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Le dialogue social, levier indispensable de la transition écologique

transition écologiqueReflected sky on a solar panel field during a summer sunrise. Wind turbines can be seen on the horizon. Muntendam, the Netherlands, September 2023

3 ans après la loi Climat&Résilience, les sujets de transition écologique irriguent progressivement le dialogue social. Toutefois, les efforts entrepris par les entreprises et les branches professionnelles restent insuffisants. L’urgence commande une implication collective, via le dialogue social, pour relever des défis transversaux.

Par Géraldine FORT, Déléguée générale de l’Observatoire de la Responsabilité sociétale des entreprises (ORSE)

 

L’importance cruciale du dialogue social

La transition écologique ne peut se concevoir sans une place centrale accordée au dialogue social. Selon le Code du travail, celui-ci se matérialise au niveau de l’entreprise par la relation entre l’employeur et les organisations syndicales, ainsi qu’avec les membres du CSE lorsqu’ils existent. Il s’étend également aux branches professionnelles, aux commissions paritaires régionales interprofessionnelles, et aux organisations patronales et confédérations syndicales dans le cadre d’un dialogue à l’échelle nationale.

Le dialogue social est essentiel pour anticiper et appréhender les impacts économiques et sociaux de la transition écologique. Il permet de construire des solutions conjuguant performances économique, sociale et environnementale, en facilitant l’appréhension des opportunités et des défis d’activités, d’emplois, de formation et de conditions de travail, tout en limitant les impacts négatifs. Les outils juridiques offrent déjà un cadre pour organiser ce dialogue, leur appropriation par les partenaires sociaux étant essentielle pour une transition écologique socialement juste.

 

Des efforts en deçà de l’urgence

Actuellement, seuls les domaines soumis à obligation, tels que les plans de sobriété, la réduction des gaz à effet de serre et le tri des déchets, sont intégrés par les entreprises. La décarbonation demeure le principal critère d’évaluation de la transition écologique.

Si la préoccupation d’une transition justeest occupe les débats, il y a deux points que le dialogue social n’intègre pas encore suffisamment. D’abord, l’impact social des enjeux environnementaux : adaptation des conditions de travail au changement climatique, aide à la mobilité douce, à la rénovation des logements pour les salariés les plus précaires, etc.

La préservation du pouvoir d’achat reste un sujet de négociations annuelles obligatoires dans les entreprises et une source d’inquiétude pour les Français. A opposer trop souvent « fin du monde » et « fin de mois », les entreprises ne doivent pas mettre de côté la contribution individuelle des salariés à la transition environnementale.

Ensuite, la gestion prévisionnelle des emplois et des parcours professionnels est également à renforcer. Il s’agit d’un sujet stratégique, encore peu anticipé dans ses effets sur les emplois et les compétences, avec des DRH souvent en retrait du défi écologique.

Le dialogue social reste souvent imposé et ne se structure pas proactivement. Les acteurs s’impliquent principalement lorsqu’un cadre organisé est mis en place, notamment via le CSE, mais à un niveau faible malgré les nouvelles prérogatives instaurées par la loi Climat&Résilience.

La négociation collective « verte » demeure conditionnée par le cadre législatif et les nécessités conjoncturelles, sans relever d’une politique sociale volontaire et assumée. Les opportunités d’instaurer des commissions environnement auprès des CSE, les possibilités de formation, et le recours à des experts ne sont pas pleinement exploités. Or ces sont autant d’outils pour faire du dialogue social une clé de la transformation de modèles d’affaires des entreprises et répondre au défi écologique. En somme, bien que des avancées aient été réalisées, un élan collectif et des éléments de méthode manquent pour que ces sujets irriguent pleinement le dialogue social.

 

Vers un dialogue social accélérateur de la transition écologique

Pour accélérer un dialogue social au service de la transition écologique, plusieurs leviers sont incontournables. La formation des partenaires sociaux doit aller au-delà de la simple sensibilisation et inclure une grille de lecture écologique. En ce sens, les moyens alloués à la négociation aux représentants du personnel et aux responsables de relations sociales, devraient sans doute être améliorés.

Des expérimentations et des méthodes d’exploitation des outils, comme l’utilisation de données pour alimenter les négociations issues de la BDESE et coordonnées avec le reporting issu de la CSRDainsi que les études prospectives pour la GEPP, sont essentielles. Il est indispensable d’intégrer systématiquement la transition écologique dans le champ RH, en anticipant les défis futurs en matière d’emplois et de compétences.

Il faut également embarquer le management et la gouvernance dans cette dynamique. Cette dernière vise aussi bien les comités exécutifs et de direction que les conseils d’administration pour lesquels la loi Pacte a renforcé le nombre d’administrateurs salariés. L’instauration d’un comité de la transition écologique rattaché aux instances de gouvernance peut enrichir le dialogue au sein de ces organes et éclairer leurs décisions à l’aune des nouvelles modalités de mesure et des limites planétaires. Les dispositifs d’intéressement, touchant tous les collaborateurs, et de rémunération des dirigeants à des critères ESG sont là aussi de puissants leviers, à la condition qu’ils restent cohérents. Ils doivent être alignés sur les enjeux « matériels » de l’entreprise, c’est-à-dire les plus « pertinents » au sens défini par la CSRD.

Pour renforcer ces initiatives, une implication et une coordination supplémentaires en faveur de la transition écologique de la part des instances politiques européennes et nationales s’avèrent nécessaire afin d’aller de l’avant et respecter les objectifs de l’Accord de Paris, pour lesquels la France a été fer de lance lorsqu’elle a accueilli la COP 21. La transition écologique exige un engagement collectif fort et global, structuré et soutenu par des politiques publiques claires et courageuses, pour que notre société soit capable de relever les défis environnementaux tout en assurant une justice sociale.


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