Récemment, la CARB (California Air Resources Board) a mené un projet visant à décrire la voie à suivre pour atteindre l’objectif de 100 % d’électricité propre de l’État. Le rapport politique de l’agence se concentre sur les innombrables défis que la Californie devra relever pour rendre son réseau électrique neutre en carbone d’ici 2045, comme l’exige le projet de loi SB 100 du Sénat californien, et met en lumière un cadre politique pour concrétiser sa vision de l’énergie propre.
La voie à suivre correspond aux attentes qu’on peut en avoir. De grandes quantités d’énergie éolienne et solaire, ainsi que des batteries et un réseau de transport d’électricité élargi permettront probablement à la Californie de se doter d’un avenir propre en matière d’électricité. Une grande question, bien sûr, sera de savoir combien cela coûtera. La CARB conclut que le coût total des ressources d’un réseau électrique 100 % propre dépassera légèrement les 65 milliards de dollars (53 milliards d’euros) en 2045, soit 6 % de plus que dans le cadre du statu quo, qui est la norme de 60 % d’énergie propre renouvelable que l’État vise pour 2030.
Pourtant, la CARB a omis de mentionner une solution de réduction du carbone dans la modélisation de base de son plan zéro carbone. La technologie à éviter est le captage et le stockage du carbone (CSC) associé à la production de gaz naturel et de charbon. Dans son rapport, l’agence déclare qu’elle exclut le CSC des projections de réseau propre en raison de « l’absence de données sur les coûts et les performances pour un captage du carbone à 100 % ».
La CARB offre des détails supplémentaires :
« Il y a un intérêt et des investissements croissants dans la production de gaz naturel avec le CSC afin d’offrir plus de flexibilité et de fiabilité au réseau électrique de l’État. Toutefois, les obstacles technologiques et économiques à la décarbonisation complète des combustibles fossiles restent importants. Les ressources partiellement décarbonisées ne répondaient pas aux critères des agences communes pour les technologies à zéro émission ».
Ce que dit la Californie, c’est que le CSC, malgré des années de développement et de relance, reste un mystère en termes de disponibilité et de coûts futurs. Par conséquent, l’hypothèse de base de l’État est qu’il atteindra la neutralité carbone du réseau sans beaucoup de CSC, et qu’il s’appuiera plutôt sur des technologies qui ont déjà fait leurs preuves sur le marché.
C’est une question importante, car le captage du carbone est la bouée de sauvetage ultime pour l’industrie des combustibles fossiles, et le moyen par lequel le charbon et le gaz pourraient continuer à être pertinents dans un monde qui, ces derniers temps, s’est beaucoup plus préoccupé du changement climatique.
À première vue, le fait que la Californie contourne le CSC pourrait surprendre. Bien sûr, cet État hyper-vert a déjà fait de nombreux efforts, à tel point que certaines centrales sont presque à l’arrêt complet sur son territoire. La Californie a également cherché à éliminer le charbon du mélange d’électricité qu’elle importe. Et, bien sûr, le gaz naturel a perdu de son éclat suite à la découverte, en 2015, de fuites massives de gaz naturel provenant de l’installation de stockage d’Aliso Canyon, même si les turbines à gaz restent un moyen très pratique d’équilibrer l’intermittence de la base croissante d’énergie solaire de l’État.
En réalité, la CARB a de bonnes raisons de rester vigilante face au captage et au stockage du carbone. Malgré toute l’attention que le CSC a suscitée au fil des années, la réalité est que la technologie du CSC est loin d’être prête à apporter une contribution significative à la limitation des émissions de carbone à l’échelle mondiale.
Pour mettre en perspective le rôle actuel du CSC, il y a peu de temps encore, les États-Unis ne comptaient qu’une seule opération commerciale de captage du carbone pour la production d’électricité à partir de gaz. Aujourd’hui, le pays n’en compte plus aucune.
Pourtant, même pendant son fonctionnement, l’usine de gaz naturel Petra Nova de NRG Energy au Texas n’a capturé que 1,4 million de tonnes de CO2 par an. Cela représente environ quatre millionièmes des 37 gigatonnes d’émissions anthropiques annuelles mondiales provenant de l’industrie des combustibles fossiles. Le CO2 capturé a été transporté par 129 kilomètres de pipeline dédié vers un champ pétrolier où le gaz est injecté, ce qui a permis d’augmenter la production de pétrole et, au final, de générer plus de CO2. Une telle infrastructure devrait être reproduite, plusieurs fois, pour réduire de manière significative les émissions totales de dioxyde de carbone du parc national de générateurs de gaz et de charbon. NRG a suspendu les opérations de capture du carbone au début de l’année en raison de l’impact de la pandémie Covid-19 sur le marché de l’énergie, même si le co-générateur de gaz naturel associé continue à produire de l’électricité.
Tout cela ne veut pas dire que le captage et le stockage du carbone n’ont pas de rôle à jouer dans la décarbonisation. En fait, le captage du carbone est une nécessité. Le CSC sera appelé à éliminer le dioxyde de carbone de l’atmosphère par le biais du captage direct de l’air, ce qui compensera un dépassement presque certain du budget mondial du carbone. Le captage du carbone permettra également d’éliminer les émissions de dioxyde de carbone provenant de la fabrication de l’acier, du ciment et d’autres industries qui dépendent de la combustion de combustibles fossiles et il permettra d’assainir la production de gaz naturel dans une certaine mesure. En outre, le CSC occupe une place relativement bipartite dans la politique en matière d’énergie propre, à tel point que de nombreux législateurs à Washington et ailleurs semblent convenir qu’il vaut la peine d’investir de l’argent. Le président Joe Biden vise à accroître le financement du développement du CSC dans son plan pour l’énergie propre. Cependant, le CSC est loin d’être prêt pour un déploiement à grande échelle dans les prochaines années. Il ne peut être considéré comme une bouée de sauvetage pour l’industrie des combustibles fossiles, ni comme une excuse pour prolonger la dépendance aux combustibles fossiles jusqu’au jour où le CSC sera vraiment prêt. La Californie reconnaît cette réalité en contournant le CSC dans son cadre de base pour un avenir neutre en carbone.
Article traduit de Forbes US – Auteur : Andy Stone
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