la filière classique de recyclage. Cette décision permettra à plus de marques et distributeurs, à la recherche d’alternatives aux emballages plastiques conventionnels, de se tourner vers l’option du compostable sans trop alourdir leur budget.

Ce signal émanant du Sénat peut être le point de départ de la généralisation d’une nouvelle façon de consommer ainsi que d’une nouvelle création de valeur. D’une part, il permet d’amorcer un virage en encourageant le développement d’emballages qui peuvent se dégrader sans nocivité pour l’environnement, et accompagne un nouveau geste citoyen, celui du tri et de la collecte des produits organiques (dont déchets alimentaires et verts) avec les emballages compostables. D’autre part, ce changement d’habitudes au niveau du déchet préfigure une nouvelle ressource : alors que jusqu’à présent, 35% à 40% des déchets alimentaires terminent dans des décharges, ils vont pouvoir désormais, avec les emballages compostables, être considérés comme une ressource pour préserver les sols ! La spécificité de la filière du compostage réside également dans son aspect local : les flux de bio-déchets et d’emballages compostables collectés sont traités en proximité, évitant ainsi de transporter inutilement la matière.

Pourtant les emballages compostables essuient encore de nombreuses critiques et de réserves : de quoi sont faits ces films ? Vont-ils vraiment se dégrader totalement ? Et si oui, en quoi ? Peuvent-ils réellement être mélangés à nos déchets organiques sans impacter leur compostage ? Ces emballages ne se dégradent-t-ils pas en nano particules de plastique ?

Les acteurs certifiés peuvent et doivent répondre et démontrer la non nocivité de leurs produits qui, lors du processus de compostage, se transforment en eau, CO2 et biomasse. Un récent test grandeur nature réalisé par Les Alchimistes et Citeo démontre la possibilité d’intégrer les emballages compostables, comme des bouteilles en PLA, aux déchets organiques sans altérer les caractéristiques agronomiques du compost : « il ne le dégrade pas, ni ne l’améliore ».

Un changement de paradigme qui s’accompagne certes d’évolutions de la part des consommateurs mais aussi et surtout du passage à l’action des entreprises et des instances politiques. Verdict à l’Assemblée Nationale dans les prochains jours !

 

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Par Jean-Pierre Rakoutz, directeur commercial pour TIPA France

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