Il faut désormais se rendre à l’évidence, la seconde vague est là et elle s’annonce difficile. Nous sommes fin octobre et plus de 50 000 cas sont dépistés chaque jour. Près de la moitié des lits de réanimation sont d’ores et déjà occupés par des patients Covid. Contrairement à ce que l’on dit, les enseignements de la première vague ont bien été pris en compte. Une large majorité des ARS (Agences Régionales de Santé) coordonnent efficacement les ouvertures de lits COVID et de réanimation supplémentaires entre le public et le privé. Nous avons appris et compris qu’il était indispensable de jouer la carte de la solidarité locale, au sein d’un même territoire, et d’admettre les patients en proximité, sans recourir aux coûteux déplacements de patients entre régions, sauf de façon tout à fait exceptionnelle. Par Daniel Caille, PDG de Vivalto Santé
Par ailleurs, nous serons en capacité de traiter beaucoup plus de malades que durant la première vague de l’épidémie, grâce aux stocks de matériels qui ont été constitués.
A première vue, nous devrions donc être capables de faire face à cette nouvelle vague. Pourtant, nous sommes inquiets.
Collectivement, public et privé, notre capacité à ouvrir des lits Covid supplémentaires et des lits de réanimation, tout en traitant les autres malades, est limité par un problème central : le manque de personnels soignants, disponibles et formés. Les personnels qui nous font le plus défaut sont les infirmièr(e)s et les aides-soignant(e)s, ceux qui œuvrent au plus près des malades. Le malaise au sein de ces professions n’est pas récent. En réalité, le crise du Covid ne fait que mettre en lumière ce qui couvait depuis déjà quelques années.
Le salaire des infirmières en France se situe à la 23ème place des 33 pays de l’OCDE, derrière la Finlande et l’Italie, et juste devant la Grèce et la Slovénie. Ce niveau de salaire oblige ces professionnels à habiter souvent loin de leur lieu de travail, surtout dans les grandes villes, ce qui ajoute des contraintes à des horaires déjà difficiles : tôt le matin, tard le soir ou la nuit.
La contrainte budgétaire qui a pesé sur les établissements hospitaliers, avec une baisse continue des tarifs d’hospitalisation de 2014 à 2018, a également et considérablement dégradé leurs conditions de travail. Les nombreux rappels à l’hôpital, pris sur les congés et les repos, perturbent leur vie privée.
La réglementation a, de plus, au motif de renforcer la sécurité du patient, éloigné les soignants de ce qui était leur motivation profonde : travailler au plus près du patient, et délivrer des soins relationnels, autant que techniques. Les soignants se plaignent ainsi de passer plus de temps devant un ordinateur que dans la chambre de leurs patients et de voir se multiplier à l’infini leurs tâches administratives. Enfin, et c’est sans doute ce qui est nouveau et inquiétant, les « héros » de la première vague sont fatigués.
Ceux qui ont été applaudis tous les soirs à 20H, supportent depuis 7 mois une intense charge de travail.
Le traumatisme de la première heure est présent ; le rythme épuisant, les souffrances à partager, des patients isolés de leurs familles, la contrainte physique et psychologique.
Alors, que pouvons-nous faire ?
D’abord, proposer des déroulements de carrière motivants, avec de réelles perspectives d’évolution tout au long de la vie professionnelle. Ensuite une véritable réflexion sur l’organisation et le contenu du travail doit être menée. Comment alléger le travail administratif ? Quels outils modernes mettre à disposition des soignants pour leur simplifier la tâche ?
Des solutions digitales existent. Il faut les déployer rapidement : notre expérience montre que nous pouvons alléger jusqu’à 50% de ce temps administratif. Enfin, nous, dirigeants d’entreprises de santé, devons nous engager dans cette dimension sociale et humaine, et consolider ainsi le sens de notre action. L’évolution de Vivalto Santé vers le statut d’Entreprise à mission est une initiative qui devrait embarquer les autres acteurs du secteur.
La priorité à la santé ne doit pas être donnée le temps d’une pandémie. La santé est notre bien collectif le plus précieux, celui qui fonde notre humanité. Il ne faut pas s’y tromper. Le choix que nous faisons, en ces heures tragiques, n’est pas qu’un choix de logistique ou d’organisation. C’est un choix de civilisation.
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